Infatigable défenseuse de la langue occitane, la Sétoise Miquèla Stenta est aussi la nouvelle présidente du Cercle occitan sétois. Vous découvrez sa seconde chronique sur une femme, Marie Durand (1), à l’indéfectible liberté de penser. De quoi faire réfléchir sur les injonctions et autres libertés volées d’aujourd’hui…
– Non, ce n’est pas une erreur.
Non, es pas una deca.
– REGISTER est bien gravé sur la margelle de l’oculus qui fait communiquer la salle basse et la salle haute dans la tour de Constance à Aigues-Mortes.
REGISTER es ben gravat entau sus la pèira de l’oculus que fai comunicar la sala bassa e la sala nauta dins la torre de Constança a Aigas-Mòrtas.
– REGISTER, parce que transcription en français d’une prononciation occitane de “resistir”.
– Gravé par qui ? Pour quoi ?
REGISTER perque transcripcion en francés d’una prononciacion occitana de “resistir”.
Quau lo gravèt ? Per qué ?
– Par une prisonnière enfermée là au XVIIIe siècle. Son délit : refuser d’abjurer sa foi en la religion réformée. Sa langue, l’occitan. Mais elle pratiquait aussi le français, langue de sa religion.
Per una presonièra embarrada aquí au sègle XVIII. Sa fauta : refusar de renegar sa fe dins la religion reformada. Sa lenga, l’occitan. Mas practicava tanben lo francés, lenga de sa religion.
– Était-ce Marie Durand (1), la plus célèbre et tenace de toutes ? On ne sait.
Èra Marie Durand, la mai conoguda e entestardida de totas ? Se sap pas.
– Ce qu’on sait, c’est que, au cours de ses trente-huit années de prison, elle n’a cessé d’encourager ses compagnes, de les aider à survivre, de les maintenir dans leur foi de la religion persécutée.
Çò que sabèm, es que, long de sas trenta-uòch annadas de preson, laissèt pas d’encoratjar sas companhas, de las ajudar de subreviure, de las manténer dins la fe de la religion persecutada.
– Beau caractère. Belle leçon.
Un èime fòrt. Una leiçon fòrta.
– Et nous, aujourd’hui, savons-nous encore résister aux injonctions technocratiques, aux campagnes publicitaires, fussent-elles annoncées pour le bien de tous ? Libertés volées, rachetées par une tête courbée, un bras tendu.
E nautres, uòi, sabèm encara resistir a las injonccions tecnocraticas, a las campanhas de reclama, siaguèsson anonciadas per lo ben de totes ? Libertats raubadas, crompadas contra una tèsta clinada, un braç tendut.
– Marie Durand, occitane de pays, de culture. Que faisons-nous de ton exemple ?
Marie Durand, occitana de país, de cultura. De qué fasèm de ton exemple ?
Miquelà STENTA
(1) Marie Durand est un symbole. Elle est née le 15 juillet 1711 et morte en juillet 1776 au Bouschet-de-Pranles (Ardèche). Elle est emprisonnée à la tour de Constance (Aigues-Mortes) en raison de sa foi protestante, de 1730 à 1768. Sa famille a dû adopter la religion catholique, mais elle conserve sa foi réformée et leurs enfants ont reçu une éducation religieuse protestante. Le frère de Marie, Pierre Durand (1700-1732) est « pasteur au désert », après des études de théologie à Genève. Marie Durand est arrêtée après avoir reçu une assemblée interdite dans sa maison.
Sa fiche Wikipedia dit aussi : “La captivité de Marie Durand dure 38 ans. Elle est enfermée avec une vingtaine d’autres femmes de tous âges et de toutes conditions, elle vit dans la pauvreté, le froid, la promiscuité. « L’inscription “RESISTER” gravée sur la margelle du puits de la prison, est attribuée sans vraie certitude » à Marie, mais est un symbole de l’attitude de Marie Durand qui, tout au long de sa captivité, refuse d’abjurer sa foi, encourage ses compagnes de captivité et écrit de nombreuses lettres, suppliques ou remerciements, à ceux qui envoyaient des secours, notamment au pasteur nîmois Paul Rabaut chargé de s’occuper des prisonnières et à sa nièce, Anne, fille de Pierre Durand, elle-même réfugiée à Genève.”
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