Participez à l’enquête : Pourquoi l’énigmatique gecko colonise le Sud

Le CNRS lance une enquête citoyenne accessible à tous sur ce petit lézard protégé qui colonise tout le Sud de la France, à commencer par Montpellier et Toulouse.

C’était la star des apéros tardifs de l’été. C’est un reptile protégé fascinant dont on n’a pas à avoir peur. Mieux : sa présence serait parfois signe d’effet bénéfique. Selon une croyance populaire, il porterait chance. Le petit lézard, appelé chez nous aussi tarente, se nourrit de petites bestioles dans la maison, moustiques en tête. Certains posent même ce petit lézard inoffensif qui passe son temps à rechercher la chaleur en bois sur le seuil de leur maison comme un signe de protection. amulette, tatouage, le gecko (on dit aussi margouillat en Polynésie).

Réchauffement climatique ? Urbanisation ? Les deux ?

Un gecko ou tarente. Ph. Luis M. San-Jose

Or, “contrairement à ce que l’on peut imaginer, les reptiles qui affectionnent la chaleur, sont très mal armés pour affronter des changements brutaux de température”, certifie le CNRS. Et, alors que les lézards et les serpents paient déjà un lourd tribut au réchauffement climatique, le gecko (ou tarente de Maurétanie), semble être en pleine expansion.

Comment ce petit lézard qui se reproduit beaucoup en ce moment vit-il le réchauffement climatique ? Et l’urbanisation a-t-elle favorisé son expansion ? Une équipe toulousaine de scientifiques du laboratoire Évolution et diversité biologique (EDB) en collaboration avec la Société herpétologique de France (SHF), a lancé un projet national de science participative inédit baptisé GeckoLocalisation.

Une enquête nationale ouverte à tous

Ph. Luis M. San-Jose

Ce projet de science participative qui prend la forme d’une enquête participative : tous ceux qui observent un ou des gecko chez eux peuvent faire remonter cette information en répondant à un questionnaire en ligne (ICI), ce qui permettra d’alimenter une base de données nationale. Vous pouvez ainsi participer à la recherche et aidez les scientifiques à cartographier la présence des geckos partout en France.

Très présent à Toulouse, Montpellier et le Sud

Jessica Côte, post-doctorante du labo Evolution et diversité biologique. DR

Le projet s’adresse à tous (ICI le site). Jessica Côte est post-doctorante au laboratoire Evolution et diversité biologique (EDB-CNRS-U,niversité Paul-Sabatier de Toulouse) : “On a remarqué que les geckos étaient de plus en plus présents dans le Sud de la France, notamment à Toulouse où l’on peut en voir même sur les murs depuis la rue, vers les lampadaires qui attires les insectes.” La scientifique ajoute : À Montpellier c’est encore davantage le cas. On s’est rendu ensuite compte que ce lézard avait colonisé un peu tout le bassin méditerranéen. Et que sa localisation remonte de plus en plus haut ; on s’est aussi aperçus que ce petit animal intéresse pas mal les gens. Ce que l’on aimerait comprendre, c’est pourquoi et pour quelles raisons la présence de ce lézard s’étend en France.” Y compris en signalant des facteurs très locaux, comme à quel étage se trouve le lézard.

Je connais par exemple des commerçants qui jouaient le jeu à fond en notant à quelle heure ils avaient fait leur observation, à quel étage, etc.”

“J’ai été étonnée, confie encore Jessica Côte, de constater que les gens étaient très réceptifs à ce projet. Je connais par exemple des commerçants qui jouaient le jeu à fond en notant à quelle heure ils avaient fait leur observation, à quel étage, etc.” Le changement climatique et l’urbanisation, ou une combinaison de ces deux facteurs, pourraient en la cause de leur présence accrue. “Les températures du continent européen ont augmenté de 1.7 à 1.9°C2 au cours des dernières décennies, de concert avec l’expansion des villes. La chaleur dégagée par les matériaux urbains et les activités humaines rendent plus importants les phénomènes d’îlots de chaleur, notamment la nuit, lorsque les geckos sont plus actifs”, souligne le CNRS.

Colonisation rapide

gecko. Ph. Luis M. San-Jose.

Est-ce une espèce sentinelle de l’environnement ? “Pas forcément. Pour nous, c’est un cas d’école de colonisation. Et une colonisation rapide et il n’y pas beaucoup d’espèces dans ce cas. Par ailleurs, nous travaillons avec la société d’herpétologie qui, de son côté, aimerait savoir s’il y a un lien entre la présence ou non de la tarente et d’autres espèces de lézards.” 

Premiers résultats courant 2022

L’étude a commencé il y a déjà quelques mois. Elle a ciblé les amateurs de reptiles via le réseau de la Société française d’herpétologie. “Nous avons déjà reçu 2 200 personnes qui ont ouvert le sondage. Désormais, nous ouvrons cette enquête à tous les volontaires. Les observations commenceront dans un premier temps à se tarir fin octobre-début novembre, le froid arrivant. Le sondage sera peut-être relancé ensuite en mars-avril 2022. Les premiers résultats courant 2022.” 

Olivier SCHLAMA

  • Le site du projet en cliquant ICI
  • Participez à l’enquête en cliquant ICI
  • Pour les aider et devenir acteur ou actrice du suivi de la biodiversité, la première étape de la démarche consiste à répondre à un questionnaire en ligne en indiquant la présence ou non de geckos dans votre environnement. Avec ces données, les scientifiques feront des modèles de distribution d’espèces mettant en lien la présence des geckos avec les conditions environnementales prédominantes à l’échelle nationale. Ces modèles permettront de connaitre les variables environnementales (température, précipitation, taux d’urbanisation…) les plus importantes pour les geckos et de prévoir comment ils se répartiront dans les décennies à venir à mesure que l’environnement change.
  • Le gecko, une source d’inspiration… Les geckos peuvent changer de couleur rapidement, du brun clair au gris foncé presque noir en moins d’une heure pour se camoufler et éviter ainsi la prédation. Ils ont un pigment cutané similaire à celui de l’humain : les mélanines. Mais contrairement à nous, les geckos ont la capacité de déplacer ces pigments à l’intérieur des cellules de la peau.
    Gecko. Ph. Luis M. San-Jose.
    Curieusement, les geckos changent de couleur en percevant la couleur de l’arrière-plan qui les entoure et non à travers leurs yeux. Leur peau contient un type de protéine ; les opsines, similaires à celles exprimées dans nos yeux et qui semblent être responsables du déclenchement des changements de leur couleur. On peut dire que les geckos voient avec leur peau ! De plus, les geckos possèdent sur la face inférieure de leurs pattes des lamelles adhésives, garnies de millions de poils microscopiques. Chaque poil est attiré perpendiculairement à la surface par des forces électrostatiques (forces de Van der Waals) qui agissent à l’échelle nanométrique et lui permettent de se déplacer au plafond de nos habitations ou encore sur l’eau.

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