Rencontres de Bram : Carole Delga et la “gauche de gouvernement” tracent “le chemin de l’espoir”

Carole Delga, aux 4e Rencontres de Bram. Photos : Olivier SCHLAMA

Raphaël Glucksmann, Bernard Cazeneuve, François Hollande, Benoît Hamon, Nicolas Mayer Rossignol, maire de Rouen, Benoît Payan, son homologue de Marseille… Dans l’Aude, devant 2 200 personnes, la présidente de la région Occitanie a fait la démonstration d’une équipe social-démocrate, hors LFI, au travail, d’une “gauche de gouvernement qui se prépare, trace un idéal et agit”. Avec, en ligne de mire, la présidentielle de 2027.

Au coeur d’un joli parc planté de tilleuls et de marronniers centenaires, les Rencontres de Bram, celles de la social démocratie qui se trace son chemin, hors LFI et le macronisme. Imaginées il y a quatre ans par la majorité plurielle du conseil régional d’Occitanie, ces Rencontres – entretiens, tables rondes sur une journée – se situent à mi-chemin de l’université d’été d’un parti qui ne dit pas encore son nom, et un think tank progressiste. Qui rêve d’un printemps qui étoffera sa ligne.

Qui veut, par exemple, faire de l’éducation et la lutte contre le déterminisme social une question fondamentale. “Ce sera une grande cause nationale de la gauche. Le propos du sociologue Pierre Bourdieu des années 1970 est toujours d’actualité, ça me révolte ! Il faut changer le système de formation des enseignants ; créer des passerelles entre privé et public ; passer à la semaine de quatre jours et demi”. Une gauche qui veut aussi “travailler avec le monde de l’entreprise pour créer des emplois” et qui défend des valeurs cardinales, s’opposant au repli communautaire “J’apprends, et c’est une très bonne chose, que le Conseil d’Etat vient de confirmer, l’interdiction de l’abaya dans les établissements scolaires.”

“Nous sommes une équipe qui sait dire non à Emmanuel Macron et non à Jean-Luc Mélenchon”

Carole Delga, Rencontres de Bram. Photos : Olivier SCHLAMA

Cette plateforme unitaire, émancipée de LFI et que le courant socialiste d’Olivier Faure n’a pas rejoint (ci-dessous), s’étend du PCF en passant par les écolos, Radicaux, Place publique et socialistes. Ce mouvement se pose en “gauche de gouvernement qui se prépare, trace un idéal et agit”, comme l’a dit Carole Delga dans son discours. Dont le mantra est ni LFI ni Macron. “On a envie de donner envie”, a-t-elle formulé (lire la vidéo ci-après). La “gauche qui n’accepte pas le repli communautaire ; qui aime l’entreprise.” Et : “Nous sommes une équipe pour la France ; qui sait dire non à Emmanuel Macron et non à Jean-Luc Mélenchon.” 

Carole Delga, qui veut “s’affirmer maintenant, arrêter de s’effacer ou de se cacher ; affirmer nos valeurs avec plus de force et dire ce que nous voulons et proposons pour le pays”, avait le sourire ce samedi à Bram, au coeur de la Région Occitanie. Pas seulement pour le délicieux cassoulet servi à quelque 2 200 convives dont de nombreuses personnalités à l’instar de Raphaël Glucksmann, Bernard Cazeneuve, François Hollande, Benoît Hamon, Nicolas Mayer-Rossignol, le maire de Rouen, Benoît Payan, son homologue de Marseille… “Que nous demandent les Français ? Plus de solutions, de justice sociale, réaffirme Carole Delga. Il peut y avoir deux France irréconciliables. Et ça nous ne l’accepterons jamais” (…) “On ne veut pas que la République tombe, que l’extrême droite gagne.”

“Une gauche qui concilie les enjeux sociaux, écologiques, laïcité, la lutte contre les discriminations…”

Carole Delga, Bernard Cazeneuve et Karim Bouamrane aux Rencontres de Bram. Photos : Olivier SCHLAMA

Ancien Premier ministre, qui échoua à le redevenir sous Macron, il y a quelques semaines, Bernard Cazeneuve n’a pas dit autre chose au micro de TF1 : “Il faut que toutes les initiatives qui permettent une refondation à gauche soient soutenues”, a-t-il commenté, fustigeant le choix d’un Premier ministre de droite en contradiction avec le résultat des législatives, pointant que LFI est un “obstacle à la gauche” qui peut “conduire beaucoup d’électeurs à voter RN”.

Bram n’est qu’une étape : cette gauche social démocrate se retrouvera jeudi prochain à Saint-Ouen, la ville du socialiste de Karim Bouamrane et à Paris, samedi prochain, avec Raphaël Glucksmann. “Nous représentons la gauche du travail”, a défini Carole Delga, chef de file de cette social-démocratie qui veut “tracer le chemin de l’espoir”, détaché de LFI. Une gauche qui “concilie les enjeux sociaux, écologiques, les villes et les campagnes, la laïcité, la lutte contre les discriminations…”

“Une gauche qui s’ouvre à la société civile, aux chefs d’entreprise, intellectuels, présidents d’associations”

A Bram, la présidente de la Région Occitanie s’est dite satisfaite de cette journée : “Nous sommes quelque 2 200 personnes ici où la gauche a ici su se rassembler, parfois des sensibilités différentes pour un événement populaire puisqu’il y avait bien davantage que des militants.” Une gauche qui se dit “responsable des enjeux”. Et qui “s’ouvre à la société civile, aux chefs d’entreprise, intellectuels, présidents d’associations”. Nicolas Myer-Rossignol, maire de Rouen, acquiesce : “Oui, ces Rencontres c’est une sorte de plateforme de gauche pour le pays ; c’est aussi une façon de montrer qu’il y a des solutions élaborées dans les territoires qui peuvent servir au plan national. Ce sont des réalisations que les gens apprécient. Il ne faut pas opposer l’idéal et le réel…”

“Un désir de la population pour le RN, une joie partagée”

Benoît Hamon aux Rencontres de Bram. Photos : Olivier SCHLAMA

Clair, incisif, posé, l’ex-ministre Benoît Hamon a été limpide sur des sujets-clefs. Dont celui qui s’impatronise forcément et qui fit l’objet de la table ronde intitulée : “Face au libéralisme et à l’extrême droite, comment réconcilier la France et rassembler les Français”. Vaste programme. Benoît Hamon, a dit sans ambages que au-delà d’un vote de colère, il y a “un désir de la population pour le programme politique du RN, une joie partagée (…), même si au coeur de ça, il y a le racisme et la xénophobie”. Une demande d’illibéralisme, dont dis-Leur vous a parlé ICI. “Que la gauche arrête de parler de la gauche”, a-t-il fustigé. “L’extrême droite, elle, ne parle pas de l’extrême droite mais parle au peuple. Il faut que la gauche reparle au peuple.”

Sur l’immigration, Benoît Hamon a démonté les vieilles lunes de l’extrême droite, suscitant des applaudissements, demandant “de se débarrasser de nos sentiments et ressentiments”. A propos du meurtre de Philippine, c’est un féminicide ! C’est l’extrême droite qui fait le lien avec l’immigration. Mais sur les 83 violeurs de Mme Pénicot (même s’il n’y en a que 50 au tribunal), elle ne dit rien ! Rien sur ces salauds conscients. Attention de ne pas se tromper : d’un côté, c’est un féminicide, de l’autre une question de patriarcat.”

“Si on renvoyait tous les immigrés, l’âge de la retraite passerait à 66 ans ou 68 ans !”

Une partie du public aux Rencontres de Bram. Photos : Olivier SCHLAMA

L’ancien ministre a aussi rappelé que “les gens voient trois fois plus d’immigrés en France qu’il n’y en a réellement ; cela est vrai dans beaucoup de pays. La singularité de la France, c’est que les Français surestiment le nombre de musulmans. Il est très difficile de parler de la question migratoire. Il est bon aussi de rappeler que si on renvoyait tous les immigrés, il y aurait moins de cotisations et l’âge de la retraite passerait à 66 ans ou 68 ans !”

Et encore : “Le Brexit, brandi par le RN ? Il a généré deux fois plus d’immigration en Grande Bretagne !”, a-t-il rappelé, battant en brèche l’idée selon laquelle les dispositifs d’accueil, notamment l’aide médicale d’urgence, ferait de la France “un aspirateur à immigration. Pourquoi traverseraient-ils alors ensuite la Manche en risquant leur vie ?” La suppression de l’aide médicale d’Etat aux immigrés, contre laquelle s’insurgent tous les médecins, proposée par le nouveau ministre de l’Intérieur ?” 

“Première élaboration d’un projet de société”

François Hollande aux Rencontres de la gauche, à Bram. Photos : Olivier SCHLAMA

Une fausse bonne idée : médicalement, d’abord. Économiquement ensuite : les affections bénignes, moins coûteuses à traiter seraient plus chères une fois qu’elles auront empiré. “D’ailleurs, l’Espagne la supprimée en 2012 avant de la rétablir en 2018. Avec le RN, les étrangers sont les boucs émissaires de tous les maux et comme cela échouera, il y aura d’autres boucs émissaires et vous-mêmes, vous le serez un jour”, a-t-il conclu, appelant à mettre en avant “l’idéal républicain”.

Carole Delga a dit “partager” l’analyse de Benoit Hamon sur ce désir d’extrême droite parmi les électeurs. “Il faut recréer l’espoir (…) et “en finir avec cette gauche qui ne parle qu’à elle-même (…)” Pour Carole Delga, Les Rencontres de Bram sont une “première élaboration d’un projet de société.”

Olivier SCHLAMA

“Olivier Faure voulait une carte blanche et une prise de parole en conclusion, sinon rien. C’est rien”

Carole Delga, aux Rencontres de Bram. Photos : Olivier SCHLAMA

Carole Delga appelle Olivier Faure, comme les statuts du Parti socialiste le prévoient, à organiser un congrès six mois après les législatives. Celui-ci a fait savoir que ce ne serait pas avant 2025. La bisbille n’est pas prête de s’arrêter.

“Olivier Faure est invité depuis quatre ans aux Rencontres. Il a dit, via son directeur de cabinet, cette année qu’il viendrait s’il avait carte blanche et s’il parlait en conclusion. Ce n’est pas l’esprit de Bram. Avec Glucksmann, on a imaginé une conversation. On aurait pu le faire aussi avec Olivier Faure qui a répondu non… Il voulait une carte blanche et une prise de parole en conclusion, sinon rien. C’est rien. Avec Raphaël, on se parle régulièrement. Pas avec Olivier Faure. Il n’y a pas beaucoup de personnalités socialistes qui dirigent un territoire de 6 millions d’habitants… Ici, nous prenons part à un projet pour la France.”

O.SC.

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