Climat : Comment les vignobles du Sud-Ouest préparent leur adaptation

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Lancé en juin 2022 sous l’égide de l’interprofession des vins du Sud-Ouest (IVSO), SO’ADAPT est un projet collectif qui réunit différents partenaires : l’Institut français de la vigne et du vin (IFV), en charge du pilotage, la Chambre régionale d’agriculture d’Occitanie ainsi que les Chambres départementales de l’agriculture de l’Aveyron, de la Haute-Garonne, du Gers, du Lot, du Tarn et du Tarn-et-Garonne. SO’ADAPT, dont le budget s’élève à 310 719 euros, est soutenu financièrement par la Région Occitanie et l’Agence de l’eau Adour-Garonne. Le projet est prévu pour s’achever en mai 2025.

“Il y a quelques années, le projet Laccave, piloté par l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement), a mis en évidence l’impact considérable du changement climatique sur le cycle de la vigne et par-delà sur le profil des vins. C’est en réaction que nous avons décidé de lancer le projet
SO’ADAPT avec la lettre de mission suivante : donner des clés à la génération actuelle ainsi qu’aux générations futures pour adapter la viticulture aux nouvelles conditions agro-climatiques de façon à préserver le potentiel qualitatif et quantitatif des vignobles du Sud-Ouest” expliquent Joël Boueilh et Christophe Bou, co-présidents de l’IVSO (1).

Trois vulnérabilités distinctes face au réchauffement

Ce projet s’inscrit dans la stratégie climat de l’Interprofession des Vins du Sud-Ouest, dont l’autre volet, présenté il y a peu, porte sur la mise en œuvre d’une stratégie de décarbonation à l’échelle des vignobles comme des entreprises, afin expliquent les deux hommes “de prendre notre part dans la lutte contre le changement climatique.”

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Point de départ du projet SO’ADAPT, la caractérisation hydro-pédo-climatique des différents vignobles du Sud-Ouest qui a été réalisée en croisant les analyses de l’évolution sur vingt ans des composantes sol, du matériel végétal et des indices climatiques enregistrés.

Il en est ressorti des niveaux de vulnérabilité distincts, permettant de segmenter la région en trois groupes pour le comportement hydrique actuel des vignes : les plus
exposés (les vignobles de Fronton et du Tarn-et-Garonne), les moyennement exposés (les vignobles du Lot, du Tarn et de l’est du Gers) et les moins exposés (les vignobles de l’Aveyron et de l’ouest du Gers y compris Saint-Mont et Madiran-Pacherenc).

Les chercheurs vont maintenant modéliser l’évolution jusqu’en 2050 de ces trois groupes de vignobles à partir de données climatiques prospectives, qui intègreront les différents scénarios du changement climatique. La dernière phase du projet consistera à qualifier la vulnérabilité viticole de chaque bassin de production et à
identifier des leviers locaux d’adaptation afin de définir des stratégies d’adaptation au plus près du terrain.

“Documenter les enjeux relatifs à l’accès à l’eau”

“Le projet SO’ADAPT repose sur une méthode ambitieuse et originale, visant à définir la vulnérabilité, à l’échelle la plus fine possible, des différents vignobles du Sud-Ouest à l’horizon 2050. Nous prévoyons ainsi de modéliser de nombreuses informations, intégrant l’évolution de la climatologie, la nature des sols, le matériel végétal, la disponibilité en eau, afin de hiérarchiser, bout de vignoble par bout de vignoble, les vulnérabilités de demain” précise Éric Serrano, directeur du Pôle Sud-Ouest de l’IFV.

Il poursuit : “À l’échelle d’un territoire, la définition des vulnérabilités permettra d’activer les bons leviers d’adaptation, qui pourront être techniques ou stratégiques. Comme nous étudions aussi bien les surfaces plantées que les surfaces non plantées d’une aire de production, il pourra être conseillé de relocaliser un vignoble au sein d’une aire de production sur des zones non plantées si celles-ci apparaissent moins
vulnérables.”

Des cartes des zones
de tension sur les volumes d’irrigation ainsi que sur le niveau de sécurisation de l’accès à l’eau aux stades clés du
cycle de la vigne sont en cours d’élaboration. Image d(‘illustration NURAGHIES par Freepik

Par ailleurs, So’ADAPT permet également de “documenter les enjeux relatifs à l’accès à l’eau…” Ainsi, la première phase du projet a déjà permis de créer des “fiches de sol” adaptés à chaque sous-zone viticole, afin de permettre aux viticulteurs d’estimer facilement la potentialité de ce qu’on appelle le “réservoir utile en eau
des sols”, soit la quantité d’eau qu’un sol peut stocker et restituer aux plantes. En parallèle, des cartes des zones de tension sur les volumes d’irrigation ainsi que sur le niveau de sécurisation de l’accès à l’eau aux stades clés du cycle de la vigne sont en cours d’élaboration.

Philippe MOURET

(1) Les vignobles du Sud-Ouest abritent, entre les Pyrénées, le Pays basque, l’océan Atlantique et le Massif central, 16 appellations d’origine protégée (AOP) et 12 indications géographiques protégées (IGP), formant un conservatoire de 130 cépages autochtones, dont l’Abouriou, le Braucol, le Duras, le Prunelard, le Malbec, la Négrette, le Tannat, le Loin de l’œil ou le Gros et le Petit Manseng. Cet encépagement unique donne vie à des vins d’une grande originalité, dont 55 % en blanc (sec ou doux), 32 % en rouge et 13 % en rosé. www.vignobles-sudouest.fr

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