Après le scandale qui avait éclaboussé jusqu’à Emmanuel Macron, la Chambre régionale des comptes d’Occitanie publie un rapport sur Perpignan pointant “des dépenses importantes”. Mais c’est “principalement en interne que la ville mobilise ses ressources”, répond le maire, Louis Aliot. Une quinzaine de rapports sur ce thème – sélectionné sur une plateforme citoyenne – de grosses collectivités, sont attendus, avec une synthèse d’ici 2025.
Emmanuel Macron est au centre depuis des années d’une polémique sur le recours aux cabinets de conseil, en particulier McKinsey, au sein du gourvernement. Un rapport parlementaire estime que l’exécutif a dépensé 1 milliard d’euros auprès de ces consultants en 2021. Et McKinsey est accusé d’avoir échappé à l’impôt sur les sociétés. C’est dans ce contexte que les magistrats financiers, répondant à une sollicitation citoyenne, se sont penchés sur la question s’agissant de communes, dont Perpignan.
Un scandale national qui avait fait grand bruit
La Catalane, qui a viré RN aux dernières municipales, a-t-elle eu recours à des cabinets de conseil et dans quelles proportions ? En 2023, la Cour des comptes lance une plateforme pour demander aux citoyens de proposer des thèmes sur lesquels les magistrats financiers pourraient se pencher. C’est dans ce cadre qu’a été retenue, pour examen de la CRC Occitanie, une enquête sur le thème “du recours par les collectivités territoriales aux prestations intellectuelles délivrées par des cabinets privés de conseil”. Il faut dire qu’un scandale national qui avait fait grand bruit. Lié depuis plusieurs années au recours aux très chers cabinets de conseil de la part du gouvernement, donc.
“Perpignan, c’est la première collectivité pour laquelle nous avons publié un rapport sur ce thème en Occitanie. Au total, quinze autres grosses collectivités seront auscultées, avec une synthèse qui sera rendue publique d’ici début 2025”, explique Valérie Renet, présidente de la chambre régionale des comptes d’Occitanie.
122 prestations en quatre ans pour 1,35 M€
La CRC Occitanie écrit : “Ce premier rapport, portant sur la commune de Perpignan sera suivi de la publication d’une quinzaine de rapports établis par quatre chambres régionales des comptes (Bretagne, Nouvelle Aquitaine, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d’Azur) au cours de cet automne 2024.” La CRC Occitanie résume : “Au cours de la période d’instruction 2019-2023, la commune de Perpignan a commandé 122 prestations de conseil pour un montant global de 1,35 M€ représentant 0,2 % de ses charges à caractère général et 0,6 % de ses dépenses d’équipement. Si leur volume ne constitue pas un enjeu financier, ces dépenses sont importantes de par les impacts qu’elles peuvent avoir dans les choix opérés par la collectivité.”
“Manque de compétences internes disponibles”
Et de détailler : “La collectivité motive son recours aux cabinets de conseil par le manque de compétences internes disponibles, ainsi que par le besoin de disposer ponctuellement soit de compétences très spécialisées soit d’un regard extérieur. La commande des prestations de conseil devrait être mieux encadrée : les services ont en effet régulièrement sollicité des consultants sans définition préalable des besoins formalisée. Or, celle-ci est d’autant plus essentielle, qu’il s’agit de prestations non standardisées et sur-mesure. Le suivi des travaux des consultants est à améliorer afin de s’assurer que les productions réalisées correspondent aux besoins de la collectivité. Une évaluation des prestations permettrait à la collectivité de porter une appréciation sur la valeur ajoutée des études commandées. La commune pourrait également veiller à capitaliser en interne les connaissances acquises.”
Le maire RN, Louis Aliot, a répondu rappelant le “faible volume de dépenses” pour un “besoin de technicité” notamment pour bien monter des dossiers avec des partenaires institutionnels et que c’est “principalement en interne que la ville mobilise ses ressources” pour “répondre à ses besoins (…)” Et s’inscrit en faux concernant le fait qu’il n’y aurait pas de doctrine d’emploi justifiant ces recours aux cabinets privés.
Olivier SCHLAMA
👉 La chambre s’arrête, plus généralement, sur “l’absence d’encadrement réglementaire du recours aux prestations de conseil par les collectivités locales. Les prestations de conseil des collectivités locales relèvent du seul droit commun de la commande publique. Le rapport de la Cour publié en 2023, ainsi que d’autres travaux émanant de l’Assemblée Nationale, du Sénat et de l’inspection générale des finances, ont fait le constat de l’importance prise par les prestations de conseil au sein de la sphère étatique, permise par un encadrement insuffisant et des dérives induites”.
👉Ainsi, “le rapport du 16 mars 2022 de la commission d’enquête sénatoriale sur l’influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques a mis en évidence les quatre risques majeurs auxquels l’administration s’est exposée en recourant à des prestataires de conseil : l’opacité (personne n’a de visibilité précise sur le phénomène), le foisonnement incontrôlé (le recours a doublé en volume depuis 2018 pour atteindre 1 Md € en 2021 dont seulement 3 % liés à la crise sanitaire), la dépossession de l’administration dans les orientations stratégiques définies par des prestataires privés – dont beaucoup dépendent de sociétés étrangères – et retenues par les décideurs publics et enfin les risques déontologiques et conflits d’intérêts susceptibles d’être alimentés en particulier par les allers-retours entre la fonction publique et l’exercice d’activités privées.”
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