Blocages : La colère des agriculteurs, nouvelle pierre dans le jardin d’Attal

Les tracteurs bientôt en marche sur Paris ? Image d'illustration, aleksandarlittlewolf sur Freepik

Vu de Paris, cela ressemble sans doute à une Grande Jacquerie (*) et bon nombre d’écologistes, tels Yannick Jadot ou Sandrine Rousseau, se pincent le nez face à cette colère qui sent le purin ! Comme à Toulouse où des dizaines de tonnes de paille, fumier et autres déchets ont été déversées devant la Cité administrative. Du côté de Matignon, on s’inquiète cependant, avec la crainte d’un scénario à la mode “gilets jaunes…”

La grande peur, c’est d’abord l’explosion d’un nouveau conflit social, quelques jours seulement après la nomination de Gabriel Attal au poste de Premier ministre. L’agriculture est “un sujet absolument majeur (…) que je prends très au sérieux” a tenu à affirmer le nouveau locataire de Matignon.

Un amoncellement de contraintes et de normes…

Le principal syndicat agricole français, la FNSEA, dont le président Arnaud était reçu ce lundi soir à Matignon (ainsi que son homologue des Jeunes Agriculteurs), a fait savoir que des actions seraient lancées dans toute la France afin d’exprimer le “ras-le-bol” et la “colère” du monde agricole.

La grogne dure depuis plusieurs mois, mais elle a explosé avec la hausse progressive de la fiscalité sur le gazole non routier (GNR, utilisé pour les engins agricoles) et les reports successifs du projet de loi agriculture, promis il y a plus d’un an par Emmanuel Macron et encore repoussée par le nouveau ministre de l’Agriculture Marc Fesneau.

En cause également, les procédures administratives et des normes européennes toujours plus exigeantes notamment en matière environnementale qui entrainent une “concurrence déloyale” avec les pays qui n’y sont pas soumis.

Des palettes ont été brûlées à proximité de l’A9, dans les Pyrénées-Orientales… Photo Dis-Leur !

La France, mais aussi l’Allemagne, la Pologne, les Pays-Bas…

Le conflit à propos du GNR est d’ailleurs étendu à de nombreux pays européens, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Pologne, Roumanie. Partout le “green deal” (Pacte vert européen, qui fixe des objectifs de réduction des pesticides) est également vivement attaqué. Et la colère agricole va même jusqu’en Grande-Bretagne -qui n’est plus assujettie aux normes européennes depuis le Brexit- où les producteurs de fruits et légumes s’insurgent, eux,  contre les conditions qui les lient à la grande distribution…

La contestation, qui avait commencé avec le retournement des panneaux d’entrée dans les villes, a donc pris de l’ampleur et la FNSEA annonçait par la bouche de son président (sur France Inter), avant même la rencontre avec Gabriel Attal, que des actions seront menées “toute la semaine et aussi longtemps qu’il sera nécessaire.”

Salon de l’Agriculture, élections européennes…

La grande crainte du gouvernement c’est de devoir affronter un nouveau mouvement, comparable à celui des Gilets jaunes dans un contexte déjà très tendu,  à quelques mois seulement des élections européennes. Or, les agriculteurs n’excluent pas par exemple d’organiser un cortège pour “monter” à Paris à l’ouverture du Salon de l’Agriculture le 24 février prochain…

Les actions se multiplient déjà dans de nombreux départements et particulièrement en Occitanie. Ce lundi à Perpignan, un cortège d’une quinzaine de tracteurs portant des pancartes au nom de diverses communes du département (Argelès, Céret, Prats-de-Mollo, Lamanère, Montferrer…) a déposé des déchets verts devant la préfecture (17h) avant de se rendre dans le calme devant la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), puis créant un bouchon de plusieurs kilomètres sur la RN9.

Par la suite, les manifestants ont bloqué l’accès au péage sud vers l’A9, brûlant des palettes et des pneus (notre photo dis-leur.fr).

Une réunion des ministres de l’Agriculture de l’UE est prévue cette semaine.

Philippe MOURET

(*) La Grande Jacquerie, a eu lieu en mai et juin 1358. C’est le plus grand soulèvement de paysans de l’histoire de France. Cette révolte tire son nom de Jacques Bonhomme, archétype du “vilain” (paysan), puis sobriquet désignant les paysans français en général.

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