Étude inédite : L’Occitanie compte au moins 20 % de travailleurs pauvres

Photo : Olivier SCHLAMA

Selon l’Insee d’Occitanie, quelque 470 000 personnes survivent avec 1 063 € par mois, qui est le seuil de pauvreté. Et pour ceux qui restent pauvres, une fois les prestations versées, si l’on ne compte que le reste à vivre (une fois tout payé), ils sont tout de même au nombre de 190 000 personnes dans la région, soit un sur dix.

La situation sociale n’est pas reluisante. En Occitanie, elle est un tantinet affolante. Selon Magali Flachère, cheffe de projets à la division Démographie et politiques sociales à l’Insee Occitanie, co-auteure d’une étude inédite de l’Insee Occitanie, “en 2018 (derniers chiffres connus), en Occitanie, 20 % des travailleurs retirent de leur activité moins de 1 063 euros par mois, le seuil de pauvreté. Cette forme de pauvreté touche particulièrement les femmes et les plus jeunes, notamment en raison de conditions d’emploi favorisant la précarité (contrats courts, temps partiels)”.

Parfois, les autres revenus du ménage compensent un peu…

Magali Flachère

Des parcours professionnels souvent instables, avec des alternances de périodes d’emploi, de chômage ou d’inactivité, expliquent également la faiblesse des rémunérations. Les revenus des autres membres du ménage et le versement de prestations sociales permettent cependant à certains de compenser cette situation d’emploi défavorable. En fin de compte, 8 % des travailleurs de la région sont en situation de pauvreté malgré les compensations au sein de leur ménage et les transferts sociaux (1).

470 000 personnes gagnent à peine plus de 1 000 € par mois

Heureusement “qu’en général, ces 20 % de travailleurs, qui vivent sous le seuil de pauvreté, ne vivent pas seuls et touchent des prestations sociales et qu’ils survivent…” Et c’est pour cela qu’ils ne sont pas à la rue… L’Insee a chiffré le nombre de ces travailleurs qui gagnent un peu plus de 1 000 € par mois : une population qui atteint 470 000 personnes en Occitanie…! Et pour ceux qui restent pauvres, une fois les prestations versées, si l’on ne compte que le reste à vivre (une fois tout payé), ils sont tout de même au nombre de 190 000 personnes dans la région, soit un sur dix.

La moitié des travailleurs pauvres gagne moins de 500 €/ mois

L’étude va plus loin : la moitié des travailleurs pauvres en revenu d’activité gagne moins de 500 euros par mois… Un minorité d’entre eux (un sur six) déclare des revenus nuls ou négatifs. “Il s’agit d’aidants familiaux qui ne perçoivent pas de revenus individuels, de travailleurs en formation (apprentis et étudiants à faibles revenus d’activité non soumis à l’impôt sur le revenu) ou de non salariés qui ont la possibilité de déclarer un déficit.”

Femmes et jeunes sont les premiers concernés

Et “pour ceux déclarant des revenus positifs (5 sur 6), le revenu d’activité médian s’établit à environ 650 euros par mois.” Les femmes et les jeunes sont les premiers concernés : elles sont “plus souvent pauvres en revenu d’activité que les hommes (24 % contre 17 %)”. C’est également “le cas de 52 % des travailleurs de moins de 25 ans. En raison de difficultés rencontrées en fin de carrière, les plus de 55 ans sont aussi plus souvent concernés (24 %) données complémentaires”, détaille l’étude. Cette situation “touche davantage les femmes que les hommes. Et les jeunes.”

Dans les grands centres urbains et les territoires ruraux

“On l’explique comment ? On est dans une région qui figure structurellement parmi les plus pauvres de France.” La pauvreté est fortement présente soit dans les grands centres urbains soit dans la ruralité profonde. Magali Flachère confirme : “La pauvreté, dans notre région, est une problématique plutôt urbaine dense, dans les grands centres ; mais pas seulement. Il y a une autre pauvreté avec un autre visage dans les territoires les plus ruraux.”

C’est ce qu’explique abondamment l’Insee Occitanie dans une seconde étude. “Suite à la pandémie de covid-19 et à la crise économique qu’elle a engendrée, la part des foyers en situation de précarité financière a augmenté en 2020 (…) La pauvreté résulte en Occitanie d’effets structurels de long terme”, précisant que les communes des ceintures urbaines “sont relativement épargnées. Dans les communes rurales, la pauvreté est plus forte dans celles à habitat très dispersé où les retraités sont plus souvent pauvres et où les actifs agriculteurs ou indépendants ont des revenus plus faibles.”

“Les familles monoparentales sont les plus touchées ; ceux qui vivent principalement des indemnités chômage”, confirme Magali Flachère. “L’Occitanie est l’une des quatre régions en France métropolitaine à avoir le plus de travailleurs pauvres. Après la Corse (où 18,5 % de la population vit sous le seuil de pauvreté) ; les Hauts-de-France (18 %) ; Paca (17,3 %) et donc Occitanie (17,2 %).”

Davantage de dépendances aux prestations sociales

Ce n’est pas tout. “En 2020, ajoute encore l’Insee, on note plus de dépendance aux prestations sociales. La part des foyers en situation de précarité financière augmente fortement parmi ceux qui perçoivent une prestation sociale de la caisse d’allocations familiales (CAF) ou de la mutualité sociale agricole, la MSA, avec + 2,3 points par rapport à 2019). Ces foyers représentent plus d’un million de personnes, soit 22 % de la population âgée de moins de 65 ans en Occitanie. De plus, la dépendance aux prestations sociales s’est fortement accrue, signe d’une dégradation de situations financières déjà difficiles…”

Olivier SCHLAMA

  • (1) Toujours selon l’étude : “La plupart d’entre eux (87 %) perçoivent au moins une prestation sociale dans l’année, pour un montant mensuel moyen équivalant à 250 euros. Parmi les travailleurs qui restent pauvres tout en bénéficiant de prestations sociales, seuls 60 % d’entre eux perçoivent la prime d’activité et/ou des minima sociaux. Quand ils les perçoivent, le montant reçu est faible(équivalent de 160 euros par mois en moyenne), plus faible que le montant perçu par les travailleurs qui évitent la pauvreté grâce aux prestations. Ce décalage peut en partie résulter d’un non-recours pour certains travailleurs économiquement pauvres.”

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