Du vent, du soleil. Après les éoliennes en mer, les champs de panneaux solaires pour produire de l’électricité. C’est le projet de la star-up SolarinBlue, basée à Montpellier, et soutenue par les pouvoirs public pour concrétiser de grandes ambitions.
“Pionnière du solaire photovoltaïque offshore”, l’entreprise, désormais montpelliéraine, SolarinBlue, conceptrice et développeuse de panneaux solaires photovoltaïques maritimes, a déployé en Méditerranée les premières unités solaires flottantes en mer. Plus précisément à Sète. Du coup, cette start-up que l’Agence de développement économique de la région Occitanie, Ad’Occ, a accompagnée, relocalise son siège social à Montpellier et ses équipes en Occitanie, dans une région à la forte ambition sur les énergies renouvelables.
Une levée de fonds de plusieurs millions d’euros
Créée fin 2019 à Paris, SolarinBlue a conçu une technologie de parc solaire photovoltaïque flottant “adaptée aux conditions de la pleine mer”, dit-elle. La start-up développe des projets solaires en mer en France et à l’international, espérant se positionner d’ici trois ans “comme un leader mondial du solaire photovoltaïque en mer, présent sur l’ensemble de la chaîne de valeur, du développement technologique à l’exploitation de parcs photovoltaïques flottants”.
La société, qui emploie huit personnes, a été soutenue par l’Ademe, l’Agence de la maitrise de l’énergie, dans le cadre de l’appel à projet PME-TASE, et Evolem qui rassemble des énergéticiens. Et prévoit une levée de fonds auprès de partenaires privés tout début 2024 “entre 5 M€ et 10 M€”, confie Aurélien Croq, le dirigeant. Elle possède une filiale en Inde.
L’Occitanie, première région pour le potentiel d’éolien en mer
Le projet d’implantation à Montpellier est en cohérence avec la volonté de la région Occitanie et son objectif de multiplier par trois sa production d’énergies renouvelables locales afin de couvrir 100 % des consommations d’énergie locales en 2050. Pour y parvenir, elle s’appuie de plus en plus sur les sources d’énergie naturelles de son territoire, qui constituent un atout considérable : deuxième région de France métropolitaine pour la production photovoltaïque et hydro-électrique, troisième pour l’éolien et quatrième pour la biomasse. C’est aussi la première région pour le potentiel de l’éolien en mer dont Dis-Leur vous a souvent parlé, comme ICI.
Lancer un projet à dimension européenne de Sète
Le projet-test local d’une superficie de dix mètres sur vingt mètres s’appelle Sun’Sète – où la société veut s’agrandir et lancer un projet à dimension européenne – illustrant cette stratégie. Il a été développé par SolarinBlue à partir de 2021 pour alimenter en électricité renouvelable les infrastructures du port qui lui-même s’est lancé dans sa propre électrification décarbonnée. Symbolique : il est situé sur l’ancien terminal de déchargement des hydrocarbures en mer : il n’y a ni pêche ni navigation.
C’est l’énergie renouvelable la moins chère à mettre en oeuvre aujourd’hui mais en Europe on a du mal à la développer à grande échelle…”
Aurélien Croq, dirigeant de SolarinBlue
Fabriqué et assemblé dans le port par des entreprises de la région, ce champ démonstrateur sera composé de 25 unités flottantes pour une production estimée 400 MWh/an. “C’est l’énergie renouvelable la moins chère à mettre en oeuvre aujourd’hui mais en Europe on a du mal à la développer à grande échelle. Or, il est d’autant plus économiquement intéressant qu’il est déployé à grande échelle. Au Portugal, certaines fermes de ce type capable de produire un gigawatt arrivent à sortir des prix imbattables de 20 € du mégawatt/heure. En France, si on compare, une installation de particulier, un million de fois plus petite, on est à… 200 € le mégawatt/heure.”
“Première ferme photovoltaïque en mer de toute la France et même de toute la Méditerranée”
Quand il n’est pas en maintenance, le mini-champ solaire se situe à 1,5 km en mer, face à Sète. Selon ses concepteurs, il est fait pour justement passer inaperçu : “Pas plus de trois mètres de haut, ce qui fait qu’à un kilomètre et demi, ce n’est pas visible de la côte. On est très fiers de ce site-test qui est la première ferme photovoltaïque en mer de toute la France et même de toute la Méditerranée. C’est une technologie naissante, toute neuve. Il n’y a que trois boîtes qui sont capables de réaliser ce genre de ferme photovoltaïque en mer qui réclame des compétences en hydrodynamique, en ingénierie de structures navales et évidemment en photovoltaïque”, souligne Aurélien Croq, dirigeant de SolarinBlue qui a fait lui-même Polytechnique.
Occuper des “délaissés” maritimes
Est-ce le lien avec les projets d’éoliens flottants en Méditerranée qui a propulsé cette idée de fermes photovoltaïques flottantes ? Comment fait-on pour avoir des fermes à grandes échelles alors que personne n’a envie de recouvrir le pays et de consommer des terres agricoles avec ça ? L’idée, c’est d’occuper des “délaissés” maritimes, des espaces maritimes où il n’y a pas ou peu de compétition d’usage. Et peu de navigation.
Les îles, gros marché potentiel
Le second marché pour SolarinBlue, ce sont les îles qui recherchent une alternative au fioul. Même si le prix du foncier, ces îles ont l’envie, notamment vis-à-vis du prix des énergies fossiles, de la pollution de passer à l’énergie renouvelable, un argument commercial pour attirer les touristes. “On peut ainsi développer nos projets en propre, le cas échéant en lien avec des énergéticiens (Total, EDF…) Pour la collectivité concernée, bien sûr c’est de l’investissement mais c’est aussi un gain. Ils paient aujourd’hui leur électricité 250 € le mégawatt/heure alors que notre solution va se situer entre 50 € et 100 € le mega/heure.”
Des fermes solaires en lien avec l’éolien offshore
Troisième marché possible pour la start-up : “On peut, dans des îles, faire de très grandes fermes en lien avec l’éolien offshore. Un mât d’éolienne en mer cela fait 10 mégawatt de puissance. Il est distant de chacun de ses mâts voisins de 1 km. Cela fait donc 1 km2. Et dans cet espace-là, on créer une ferme en utilisant 10 % de cette surface qui aurait la même puissance qu’un mât d’éolienne. Et cette électricité est exportable par le câble de l’éolien. Or, le câble dans l’éolien marin, cela peut coûter plusieurs milliards d’euros !”
Selon Aurélien Croq, il n’existe pas d’équivalent en France de sa start-up. “Une seule autre société fait du solaire offshore heliorec, qui fait du nearshore : leur installation ne dépasse pas deux mètres de haut ; ils n’iront jamais en plaine mer. Eux ils sont dans la rade, nous de l’autre côté de la jetée.”
Olivier SCHLAMA
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Ce projet est accompagné par le programme d’innovation Citeph et soutenu par la Région Occitanie. Une vingtaine de personnes ont également pris part au développement de la technologie SolarinBlue. Dans la continuité de son investissement en Occitanie, la start-up a ainsi décidé de baser son siège social à Montpellier. D’ici 2025, des études et des opérations de maintenance seront réalisées sur places et permettront de confirmer le potentiel de cette solution.
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