Patrimoine : Le joyau Salagou-Cirque de Mourèze labellisé Grand Site de France

Coucher de soleil sur le lac du Salagou. Sophie Pirkin CRTL Occitanie

C’est le 22e territoire en France couronné pour avoir su marier vie locale, développement touristique et protection des paysages. En Occitanie, ce label est particulièrement représenté avec les Gorges du Tarn, les Gorges de l’Hérault, la Camargue gardoise, le Cirque de Navacelles et le Canigou. Une distinction rare.

Pas de procrastination du gouvernement pour le Salagou et le Cirque de Mourèze ! C’est même une “accélération” de la décision octroyant plus tôt que prévu à ce territoire le label Grand Site de France après que la démarche fut initiée en… 2010 !

Cette labellisation intervient moins de deux mois après celle des Gorges du Tarn et de la Jonte, rejoignant les rares autres sites élus que sont les Gorges de l’Hérault, la Camargue Gardoise, le Cirque de Navacelles ou encore le Canigou, dans les P.-O.,  dont la gestion est qualifiée “d’exemplaire“. Ce label, très difficile à décrocher, entend marier slow tourisme de paysages extraordinaires et vie locale.

“Patrimoine culturel, agricole, naturel géologique unique”

Patrouille cheval au Salagou, Ph. SMGS

Contrasté, riche de paysages exceptionnels, le Salagou-Cirque de Mourèze est l’un des joyaux de la région région, “comptant un patrimoine culturel, agricole, naturel et géologique unique”, qualifie le département de l’Hérault qui en a délégué la gestion à un syndicat mixte ad hoc. Comme Dis-Leur vous l’avait expliqué ICI en juin, ce label est une distinction très exigeante et convoitée qui permet aux Grands Sites français de promouvoir la préservation environnementale et un tourisme durable. De quoi valoriser un territoire sans qu’il soit muséifié.

Pour Jean-Louis Gély, vice-président au tourisme et à l’économie au département, “c’est la réussite de l’ensemble du territoire héraultais, de ses acteurs et ses habitants, engagés collectivement pour la préservation du paysage, de l’environnement et de son développement touristique et économique. Chaque année, ce sont près de 500 000 visiteurs qui découvrent le plaisir d’un tourisme éco-responsable sur le site Salagou-Cirque de Mourèze”.

Un territoire de dix-sept communes

Mourèze et son Cirque, Ph. Cyril Berneau

Le Grand site Salagou-Cirque de Mourèze s’étend sur une superficie de 11 650 hectares (1 800 ha pour le domaine départemental du Salagou dont 750 hectares de lac) à cheval sur les communautés de communes du Clermontais, du Grand Orb et du Lodévois et Larzac. Il compte 17 communes, dont 7 intégralement (Brenas, Celles, Liausson, Mérifons, Octon, Salasc, Villeneuvette) et 10 partiellement (Cabrières, Carlencas-et-Levas, Clermont-l’Hérault, Lacoste, Le Bosc, Le Puech, Mourèze, Péret, Pézènes-les-Mines, Valmascle).

“Il y eut un projet de golf et d’hôtel et une pression immobilière que les élus ressentaient…”

Pourquoi ce territoire a-t-il voulu décrocher ce label rare et exigeant ? C’est la directrice de ce grand site qui donne la réponse : “Le déclic s’est imposé à la fin des années 1990, décrypte Cécile Olive ; il y eut un projet de golf et d’hôtel et une pression immobilière que les élus ressentaient… Ils avaient quelques inquiétudes. Ils ont alors demandé de l’aide à l’État pour trouver un outil de protection. Ce qui n’est pas commun : d’habitude, c’est l’État qui propose de protéger un site.” On ne partait pas de zéro.

“Depuis 2003, le site était déjà classé au titre des paysages exceptionnels au titre de la loi de 1930 et au-delà du lac du Salagou lui-même et du Cirque de Mourèze.” Arrive 2005 et la création du Syndicat mixte, indispensable pour coordonner les actions futures, gérer la fréquentation et la vie locale. Rien ne laissait présager, en effet, que ce lac érigé pour l’irrigation et l’écretage de crues devienne un haut lieu du tourisme régional. D’où l’importance d’un travail collectif puissant.

Tuff rouge raviné, plateaux basaltiques, dolomites blanches, vignes claires, bleu étincelant…

La terre rouge du Salagou. Ph. SMGS

Une grande variété de formes et de couleurs caractérise ce Grand Site : tuff rouge raviné, monts et plateaux basaltiques, reliefs calcaires, dolomites blanches, vignes claires et espaces boisés plus sombres, bleu étincelant ou gris ardoise du lac. “On ne veut pas attirer davantage de monde, surtout l’été, insiste Cécile Olive. On préfère faire passer des messages de prévention.”

Ce territoires compte des villages languedociens typiques, “une biodiversité riche d’espèces protégées et un patrimoine bâti rare constituent également l’esprit des lieux. Le territoire du Grand Site couvre un large espace autour du lac de barrage créé en 1969, témoin d’une histoire récente de résilience et de combat pour l’invention et la préservation d’un paysage nouveau”.

“Deux cents personnes travaillent ensemble”

Pour “canaliser la fréquentation”,  gérer les différents usages sur ce territoire comme les activités sportives qui peuvent s’y dérouler, les bases et autres aires de camping-car ; homogénéiser les pratiques des différents prestataires, avec lesquels il faut une nécessaire “coordination“, il a fallu créer un “code de conduite” et engager un “travail collaboratif”. Il faut aussi continuer à maintenir un équilibre avec la vie agricole du pays, l’habitat et les paysages et la protection de la biodiversité. Pas moins de “deux cents personnes travaillent ainsi ensemble, y compris avec des habitants…”

“Avant, les voitures étaient garées un peu partout, éparpillées, parfois jusqu’à l’eau du lac ou dans les vignes”

Relais nautique du Salagou. Ph. SMGS

Développer le slow tourisme nécessite une approche globale et des mesures locales prises en profondeur – comme pour Saint-Guilhem le Désert ou le Canigou – avec la gestion du stationnement des véhicules, par exemple. “Avant, les voitures étaient garées un peu partout, éparpillées ; parfois même jusqu’à l’eau du lac ou dans les vignes, confie encore Cécile Olive. Là, on s’attache à une canalisation des flux”, avec des idées à l’impact “minimaliste” qui marchent comme la formation de merlons pour que l’on ne puisse pas garer sa voiture en certains endroits. Une gestion locale pour un équilibre global.

Plusieurs autres outils ont été développés pour déployer une stratégie de mise en tourisme coordonnée : outre la carte des vocations du Grand Site, “l’observatoire participatif de la fréquentation ; des patrouilles au service de l’observation des flux et de la sensibilisation des visiteurs ; l’accueil et la gestion des camping-cars. Une maison de site à Mourèze participe aussi à l’accueil sur le territoire, et plusieurs projets ambitieux pour favoriser l’écomobilité sont en cours ou prévus”, souligne le réseau des Grands sites de France.

Requalifier les trois pôles d’accueil

La Roque, lever de soleil Ph. SMGS

Il y a aussi un projet de requalifier les trois “pôles d’accueil” (les berges du lac, la baie de Vailhès et Mourèze), créés dans les années 1970 par les collectivités, les bâtiments d’accueil et les infrastructures sont “peu qualitatifs architecturalement et peu intégrés au niveau paysager”. Ils offrent un service d’accueil sur site à minima. “L’offre est à adapter et à qualifier”. Une carte de vocation des espaces rendra ceux-ci plus clairs pour définir quels sont les espaces naturels à ne pas toucher ; où faut-il tracer des déplacements doux ; créer des circuits de découverte entre les villages qui ont des patrimoines d’exception comme le Pic de Vissou et Villeneuvette ; une liaison entre le lac d’Avène au nord du département et celui du Salagou… Aménager des pistes cyclables. Et enfin sans être exhaustif relier les trois grands Sites coeur d’Hérault, Navacelles, Saint-Guilhem-le-Désert, Mourèze.

De nombreuses actions que le label vient couronner

Ce n’est pas tout. De nombreuses actions ont été réalisées : l’animation de la charte architecturale, urbanistique et paysagère ; la mise en œuvre d’un service de conseil architectural et paysagiste ; le soutien de l’activité agricole, viticole et pastorale diversifiée, ou encore la protection des espèces emblématiques en tant qu’opérateur Natura 2000. “D’autres actions telles que la réhabilitation pas à pas du village de Celles s’inscrivent dans la volonté d’agir pour les habitants. Le Grand Site de France oeuvre également à améliorer l’accueil du public et valoriser les pratiques locales, dans le respect des paysages et de l’environnement”, conclut le réseau des Grands Sites. C’est tout ce travail que le label vient couronner.

Aigle de Bonelli, outarde canepetière, minioptère de Schreibers, murin de Capaccini…

Un Aigle de Bonelli. Photo source SRCI

Fort de ses paysages exceptionnels, sa biodiversité et ses espèces emblématiques (blongios nain, aigle de Bonelli, outarde canepetière, minioptère de Schreibers, murin de Capaccini, petit et grand Rhinolophe, murin à oreilles échancrées), il dispose de nombreux monuments historiques, tels que Notre-Dame-de-Roubignac, Saint-Pierre de Mérifons, le Château de Lauzière, les Dolmens de Toucou ou la Manufacture de Villeneuvette (SPR). Ce site comprend également de nombreux témoignages géologiques inclus dans le Géoparc Terres d’Hérault qui en font un site remarquable et incontournable.

Le réseau français compte aujourd’hui 53 Grands sites membres, dont deux grandes collectivités (les départements de l’Hérault et du Puy-de-Dôme), 22 sites labellisés et une trentaine de sites en démarche d’obtention, qui accueillent plus de 40 millions de visiteurs. Dans l’Hérault, deux sites sont déjà labellisés : le Cirque de Navacelles et les Gorges de l’Hérault (Saint-Guilhem-le-Désert). Et deux autres sont engagés dans la démarche : la Cité de Minerve-Gorges de la Cesse et du Brian et le Canal du midi à Béziers.

Préserver les paysages et l’environnement en accompagnant le développement économique

Moureze depuis le Vissou. Ph. C. Berneau SMGS

Présidé par Marie Passieux, conseillère départementale, le syndicat mixte du Grand Site Salagou-Cirque de Mourèze porte le projet de développement, d’habitat et d’accueil qui prend en compte le besoin de restructuration de l’espace, et le transcrit dans le choix des interventions, en termes de vocation de trois types d’espaces : les sites emblématiques des rives du lac du Salagou, le Cirque de Mourèze, Villeneuvette, le Pic de Vissou ; les grands paysages agricoles et naturels ; et enfin les villages.

Il s’agit également de préserver les paysages des deux cœurs de site, gage d’un développement local durable, tisser des liens autour d’une histoire singulière et des paysages protégés et protéger et valoriser les grands paysages agricoles et géologiques. “Ces objectifs associent une démarche de préservation des paysages et de l’environnement, un accompagnement du développement économique (tourisme, agriculture) et le maintien de la vie locale.”

Olivier SCHLAMA

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