Lors des voeux à la presse, Hermeline Malherbe, présidente du département, et Nicolas Garcia, vice-président, ont notamment évoqué la situation toujours inquiétante de la sécheresse et appelé la population à poursuivre ses efforts. Pendant que des solutions émergent collectivement dont Aqua Domitia.
“J’espère qu’il n’y aura pas d’année blanche {sans possibilité d’aides et/ou d’investissement, Ndlr} et que l’on continuera à pouvoir aider les communes dans leurs projets”, a dit Hermeline Malherbe, présidente PS du département, lors des voeux à la presse à la Maison de la Catalanité, à Perpignan ce lundi. “Nous faisons partie de la quinzaine de départements les moins en difficultés financières de France ; je parle de la collectivité pas du territoire (en 2024, un Français sur quatre n’a pas le sentiment de faire pleinement partie de la société selon le rapport annuel sur l’état de la France du Conseil économique et social). Nous sommes une équipe d’élus responsables qui a fait de bons choix budgétaires…”
“La mauvaise gestion de Macron pèse sur toutes les collectivités dont certaines ont été bien gérées”

Alors qu’un accord – qu’elle défend – est possible entre le gouvernement et le PS en vue de la très attendue loi de finances, Hermeline Malherbe a mitraillé Macron et ses gouvernements successifs : “C’est bien de se passer d’impôts ; sauf que cela fait rentrer moins de recettes y compris auprès de ceux qui pouvaient continuer à y contribuer…” Comme les “grandes entreprises, les grandes familles” qui auraient pu continuer à participer à l’effort et qui “ne le font plus”. Elle poursuit :“Pourquoi, depuis 2020 et la crise sanitaire, Macron n’a pas demandé aux grandes entreprises de mettre la main à la poche ? Face à cela, peut-on envisager de baisser le budget de la santé ? Ou des services publics ? Impensable. La mauvaise gestion de Macron pèse sur toutes les collectivités dont certaines ont été bien gérées. On marche sur la tête. Mais, a-t-elle, qualifié, je reste combative et pleine d’énergie.”
“Même ce qui peut apparaître symbolique, le seau dans la douche pour récupérer l’eau, cela fait de belles économies”
Ce chaos politique a-t-il eu des répercutions sur la mise en route du plan Béchu, du nom de l’ex-ministre de l’Ecologie, venu annoncer un investissement étique de seulement 10 M€, en 2024. “On a vécu un moment exceptionnel de sécheresse cumulée ; économiser l’eau, on a appris à le faire ; je crois que ça ne gêne plus personne. Il faut continuer”, a souligné Hermeline Malherbe. “Même ce qui peut apparaître symbolique, le seau dans la douche pour récupérer l’eau, cela fait quand même de belles économies. On en a fait l’expérience. De mai 2022 à mai 2023, cela représente une économie de 3 millions de mètres cubes. Il faut continuer à imaginer comment on fait différemment pour utiliser moins d’eau. Le travail en profondeur avec le monde économique (agriculteurs, le tourisme…) est en cours. “
“En situation d’alerte renforcée ou de crise”
Vice-président du département et maire d’Elne, Nicolas Garcia a renchéri : “Le plan Béchu est très loin d’être au niveau suffisant. 10 M€, c’est ridicule.” Ce ne serait, toutefois, qu’un volet du plan résilience lancé l’année dernière. Surtout que, “malgré les pluies de décembre, les nappes phréatiques ne se sont pas suffisamment rechargées. Toutes sont encore en situation d’alerte renforcée ou de crise. Le barrage de l’Aggly est presque plein mais c’est la seule bonne nouvelle ; le lac de la Raho est bien rempli, d’environ 10 millions de mètres cubes mais si on vit une saison prochaine sans pluie, on est en danger de mort !”
Nous allons continuer à aider les communes qui luttent contre le réchauffement climatique, qui végétalisent, désimperméabilisent les sols”
Et de remotiver les habitants des Pyrénées-Orientales : “Les particuliers ne doivent pas baisser la garde sur les économies d’eau ; on sent que ça se relâche. De notre côté, nous allons continuer à aider les communes qui luttent concrètement contre le réchauffement climatique, qui végétalisent, qui désimperméabilisent les sols, surtout les petites qui ont moins d’aides de l’Agence de l’Eau. Il nous faut travailler la culture de la pluie ; valoriser la rénovation des bâtiments plutôt que participer au financement d’un bâtiment que l’on veut construire là où il n’y a rien. Ce sont des critères importants.” Par exemple, pour Ille-sur-Têt, le département a aidé fortement, autour de 70 % de cofinancement sur un investissement de 4 M€ à 5 M€. Ce sera moindre pour une commune plus importante.
“Il faudrait qu’il y ait 80 cm de neige sur le Canigou…”

Nicolas Garcia ajoute : “La situation est sensiblement meilleure qu’à la sortie de l’été 2024 mais encore très largement en dessous du niveau bas historique dans nos six unités de gestion de l’eau.” Quant au barrage de Vinça, “la loi nous oblige jusqu’à fin décembre à laisser s’écouler l’eau qui y arrive. Et pour que l’on ait suffisamment de réserve d’eau, il faudrait qu’il y ait 80 centimètres de neige sur le Canigou pour que le barrage se remplisse correctement et alimente ensuite les nappes et la Têt. À ce jour, ce qui est tombé en Cerdagne et Capcir ne suffit pas…”
“L’eau du Rhône, une solution entre 2030 et 2050”
Quant à faire venir Aqua Domitia jusque dans les P.-O., Le vice-président du département explique que les études financées par la Région Occitanie avancent. “Ce sera une solution entre 2030 et 2050. Cela ne prend quasiment rien au débit du Rhône où ce gros tuyau prend sa source. Après 2050, on verra”. Cela coûterait la bagatelle de 500 M€ et cela prendrait dix ans. “Cela aura l’avantage de sécuriser les apports d’eau pour l’Aude. La sécheresse historique a fait changer les mentalités. Est-ce que le Canal du Midi sera aura toujours le même niveau d’eau à l’avenir ? On ne sait pas. Il faut trouver des solutions comme créer 20 000 hectares de haies qui apportent de la fraîcheur. Une seule apporte 3 millimètres d’eau par jour. Il faut créer des couverts végétaux ; récupérer l’eau de pluie et faire en sorte que cette eau aillent au moins dans les nappes superficielle, pas à la mer…”
Pyrénées-Orientales, laboratoire d’expérimentation
Des solutions sont à inventer collectivement. C’est justement l’idée de Labo 66, créé il y a un an, est une sorte de think tank, comme Dis-Leur vous l’a expliqué ICI. “Nous lançons un laboratoire des solutions”, avait révélé Hermeline Malherbe, lors de ses voeux lundi 15 janvier 2024. “Il s’agit de travailler avec tous les acteurs concernés sur tout le territoire. Nous voulons faire des Pyrénées-Orientales un laboratoire d’expérimentation. Un département pilote de nouvelles solutions.” Et face à cette situation, la présidente étaie en abordant l’eau “sous ses différentes dimensions : brute ; sa répartition ; les barrages ; l’eau potable ; la résorption des fuites ; la réutilisation des eaux usées traitées ; l’hydraulique agricole et les usages du tourisme et des loisirs. L’eau est un enjeu collectif !” Un “dialogue citoyen” sera lancé au second semestre 2025 qui oeuvrera sur le changement de nom du département.
À ce sujet, Hermeline Malherbe, présidente du département, a confirmé, malgré le retard dû aux vicissitudes politiques à la tête de l’État qu’il s’agira de “mieux identifier le département”, avait-elle défini il y a un an. De “mieux s’ouvrir aux autres”. La parole sera donnée aux habitants sous forme de questionnaire. Avant que le gouvernement ne soit saisi. C’est le Conseil d’Etat qui validera ou non la proposition.
Olivier SCHLAMA
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