Embauches, rachats, sécheresse… : Le camping ne reste pas planté face à ses défis

Camping les Grottes à Niaux (Ariège). Photo : Olivier SCHLAMA

C’est un marché en pleine croissance qui attire les investisseurs. 50 000 personnes y travaillent, dont 10 000 en Occitanie, et le secteur aura besoin de 10 000 bras supplémentaires à court terme. L’hôtellerie de plein air cumule tous les enjeux de nos territoires, comme l’expliquent Nicolas Dayot, président de la fédération nationale et Marie-France Durancel, vice-présidente régionale. Des enjeux au coeur du congrès de la fédération qui a ouvert aujourd’hui et du Sett, salon annuel des professionnels, du 7 au 9 novembre, à Pérols.

La moitié de notre clientèle nous a suivis quand nous sommes partis de notre région d’origine, la Vendée, pour acheter ce camping dans l’Ariège, il y a douze ans…” Céline Féroyard, propriétaire du camping Les Grottes, à Niaux (Ariège), ne le dit pas pour plastronner mais pour illustrer ce qu’est la relation au plus près du client qui ne serait pas la même si son camping de deux cents emplacements – avec 40 résidents permanents –  était géré par un grand groupe ou un fonds d’investissement, recherchant le profit maximum. Même si dans les deux cas, cela offre des atouts d’une vraie professionalisation du secteur.

“Leur obéir sur tout… Pas question…”

Karine et Céline Féroyard du camping Les Grottes, à Niaux (Ariège). DR.

“Il faudrait leur reverser une partie de notre bénéfice et en plus leur obéir sur tout, tarifs, façon de gérer… Pas question.” Pas question de dénaturer le camping. Et peut-être que celle qui est au four et au moulin, travaillant en famille, n’aurait-elle pas géré de la même façon, avec autant d’écoute et d’empathie, la double panne eau-électricité coup sur coup, cet été, après un terrible orage en ce mois de juillet où les interventions se sont multipliées jusqu’au milieu de la nuit. Et ce n’est pas faute d’être sollicitée pour vendre !

“On a hésité à vendre !”

“Pour l’instant, avec ma soeur, on tient comme ça…”, ajoute Céline Féroyard. “Si on n’est pas à l’accueil, on peut nous trouver côté restaurant”, répondait-elle en juillet dernier au téléphone à des touristes inquiets de ne pas arriver dans les plages horaires d’ouverture. Mais, autour d’elles, les propriétaires d’autres camping cèdent un à un. Qui à une chaine. Qui à un groupe financier. “Peut-être qu’un jour, on changera d’avis… A l’avenir, on s’adossera peut-être à un grand groupe qui s’occuperait du marketing et de la location des emplacements et des mobile-homes”, lâche-t-elle, prise dans une ambivalence. Quand un grand groupe lui a proposé 4 M€ pour racheter son camping ombragé, traversé, originalité, par un ru, et idéalement situé près de Tarascon-sur-Ariège, et qui sait garder cette équilibre d’une convivialité partagée et d’un calme rare, “on a hésité à vendre !”, confie-t-elle. Surtout qu’elle doit faire face aux récurrents défis, à commencer par le recrutement.

“Chez nous, le salaire le plus bas se situe au-dessus du Smic, à 1 500 € mensuels”

Et au milieu coule une rivière… Ph. O.SC.

Ici, pas de bracelet coloré au poignet pour touristes ; pas de standard téléphonique à “Cuge-les-Pins”, hors sol ; pas d’esprit dénaturé non plus ni de camping impersonnel, robotisé. Mais, pour tenir, il a fallu faire des concessions. “Chez nous, le salaire le plus bas se situe au-dessus du Smic, à 1 500 € mensuels, souligne Céline Féroyard. Nous proposons aussi souvent des CDI que nous lissons sur l’année comme pour Angèle” qui vient de Perpignan et qui restera en Ariège jusqu’au 15 octobre. Ensuite ? “Elle sera sans travail durant les quatre prochains mois” que dure la morte saison. “Nous logeons aussi nos salariés qui peuvent partager un mobile-home gratuitement. Mais recruter reste quand même très compliqué. J’ai toujours une annonce à poster sur le site de Pôle Emploi…”

Les grands groupes détiennent 26 % des emplacements

La situation de ce camping familial de très bon standing illustre à merveille les défis que le secteur dans son ensemble, qui affiche plus de 3 % de croissance, le seul en progression, selon l’Insee, doit relever. “Tous les autres modes d’hébergement sont en baisse”, précise Nicolas Dayot, le président de la Fédération de l’hôtellerie de plein air. Le camping Les Grottes, à Niaux, fait partie des 89 % d’indépendants de ce secteur parmi les 7 500 campings de l’Hexagone. Les 11 % restants, détenus par de grands groupes, représentent quand même 26 % des emplacements. Et ce n’est pas fini. Le marché est colossal : un peu plus de trois milliards d’euros par an dont un quart est réalisé par la région Occitanie. Trois milliards d’euros, plus de trois fois plus qu’il y a vingt ans avec 800 M€ en 2000…!

10 000 salariés en Occitanie

Activités assurées… Ph. O.SC.

L’hôtellerie de plein air, ce sont 50 000 contrats salariés, signés pour le coeur de la saison estivale, dont 40 000 en CDD et 10 000 en CDI. L’Occitanie (21 % des nuitées) pèse pour quelque 20 % de ces salariés. Soit 10 000 salariés. C’est aussi 23 % des trois milliards d’euros de chiffre d’affaires. Enfin, ce marché compte cinq segments : les campings associatifs ; les campings municipaux – qui plaisent de moins en moins, on en compte 1 400 – ; les indépendants non regroupés sous la bannière d’une chaine commerciale ; les indépendants avec “chapeau commercial” comme Yellow Village ; et des groupes intégrés qui possèdent des campings. Ce sont ces derniers qui ne sont que 11 %.

“Être indépendant est de plus en plus compliqué”

À la tête du camping California, à Vias (Hérault), Marie-France Durancel est vice-présidente de la Fédération en Occitanie, organisatrice du SETT, le plus important des salons européens dans le secteur de l’hôtellerie de plein air et qui se déroule du 7 au 9 novembre au Parc des Expos à Pérols, près de Montpellier (1). Elle dit : “Il y a de plus en plus de groupes et de chaines qui rachètent des campings. Rien qu’autour de moi, beaucoup d’établissements se vendent. Il y a aussi une trop forte pression d’obligations sécuritaires, urbanistiques, etc. Dans la profession, on se dit : “Mais où va-t-on…?”

“Un indépendant ne recherche pas que le profit…”

En pleine nature… Ph. Olivier SCHLAMA

“C’est une marche en avant. En outre, il y a une fronde de ceux des clients qui disent : “Il n’y a plus de campings purs avec des tentes et des caravanes mais que des mobiles-homes”. Mais, en fait, c’est parce qu’il n’y a plus de demandes ! Être indépendant est de plus en plus compliqué. Nous résistons. Nous-mêmes nous sommes entourés de groupes et de chaines. Et pour continuer à pouvoir investir, on est obligés de se transformer et de mettre des mobiles-homes.” Et : “Un indépendant ne recherche pas que le profit. C’est la grande différence.” Marie-France Durancel ajoute que “cette saison, on a vécu des montagnes russes”. L’avant-saison a été excellent mais juste avant de démarrer, la sécheresse a failli doucher les espoirs. Pendant que les petits campings “souffraient”, les groupes, eux, proposaient des tarifs “extrêmement bas”

L’hôtellerie de plein air attire les investisseurs. C’est surtout sa robustesse qui intéresse en période de “gros temps”

Nicolas Dayot. DR

Président national de la Fédération, Nicolas Dayot complète : “Il y a une vraie tendance de fond au rachat de campings indépendants, reconnaît-il. Une vraie restructuration de l’offre depuis 15 ans. L’hôtellerie de plein air attire les investisseurs. C’est surtout sa robustesse qui intéresse en période de “gros temps”. Comme on a une clientèle surtout française et comme les étrangers que nous accueillons ne sont que des Européens, quand on a une crise sanitaire, par exemple ; une crise financière comme en 2009 ; ou même quand il y a des émeutes en France, les campings, eux, ne perdent pas leurs clients car c’est surtout une clientèle de proximité. Et c’est rassurant pour les investisseurs.” Qui le vivent comme une rente.

La dynamique de conquête de ces groupes secoue aussi le cocotier et oblige les indépendants à se remettre en cause pour être meilleur”

“Certes, l’ambiance et la gestion peuvent être différents quand un camping est géré par des salariés d’un groupe.” Nicolas Dayot, qui exploite lui-même deux campings, dans le Morbihan et le Finistère, identifie des avantages à l’arrivée de grands groupes, notamment une professionnalisation du métier. Le contact, oui ; l’ambiance apéro, bien sûr dans les campings tenus par les créateurs ou leurs descendants d’un établissement. Mais un grand groupe, ça rationalise. C’est même à ça qu’on le reconnaît.

“Certes, la moitié des 7 500 campings sont tenus par leurs créateurs indépendants mais l’autre moitié d’entre-eux, n’étaient pas dans la profession : avant, ils géraient un bar-tabac, ou que sais-je. Ils ont été séduits par l’attractivité de ce métier et, ayant ras-le-bol de la vie trépidante citadine, ils ont voulu aller vivre au milieu de la nature. C’est aussi, autre avantage, une activité saisonnière, qui permet d’avoir une vie de famille.”

Quand vous faites un petit gueuleton entre amis ; et quand vous en êtes au tour de table, et que l’on apprend que vous êtes gestionnaire d’un camping, eh bien vous êtes écrasés de questions !

Nicolas Dayot va plus loin : “Il y a un truc qui ne trompe pas : quand vous faites un petit gueuleton entre amis ; et quand vous en êtes au tour de table, et que l’on apprend que vous êtes gestionnaire d’un camping, eh bien vous êtes écrasés de questions ! Ça devient la discussion de la table. C’est un métier qui fait rêver.”

Quoi qu’on en pense, ces grands groupes “apportent un savoir-faire, des procédures, des process de fonctionnent avec des formations, des outils issus de l’hôtellerie traditionnelle…” Il ajoute : “Et une bonne partie des clients, qui ne sont pas forcément des habitués mais une clientèle nouvelle, sont contents de la gestion de ces groupes. Ils ne demandent pas à connaître “Jackie” qui dirige le camping familial… D’autre part, la dynamique de conquête de ces groupes secoue aussi le cocotier et oblige les indépendants à se remettre en cause pour être meilleur.”

Dans le Sud (la France est N°2 mondiale du camping après les USA), en Occitanie, Nouvelle Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes, Paca et Corse, “les campings pèsent plus lourds que dans le Nord du pays, environ 60 % de la fréquentation nationale”, indique Nicolas Dayot, président national de la Fédération de l’hôtellerie de plein air. Les groupes se sont toujours beaucoup intéressés à la moitié Sud du pays.” Les plus rentables.

Rachats dans le Sud et… dans le Nord à cause du… réchauffement climatique

Ph O.SC.

En revanche, à cause du changement climatique, ceux-ci s’intéressent aussi aux campings implantés au-dessus de la Loire. Depuis 2010, la dynamique est plus forte : le marché a crû de 29 % ; en Bretagne, Normandie, Hauts-de-France, ont progressé de plus de 60 %. Grâce à leur “amélioration qualitative”, aussi. Ce qui convient aussi aux étrangers, dont la plus grosse partie vient de nos pays voisins du Nord : Pays-Bas, Allemagne, Belgique et Angleterre. Et qui avaient l’habitude d’aller en vacances dans le Sud : Espagne, Italie, Croatie et bien sûr le Sud de la France.

Certains n’éprouvent plus le besoin d’aller aussi loin. Les groupes, dont les plus grands sont français, l’ont bien compris stratégiquement. Et ils s’intéressent également à des rachats aux Pays-Bas, en Allemagne, en Angleterre, au Danemark et anticipent sur le fait que le Nord de l’Europe sera attractif dans les prochaines années. Mais soyons clairs : le Sud n’est pas fini et restera champion des campings. Problème, impossible de créer de nouveaux campings à cause des contraintes environnementales et urbanistiques. C’est aussi la raison pour laquelle le Sud est champion : ses capacités d’accueil sont historiquement les plus importantes.

Sécheresse : “La profession a trouvé des équilibres”

Avant la saison estivale, tout le monde s’inquiétait des conséquences de la sécheresse. Comment l’hôtellerie de plein air a-t-elle réussi à surmonter cette crise où les touristes pouvaient avoir réticence à venir en vacances dans le Sud s’ils ne pouvaient pas disposer des installations aquatiques ? Il y a eu beaucoup d’inquiétude, en effet. Ce que l’on a expliqué à l’Etat, c’est que la piscine, ce n’est pas la variable d’ajustement. C’est l’outil principal d’un établissement. C’est comme le film au cinéma : on ne vient pas dans une salle pour manger du pop-corn mais pour voir un film. Si on enlève le film, vous n’y allez pas. C’est pareil pour la piscine dans un camping où 80 % de la fréquentation se fait dans un camping avec piscine.” Et dans des départements comme les P.-O., où le tourisme est le moteur de l’économie, le calcul est vite fait.

“Nous avons pris des engagements pour réduire de 30 % les consommations d’eau et la promesse a été tenue”

Ph. O.SC.

“Ce que l’on peut dire une fois la saison passée, c’est que la profession s’est mobilisée. On a trouvé des équilibres. Le syndicat des Pyrénées-Orientales a été très actif ; le préfet de ce département a bien compris nos problématiques. Nous avons pris des engagements pour réduire de 30 % les consommations d’eau et la promesse a été tenu, notamment en ne nettoyant pas, avec de l’eau, les plages des piscines ; en n’arrosant pas les espaces verts ; en récupérant des eaux de lavage, etc.”

Il ajoute : “C’est pour cela, que l’on s’est aussi engagé à sensibiliser les clients ; c’est, aussi, de travailler massivement ensemble sur des micro-améliorations comme la pose de détecteurs intelligents à l’entrée des réseaux d’eau des campings pour détecter les fuites ; travailleur aussi sur la réduction de la consommation d’eau. Un seul exemple : une douche consommait 14 litres d’eau à la minute il y a 20 ans ; aujourd’hui, on est dans les douches les plus économes à 4 litres voire 3 litres à la minute.” Et une fois les fuites détectées, “il faudra faire de gros travaux : refaire certains réseaux, des routes ; modifier le système de traitement des eaux usées dans les piscines quand on lave les filtres…” 

Appel à manifestation d’intérêt

La profession a, d’ailleurs, participé à un appel à manifestation d’intérêt avec l’Agence de l’Eau Méditerranée-Corse pour investir dans des travaux importants dans les campings. “L’objectif est d’expérimenter au sein de quelques campings des quatre régions concernées des travaux d’envergure qui pourraient ensuite être dupliqués dans les autres : réutilisation des eaux usées, sensibilisation des clients, détection des fuites, etc. Il y a des financements publics possibles mais le pourcentage n’est pas encore connu…”

2 500 postes manquaient en juin

Quels sont les besoins en emplois dans ce secteur et en Occitanie ? En 2022, une année plus difficile encore que cette année, sur les 40 000 saisonniers, il en manquait 4 000 à l’appel en juin, dont un quart environ en Occitanie. Cette année, c’était de l’ordre de 2 500. Parce que la profession, qui connaît des tensions sur l’emploi, s’est là aussi mobilisée avec une stratégie dédiée. “Nous nous y prenons beaucoup plus tôt désormais, précise Nicolas Dayot. On travaille avec des sociétés spécialisées en tourisme. Comme la profession a beaucoup de petits établissements qui n’ont pas forcément de directeur des ressources humaines, on a mis à disposition un outil qui s’appelle ma carrière camping  qui permet en lien avec Pôle emploi et son site mon emploi tourisme.

Il en précise les contours : “L’idée est de faire se rencontrer propositions d’emplois aux possibles candidats et aussi d’armer les campings avec la création d’une marque employeur pour arriver à ce que l’entreprise soit en quête de salariés comme elle est en quête de clients. Dans une relation de séduction : on présente l’entreprise auprès des salariés potentiels ; en quoi va consister leur job ; ses avantages ; les horaires…”

Pour embaucher des salariés, je suis obligée de passer par de l’intérim et même par deux groupements d’employeurs, dont l’un est basé dans les Pyrénées-Orientales !”

Mais les salariés ne sont-ils pas désormais en quête de valeurs, d’un meilleur salaire et d’un logement décent accessible… Faut-il dédier un bout du camping au logement du salarié ? Deux jours de congé ? Des hausses de salaires ? 

Marie-France Durancel. DR.

Marie-France Durancel emploie six personnes à l’année et 35 saisonniers. “Notre secteur est assez nouveau, très concurrentiel, et a connu une évolution rapide. Les gestionnaires ont voulu se professionnaliser. La difficulté, c’est qu’il n’y a pas d’offre adaptée à notre branche d’activité. Comme nos métiers n’étaient pas forcément connus, cela a été compliqué de trouver des organismes de formation ou des réponses à nos besoins. Pour embaucher des salariés, je suis obligée de passer par de l’intérim et même par deux groupements d’employeurs, dont l’un est basé dans les Pyrénées-Orientales ! “Je diversifie les “canaux”. C’est difficile pour nous de trouver des salariés pour le ménage.”

“On venait travailler chez nous un peu par hasard…”

Pas facile non plus de trouver une hôtesse d’accueil trilingue ! “On va nous rattacher au secteur de l’hôtellerie classique alors que nous avons une polyvalence qui n’est pas la même, plus importante chez nous. Il a donc déjà fallu répertorier tous nos métiers, environ une quarantaine et il a fallu communiquer autour de ces métiers-là, spécifiques. Car on n’était pas connus non plus de l’Education nationale… On venait travailler chez nous un peu par hasard ; quand on cherchait un job d’été d’étudiant ; on ne voyait pas comment on pouvait faire carrière chez nous. On a donc créé des fiches-métiers ; des vidéos ; sur une plate-forme cette année qui regroupe des connaissances sur nos métiers et de déposer des annonces. C’est aussi une opportunité pour des écoles qui peuvent nous envoyer des jeunes en alternance.”

C’est tout bête mais ça commence par soigner sa visibilité digitale. C’est savoir rédiger son annonce ; mettre en exergue ses points positifs. Comme deux jours de congés…”

Le secteur se professionnalise. Maintenant, il lui faut attirer les candidats plus naturellement, en connaissance de cause. “On a travaillé sur la mise en place d’une marque employeur afin de donner des outils aux gestionnaires pour valoriser leur emplois, explique Marie-France Durancel. C’est tout bête mais ça commence par soigner sa visibilité digitale. C’est savoir rédiger son annonce ; mettre en exergue ses points positifs. Comme deux jours de congés, c’est la règle dans mon établissement. Et c’est un besoin pour le salarié. Et c’est ce que je préconise. Certains ont eu des difficultés de recrutement à cause duquel il n’ont pas pu ouvrir le restaurant de leur camping plus que cinq jours par semaine ; ils ont fait le choix drastique de fermer deux jours ne pouvant pas avoir deux équipes en restauration.”

Des mobiles-homes pour loger les salariés

Pour le logement, “dans mon établissement, nous avons enlevé des emplacements de clients et je les ai remplacés par des mobiles-homes pour y loger mes salariés. On n’avait pas le choix ; j’essaie de proposer des contrats plus longs que de trois ou quatre mois qui peuvent aller jusqu’à neuf mois de saisonnalité.

“Après, explique-t-elle encore, tout dépend de la taille des campings, sachant que la taille moyenne c’est 100 emplacements. Ça dépend aussi du lieu géographique sur le littoral languedocien, par exemple, les dates d’ouverture sont plus importantes. Dans l’Hérault, il y a un arrêté de sécurité contraignant et des dates d’ouverture et de fermeture imposées. Et comme de très nombreux campings sont situés en zone inondable, cela ne nous permet pas de pouvoir ouvrir pour les vacances de la Toussaint alors que c’est possible dans d’autres départements”.

On essaie de cocher toutes les cases parce qu’aujourd’hui il nous faut jouer sur toutes les cordes à la fois pour convaincre les candidats”

Le secteur essuie ses propres plâtres. “L’hôtellerie de plein air est, désormais, une branche professionnelle en soi, pose Nicolas Dayot. Nous avons eu six revalorisations salariales au cours des deux dernières années pour rendre nos métiers plus attractifs. Nous proposons aussi qu’il y ait des horaires et des jours de repos fixes et, si possible, consécutifs. Parfois même, certains autorisent leurs salariés à prendre des morceaux de week-end. Il y a aussi tout un travail, compliqué, sur le logement de nos salariés. On a demandé, en vain, au gouvernement de pouvoir récupérer la TVA sur la construction de logements neufs.”

Il fait remarquer que “certains campings achètent même des logements à l’extérieur. On essaie de cocher toutes les cases parce qu’aujourd’hui il nous faut jouer sur toutes les cordes à la fois pour convaincre les candidats. Les métiers le plus en tension ? La restauration, principalement et aussi les hommes et femmes d’entretien. Et c’est important car dans les prochaines années, nous aurons besoin de 10 000 salariés supplémentaires au-delà des 40 000 que nous salarions dans le secteur actuellement.” Pour tenir bars, restos, boutiques qui se multiplient.

“Si vous ne payez pas bien les gens, ils ne viennent pas bosser. Les choses se font naturellement”

S’agissant des salaires, “la branche donne le la, au-delà du Smic. Après, nous sommes pour la liberté, pour le marché. On n’intervient pas dans la stratégie des gestionnaires de campings. De toute façon, si vous ne payez pas bien les gens, ils ne viennent pas bosser. Les choses se font naturellement”.

“On peut se sentir aussi en vacances et se gagner un salaire, pour moi, c’était 1 400 € nets par mois”

Garance, 20 ans, vient de réussir son BTS Tourisme. Originaire de Clermont-Ferrand, elle a été stagiaire au California, le camping de Marie-France Durancel, à Vias. que dit-elle la jeune femme de 20 ans fraichement diplômée ? Elle met en avant “la proximité avec les gens ; petite, quand moi-même je venais en vacances avec mes parents ; je me disais ça doit être super-intéressant de travailler dans un camping ?!” Elle répond : “Ça l’est ! Et puis je bénéficiais de deux jours et demi de repos ; j’étais logée. Du coup, on peut se sentir aussi en vacances et se gagner un salaire, pour moi, c’était 1 400 € nets par mois.” Désormais, elle compte faire des voyages pour parfaire son anglais avant de s’établir quelque part ensuite dans le tourisme. Et peut-être dans l’hôtellerie de plein air, un secteur “super-intéressant !”

Dans mon camping, on pourrait s’y installer où l’on veut ; il y aurait une cuisine partagée ; un potager… ; on y organiserait des soirées jeux de société ; des rencontres…” 

Originaire de Béziers, Alexia, 21 ans, a travaillé cet été dans ce même camping. Pour un stage de trois mois afin de valider son master 1 en tourisme et développement durable des territoires. Bilingue, “j’étais réceptionniste ; ce n’est pas ce que je préférais mais j’aimais bien”. Elle a aussi été au coeur de sa formation en recherchant auprès de l’Ademe, dans le cadre du Fonds pour le tourisme durable, des aides pour des projets qui ont du sens : réduction des déchets pour les clients comme pour les employés, par exemple. “Je ne connaissais pas du tout ce camping ; c’est en postulant ailleurs que l’on m’y a redirigé…”

Aime-t-elle, elle aussi, l’hôtellerie de plein air ? “Oui !” dit Alexia qui entre en Master 2 sans hésiter, citant là aussi une “relation aux clients différente”. Mais si, demain, Alexia, s’investit dans l’hôtellerie de plein air, ce sera avec des idées nouvelles qui rapprochent ; des concepts simples qui permettront à cette génération de réinventer ce que fut la révolution libertaire de la tente il y a 60 ans. “Déjà, mon camping, ce serait un terrain, pas vague, mais totalement vierge, en pleine nature ; on pourrait y venir seul ou en groupes ; on pourrait s’y installer où l’on veut ; il y aurait une cuisine partagée ; un potager… ; on y organiserait des soirées jeux de société ; des rencontres…” 

Olivier SCHLAMA

  • Le SETT est un salon annuel professionnel qui se déroule du 7 au 9 novembre au parc des expositions, à Pérols, près de Montpellier. Avec beaucoup de fournisseurs sur place qui s’adresse aux gestionnaires de campings. Gestion des piscines, des espaces verts, restauration… Avec des ateliers, des conférences. Depuis 2019, une journée est consacrée à la promotion et valorisation des métiers de l’hôtellerie de plein air.

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