En attendant la loi “grand âge”… : En Occitanie, 141 000 seniors sont en “perte d’autonomie”

La quasi-totalité des seniors (96 %) vivent ainsi à leur domicile, soit 1,7 million de personnes. Et un quart des seniors vivant à domicile font néanmoins face à au moins une limitation fonctionnelle en Occitanie où il y a moins de places en Ehpad que dans d’autres régions. Mais où une offre de soins infirmiers est très développée.

Bon, vu la crise politique majeure que traverse notre pays, il n’est pas sûr du tout que la fameuse loi “grand âge” ne soit pas une nouvelle fois mort-née… Promise depuis 2017, il s’agit, notamment, d’adapter les logements pour que les personnes âgées y restent plus longtemps. Avec des aides et des primes… De refondre le système de services d’aides à domicile, et de sortir de la logique de la tarification à l’heure ; de financer l’accessibilité des petits commerces… Rien de moins.

En 2030, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans, pour la première fois, en France

Mi-novembre, Aurore Bergé, ministre des Solidarités, avait ainsi évoqué la stratégie interministérielle du gouvernement sur le non moins fameux concept du “bien vieillir”, à long terme pour adapter la société à une population qui vieillit de plus en plus : en 2030, un Français sur trois aura plus de 60 ans. Mieux : les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans, pour la première fois, en France.

“530 000 personnes sont en situation de mort sociale”

Il faut donc élaborer et concrétiser une stratégie répondant à ces nouveaux besoins. Las… Le député socialiste Jérôme Guedj avait déploré sur X un “catalogue imprécis de mesures existantes pour la plupart, sans financement nouveau”. Délégué général de l’association des Petits Frères des pauvres, Yann Lasnier ? Il a cinglé : “Rien de concret”, parmi les mesures annoncées. “Les deux millions de personnes âgées souffrant d’isolement en France méritent mieux !”, avait-il ajouté, précisant sur France Télévision, ensuite : “530 000 personnes sont en situation de mort sociale, coupées de tous les cercles sociaux (…) L’isolement social ne concerne pas que les personnes âgées et s’ensuit un glissement vers la perte d’autonomie…”

L’Occitanie, 5e région où la part de seniors est la plus importante en 2020

Car c’est bien de cette phase ultime qu’il est question. L’Insee vient d’ailleurs de sortir une étude parlante. En Occitanie, par exemple, selon l’institut de la statistique, un peu moins de 10 % ( 8 %) des habitants âgés de 60 ans ou plus vivant à domicile sont en perte d’autonomie en 2021, soit 141 000 personnes. “La perte d’autonomie est plus répandue chez les femmes que chez les hommes. La quasi-totalité des seniors en perte d’autonomie bénéficient d’une aide de leur entourage et d’une aide professionnelle ou technique”, est-il précisé dans l’étude.

La quasi-totalité des seniors vivent à domicile

L’Occitanie est la 5e région de France métropolitaine où la part de seniors est la plus importante : 29 % de la population est âgée d’au moins 60 ans en 2020 (26 % en France métropolitaine). “Si les tendances démographiques récentes se poursuivaient, précise l’Insee, 33 % des habitants d’Occitanie seraient des seniors dès 2030.” La quasi-totalité des seniors (96 %) vivent ainsi à leur domicile, soit 1,7 million de personnes, mais cette proportion diminue avec l’âge. Les hommes vivent davantage à domicile que les femmes, en particulier passés 85 ans (88 % des hommes contre 78 % des femmes). Par ailleurs, si jusqu’à 85 ans les seniors vivent le plus souvent en couple, ils habitent majoritairement seuls au-delà.

8 % des seniors vivant à domicile en perte d’autonomie

“Les seniors sont considérés en perte d’autonomie quand ils connaissent des difficultés quotidiennes qui vont au-delà d’un certain seuil de limitations fonctionnelles ou de restrictions d’activité”, rappelle l’Insee. En Occitanie, 141 000 seniors vivant à domicile sont en perte d’autonomie en 2021, soit 8,3 % des personnes âgées de 60 ans ou plus vivant à domicile. C’est 1,1 point de plus qu’en France métropolitaine.

Taux de pauvreté plus élevé en Occitanie qu’en moyenne en France

Quant au taux de pauvreté, plus élevé en Occitanie qu’en moyenne en France métropolitaine (16,8 % contre 14,4 % en 2020), il explique une partie de cet écart. Toutefois, même en neutralisant les effets de la pauvreté dans la région, la part des seniors vivant à domicile en perte d’autonomie reste plus élevée que la moyenne nationale (7,8 % contre 7,2 %). La répartition par sexe et par âge de la population des 60 ans ou plus, proche de celle du niveau national, ne permet pas d’expliquer cet écart.

Moins de places en Ehpad, davantage de soins à domicile

En Occitanie, l’accès à des places en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) est plus limité qu’en moyenne en France métropolitaine ; en revanche l’offre de soins infirmiers à domicile est plus développée. Cela peut expliquer que davantage de personnes âgées en perte d’autonomie vivent à domicile dans la région.

La perte d’autonomie augmente avec l’âge, particulièrement à partir de 80 ans. La part des personnes en perte d’autonomie vivant à domicile passe ainsi de 5,5 % entre 75 et 79 ans à 15,6 % entre 80 et 84 ans pour dépasser 44,7 % après 90 ans. Les femmes sont plus souvent en perte d’autonomie que les hommes (9,8 % des femmes de 60 ans ou plus contre 6,4 % des hommes), en raison notamment de leur espérance de vie plus élevée. En Occitanie, à 60 ans, une femme peut espérer vivre en moyenne jusqu’à 87,5 ans et un homme jusqu’à 83 ans.

Presque tous les seniors en perte d’autonomie reçoivent une aide dans la vie courante

En situation de perte d’autonomie, la quasi-totalité des seniors vivant à domicile, et même tous ceux de plus de 85 ans, reçoivent une aide dans leur vie quotidienne. D’une part, 90 % d’entre eux sont aidés par leur entourage (conjoint, parent, enfant, ami, etc.) D’autre part, 95 % bénéficient de l’aide de professionnels (infirmier, aide-ménagère…), d’appui technique (canne, déambulateur, fauteuil roulant, lit médicalisé…) ou encore d’aménagements dans leur logement (barre d’appui, douche adaptée, porte élargie…)

En 2021, 5,6 % des personnes âgées de 60 ans ou plus bénéficient de l’APA à domicile en Occitanie

La plupart des seniors en situation de perte d’autonomie cumulent ces deux types d’aide (86 %). Seuls 4 % ne bénéficient que du soutien de leurs proches et 9 % que d’une aide professionnelle ou technique. Plus les seniors en perte d’autonomie sont âgés, plus ils combinent les différentes aides et moins ils ont recours uniquement à leur entourage.

Sous conditions d’âge et de perte d’autonomie, les seniors peuvent obtenir l’allocation personnalisée d’autonomie pour payer tout ou partie des dépenses nécessaires à leur maintien à domicile (APA à domicile). En 2021, 5,6 % des personnes âgées de 60 ans ou plus bénéficient de l’APA à domicile en Occitanie, contre 4,2 % en France métropolitaine. La part des bénéficiaires s’élève à 15,0 % pour les 75 ans ou plus (11,7 % en France métropolitaine).

“Près de quatre seniors sur dix se disent restreints dans leurs activités quotidiennes”

Photo Gerd Altmann de Pixabay

Toujours en Occitanie, sans être tous en perte d’autonomie, un quart des seniors vivant à domicile font néanmoins face à au moins une limitation fonctionnelle. “Il peut s’agir de problèmes moteurs (difficultés pour marcher, monter un escalier, se servir de ses mains…), de limitations sensorielles empêchant de voir ou d’entendre correctement même en étant appareillé, ou encore de troubles cognitifs (difficultés pour se concentrer, prendre des décisions, comprendre les autres…)”

Dans le détail, près de 17 % des seniors rencontrent des difficultés motrices, 11 % des problèmes sensoriels et 6 % des limitations cognitives. Par ailleurs, “près de quatre seniors sur dix se disent restreints dans leurs activités quotidiennes. Les problèmes fonctionnels ont un impact supplémentaire sur la réalisation des activités habituelles. Ainsi, parmi les seniors confrontés à une ou plusieurs limitations fonctionnelles, huit sur dix connaissent des restrictions d’activité”.

Olivier SCHLAMA

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