Dossier : Intégrée aux Thermes, la maison sport-santé de Balaruc se pose en modèle vertueux

Thermes de Balaruc les Bains. Photos : Olivier SCHLAMA

Les 500 maisons sport-santé (MSS) habilitées de l’Hexagone dont 60 en Occitanie sont majoritairement fréquentées par des patients avec une pathologie chronique, personnes âgées et autres sédentaires qui veulent se remettre au sport. La MMS de Balaruc, qui vient d’ouvrir, s’adresse aux curistes et aux habitants du bassin de Thau. Et se pose en référence, y compris de l’équilibre financier d’une structure qui, jusque-là, rencontre de nombreux freins. Ce dispositif permet, selon Laurence Bertherat, chargée de mission à l’ARS, de “dégager la plus-value du sport-santé sans en passer par des médicaments !”

C’est une première qui pourrait faire florès. Spécialisées en rhumatologie et phlébologie, ces cures s’inscrivent aussi dans des parcours de soin post-cancer (du sein notamment) ou post syndromes infectieux (type covid long). La station vient d’ajouter une corde à son arc : l’intégration d’une maison sport-santé – à ne pas confondre avec les maisons médicales ! – qui oeuvre pour une meilleure prévention des maladies chroniques. Et qui, dans certains cas, peut être remboursés (lire ci-dessous). Ce remboursement par l’Assurance maladie est attendu, par ailleurs, d’ici la fin de l’année ; ce qui serait un sacré coup de pouce pour doper leur fréquentation.

Bilan de la forme physique en vue d’un programme

Thermes de Balaruc-les-Bains. Photo : Olivier SCHLAMA

La première station thermale de France peut déjà compter sur un important capital humain avec ses quelque 50 000 curistes accueillis chaque année pour y passer trois semaines de remise en forme au bord de l’étang de Thau en profitant de ses eaux bienfaitrices connues depuis l’Antiquité. Dans cette maison sport-santé (MSS), ils peuvent y faire un bilan physique de leur forme et suivre un programme adapté, y compris quand ils reviennent en cure puisque pour beaucoup son§ des habitués et suivent une cure régulièrement. Mieux : une fois revenu dans leur région d’origine, ils pourront continuer leur programme dans une MSS proche de chez eux. C’est l’originalité de la MSS de Balaruc-Les-Bains qui pourrait donner l’exemple à d’autres thermes sur le territoire.

Gymnastique, stretching, activité physique adaptée aux handicapés ; prévention des chutes et équilibre…

Dans cette maison de sport-santé, on y trouve du renforcement musculaire avec des activités cardio modérées avec de la marche nordique, de la gymnastique douce, stretching ; de l’activité physique adaptée aux personnes en situation de handicap ; des programmes de prévention des chutes et équilibre. Cette maison sport-santé pourra profiter aux curistes – et leurs accompagnants – qui, lorsqu’ils reviendront dans leur région d’origine, pourront y être suivis, participant ainsi à la popularité de ce ce chaînon manquant jusque-là peu connu. Mais aussi à ceux qui habitent le bassin de Thau.

Maison de santé pour tous les publics

Paul-François Houvion. Ph. DR.

Ces structures, sorte de chaînon préventif dans la chaîne du soin, ont pour mission d’accueillir, informer et orienter tous les publics vers des possibilités d’activités physique, notamment à des personnes qui habitent à proximité. Il s’agit donc tout à la fois de personnes en bonne santé mais qui sont sédentaires et qui souhaitent se remettre au sport ; aux personnes atteintes de pathologies et/ou qui ont des facteurs de risques de maladies chroniques et aux personnes dont le médecin a prescrit du sport sur ordonnance.

Servir d’exemple à d’autres stations thermales afin d’étoffer le réseau des maisons sport-santé en France”

Paul-François Houvion, DG de Balaruc-les-Bains

Paul-François Houvion, directeur général des thermes de Balaruc-les-Bains dit : “Grâce à une prise en charge complète intégrant soins thermaux, réhabilitation physique, accompagnement médical et éducation thérapeutique, nous proposons un modèle efficace, durable et duplicable. Il peut servir d’exemple à d’autres stations thermales afin d’étoffer le réseau des maisons sport-santé en France.” L’équipe a aussi pour ambition, “en sensibilisant et en informant les curistes venus des autres régions, de les inciter à fréquenter la maison sport-santé la plus proche de chez eux à leur retour de cure”.

“Difficultés à mobiliser les médecins et à atteindre tous les publics, ainsi que l’insuffisance de financements pérennes”

Selon l’Injep (Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire) qui a mené une enquête récente sur leur fonctionnement, a critiqué le modèle actuel général : “Le développement des maison sport-santé se heurte à plusieurs obstacles : les difficultés à mobiliser les médecins et à atteindre tous les publics, ainsi que l’insuffisance de financements pérennes”, résument ces experts qui notent aussi “un choc des cultures” entre médecins et  promoteurs du sport et les difficultés que rencontrent, sans doute par manque de légitimité, les MSS “pour attirer tous les publics”. Alain Fuch est médecin-conseil à la CPAM de Côte d’Azur. Engagé dans la promotion du sport-santé depuis longtemps, il préside aussi une association, Azur Santé (qui associe l’ancien champion Stéphane Diagana), habituée à dialoguer avec les pouvoir publics.

Demain – on espère à la fin de l’année – ce devrait être remboursé sans conditions de ressources au même titre qu’un médicament. Et là, ça va booster les prescriptions et la fréquentation des MSS”

Alain Fuch, président de Azur Santé
Activités maison sport-santé de Balaruc-les-Bains. Ph. Thermes de Balaruc.

Alain Fuch dit, complétant en cela l’enquête de l’Injep : “Actuellement, la fréquentation n’est pas bonne dans les maisons sport-santé pour une raison essentielle : la sécurité sociale ne rembourse pas”, pose-t-il, dont sa propre association se définit comme un centre de ressources et d’expertise sur la promotion du sport-santé. “Du coup, reprend-il, les médecins en prescrivent peu ; les patients ne le demandent pas parce que ce n’est pas remboursé… Demain – on espère à la fin de l’année 2025 – ce devrait être remboursé sans conditions de ressources au même titre qu’un médicament. Et là, ça va booster les prescriptions et la fréquentation des MSS.”

Le modèle “rompt avec la dépendance aux subventions”

La station thermale de Balaruc devrait donc dans ces conditions atteindre son objectif d’un chiffre d’affaires de 500 000 € pour cette maison sport-santé (une reprise d’une maison déjà existante à Balaruc). Une dizaine de dix professionnels spécialisés ont été mobilisés pour l’occasion. Le modèle économique ? Il rompt avec la gestion associative et la “dépendance aux subventions qui sont le lot de nombreuses MSS en France, rarement rentables. Il s’intégre à une activité déjà bien établie, bénéficiant d’un flux régulier de patients”. “Notre modèle s’appuie sur une rentabilité maîtrisée, tout en étant porté par une ambition de santé publique plutôt que par une logique de profit”, explique encore Paul-François Houvion. “L’objectif principal est d’assurer l’équilibre financier du dispositif, en garantissant au plus grand nombre un accès durable à ce service essentiel”.

60 maisons de sport-santé en Occitanie

Thermes de Balaruc-les-Bains. Photo : Olivier SCHLAMA

L’ARS verse, sur demande, une aide de 20 000 € à chaque maison de santé habilitée mais rien aux structures privées. Cela représentait, en 2024, plus de 1 M€. La Drajes (Délégation régionales académiques à la jeunesse, à l’engagement et aux sports), elle, donne 550 000 € pour l’ensemble des MSS de la région. “Selon les maisons de santé, elles ont un équilibre financier différent. Certaines sont gratuites pour les patients ; d’autres font payer une petite participation ; cela dépend des aides qu’elles ont par ailleurs. L’Occitanie fait partie des régions où l’ARS donne le plus d’argent”, décrypte Laurence Bertherat, chargée de mission à l’ARS. En Occitanie, sur les 60 MSS habilitées, on compte 40 maisons de santé associatives ; 6 portées par des collectivités, 6 par des établissements de santé, 7  sont privées et 1 est gérée par une Sisa (Société interprofessionnelle de soins ambulatoires. Il y a d’autres projets de création, , notamment dans le Gers ; il y en a d’autres. Et sans doute cinq ou six autres à venir mais leur dossier n’a pas encore été déposé. Le territoire d’Occitanie est bien couvert par les MMS. De sorte qu’elles peuvent être en lien aisément avec nos autres dispositifs.”

Dans les 60 maisons de santé d’Occitanie, selon les derniers chiffres connus, pas moins de “15 709 personnes ont bénéficié d’une information d’un service ou d’une prise en charge par la MSS en 2022 dont 4 608 personnes qui ont participé à un bilan de condition physique”, confie Laurence Bertherat, chargée de mission à l’ARS Occitanie..

Un dispositif d’avenir : il trouve sa place parmi les autres dispositifs (…) De quoi dégager une plus-value du sport-santé sans en passer par des médicaments !”

Laurence Bertherat, chargée de mission à l’ARS

Toujours selon Laurence Bertherat, la bonne santé des maisons sport-santé est à plusieurs vitesses. “Certaines sont implantées, reconnues qui fonctionnent bien. Le plus gros, ce sont les MSS qui démarrent. Par ailleurs, il y a plusieurs types de maison sport-santé : spécialisées dans la prise en charge de personnes handicapées ; certaines sont itinérantes – avec un camion – comme celle de Nîmes ; celles qui vont dans les quartiers politique de la ville. Il y en a une à Castelnau-le-Lez qui dispose d’un médecin pour des prescriptions. Pour Balaruc, aussi, il y a les médecins des thermes sur place. Cela facilite la prescription. Pas besoin de les convaincre, ils sont dans le même circuit fermé”. Ces maisons sport-santé, “c’est un dispositif d’avenir parce qu’il trouve sa place parmi les autres dispositifs existants ; elles permettent de structurer l’offre ; de mettre en avant le travail des enseignants APA et de dégager une plus-value du sport-santé sans en passer par des médicaments !”, conclut la chargée de mission.

Toutes les planètes de la prévention sport-santé s’alignent pour que le nombre de MMS augmente. L’activité physique est reconnue depuis 2011 comme une thérapie non médicamenteuse par la Haute Autorité de Santé. Ses bienfaits sont nombreux pour les pathologies chroniques, le système cardiovasculaire et respiratoire, les articulations, la gestion du stress et du sommeil.

“L’activité physique prévient la survenue de maladies chroniques : cancer, cardio-vasculaires, obésité, diabète et même neurodégénératives et psychiatriques”

C’est un nouvel outil, peu connu dans l’Hexagone, plein de promesses. Il en existe 500 labellisés réparties dans l’Hexagone dont 60 en Occitanie. Le sport-santé a été désigné Grande cause nationale en 2024 en lien avec les JO. La pratique régulière, a affirmé la Haute autorité de santé, est “bénéfique à tous les âges de la vie”. Elle prévient la survenue de nombreuses maladies chroniques : cancer, cardio-vasculaires, obésité, diabète et même neurodégénératives et psychiatriques. La loi de modernisation du système de santé de 2016 donne la possibilité au médecin traitant de prescrire une activité physique adaptée à une affection de longue durée (ALD) ; dans la foulée, les pouvoirs publics ont acté une stratégie de sport-santé. C’est en 2019 que sont nées ces maisons sport-santé sous l’impulsion des ministères de Sports et de la Santé.

“Bilan physique au départ ; 12 séances d’activité physique, une par semaine ; et un bilan de fin”

“N’importe qui peut aller dans une MSS, précise Laurence Bertherat. Mais préférentiellement, cela concerne un public éloigné de la pratique sportive, c’est-à-dire plutôt sédentaire et/ou atteint de pathologies chroniques, y compris les personnes âgées. Le sport-santé est ouvert à tous mais pas dans un objectif de compétition mais dans le but d’améliorer sa santé.” Quelle différence y -a-t-il avec les séances de kiné pour lesquelles la plupart des bénéficiaires sont remboursés ?

Thermes de Balaruc-les-Bains
Ph. Olivier SCHLAMA

“On peut justement aller dans ces MSS pour un bilan de condition physique, sans ordonnance. Et, ensuite, en fonction des pathologies, il faut une ordonnance des médecins. Il y a une gradation. En MMS, ce sont des enseignants APA (activités physique adapté, titulaires d’un master 2 Staps) qui interviennent dans des groupes de six à huit personnes. Il y a à peu près les mêmes équipements que l’on peut retrouver chez un kiné : tapis, vélos elliptiques, etc. Mais, généralement, on est sur des programmes “passerelles” : un bilan physique au départ ; 12 séances d’activité physique, une par semaine ; et un bilan de fin. Ces maisons ont aussi pour mission de recenser l’offre de sports dans leur secteur pour qu’à l’issue du programme, elles puissent intégrer une offre d’un club local.”

Trouver une maison sport-santé près de chez soi

Toutes les données remontent à l’Observatoire de l’activité physique. “Déjà, rien qu’avec les données de 2023, on s’aperçoit qu’il y a une amélioration de la condition physique et si on continue au-delà de trois mois, cela permet de stabiliser l’évolution constatée. Et c’est plus significatif pour les patients aux pathologies chroniques.”

Tout le monde ne connaît pas encore bien ce dispositif, y compris les médecins. L’ARS et la Drajes le copilotent. “Nous travaillons avec les médecins et les professionnels de santé dans le cadre également de dispositifs spécifiques : les maisons de santé pluri-professionnelles ; les communautés professionnelles territoriales de santé… On fait passer de l’information, notamment au travers du site Occitanie sport-santé, plate-forme qui recense toutes les MMS et toute l’offre de sport. Et de plus en plus de clubs sportifs sont ouverts au sport-santé alors que ce n’était pas dans leur culture.”

Olivier SCHLAMA

  • Maison Sport-Santé Balaruc les Bains. Rue de la douane complexe sportif pech Meja, 34540 Balaruc-les-Bains. maisonSportSante@balaruclesbains.org. Tel : 04.67.18.42.36
  • Tarifs. Exemples : Pack MSS APA (trois semaines avec une évaluation et sept séances et un bilan sur trois semaines : 100 €. Pack MSS programme passerelle (trois mois) pour les habitants du Bassin de Thau avec une évaluation, un programme passerelle (22 séances d’APA) sur trois mois et un bilan : 200 €

Vers une prise en charge par l’Assurance Maladie de l’activité physique adaptée à but thérapeutique

Fin janvier, le Conseil stratégique et le Comité Technique de l’innovation en santé ont émis un avis favorable sur l’expérimentation As du Cœur portée par Azur Sport Santé et pilotée par le Dr Alain Fuch. Elle portait sur la prise en charge de l’activité physique adaptée par l’Assurance Maladie pour des patients ayant terminé leur réadaptation après un incident cardiaque. Ce programme, qui a impliqué 466 patients, a permis de démontrer une baisse de leurs dépenses de santé, une économie de 1,5 M€ pour l’Assurance Maladie et la pratique régulière d’une activité physique par la suite pour 83 % des patients. Un groupe de travail va se réunir en 2025 en vue d’officialiser la prise en charge en fin d’année.

Le rapport d’évaluation du programme As du Cœur stipule qu’il “peut constituer une opportunité pour l’intégration de l’APA dans le droit commun, par le cadre structurant qu’il propose” tout en conditionnant sa mise en œuvre à une nouvelle réflexion. Selon Paul-François Houvion, “la prise en charge des programmes d’APA thérapeutiques par l’Assurance Maladie constitue un enjeu capital pour la santé des patients ; elle conditionne l’avenir des Maisons Sport-Santé qui les accueillent et les accompagnent.”