Occitanie : Les métiers d’art font leurs “Révélations” au Grand Palais

Sabine Fillit devant l'un de ses triptyques. Ph Région Occitanie.

Sous la houlette de l’agence de développement économique de la Région Occitanie, dix artisans d’art participent à la biennale Révélations à Paris cette semaine. Une vitrine pour un secteur qui représente plus de 4 000 détenteurs d’un savoir-faire parfois ancestral.

Originaire de Martres-Tolosane (Haute-Garonne), de l’un des lieux emblématiques des métiers d’art en France, à travers ses fameuses faïences, Carole Delga est sensible aux objets fait main. Elle s’habille très souvent en coordonnant ses habits et accessoires de marques de créateurs. La présidente de la région Occitanie, qui a aussi lancé un label fait en Occitanie a permis de mobiliser une aide directe à ces artisans et leur offre une vitrine à la biennale Révélations.

Dix exposants d’Occitanie parmi 450 présents à la biennale

La première délégation d’Occitanie, en 2019, avec Carole Delga. DR.

Sculpteur, bronzière, doreuse botaniste, céramiste, mosaïste… Les métiers d’art d’Occitanie seront présents au salon Révélations, du 8 au 12 juin, au Grand Palais éphémère, à Paris, l’un des plus côtés. Pour cette  5e édition, rendez-vous incontournable des métiers d’art et de la création, l’agence de développement économique Ad’Occ organise le pavillon Occitanie avec dix artisans d’art. Parmi les 450 exposants qui exposent, la Région Occitanie, sur un espace de plus de 50 mètres carrés, présente une délégation de dix artisans d’art sélectionnés par le jury des Ateliers d’Art de France (1).

Vitrine des savoir-faire de notre région

La photo de groupe de la délégation 2022. DR.

Fin 2018, la Région Occitanie met en place une subvention mobilisable par les artisans d’art pour développer leur activité, participer à des salons, acheter du matériel… Au-delà, Carole Delga a offert une vitrine de nos savoir-faire en en faisant participer certains à la biennale internationale Révélations. Entre trente et quarante pays y sont représentés. Après l’édition 2019, celle de 2021 avait été reportée pour cause de crise sanitaire. Les dix participants ont été choisis après un appel à candidatures. Ceux-ci postulent sur le site d’Ateliers d’art de France, le plus gros de la profession qui organise ce salon. Cette vitrine, qui n’a pas de prix, a un coût : un stand de 50 m2, nu, avant d’être équipé, coûte 30 000 €.

“Nous avons eu pas mal de retombées…”

“La face cachée”‘, l’une des oeuvres de Sabine Fillit. DR

“On a eu, après la première participation, pas mal de retombées, explique Olivia Perez, chargée de projet filière métiers d’art à Ad’Occ. Trois sur les douze qui y participaient en 2019 ont vendu des pièces : un exposant a exporté aux USA ; une autre, l’Héraultaise, Sabine Fillit – qui revient avec nous cette année -, avait décroché un contrat avec Vinci pour des tableaux pour décorer des bâtiments de l’entreprise, etc. D’autres ont eu des commandes personnalisées. Toutefois, les retombées ne sont pas en général toujours immédiates. Souvent, cela se concrétise plusieurs années après.”

Nouer des contrats pro, même si j’aime aussi avoir le retour du public sur mon travail…”

Plasticienne travaillant à Montpellier, Sabine Fillit était de la délégation en 2019. Ce salon de “qualité” consacre des talents. “Ces journées se déroulent dans des lieux prestigieux avec une scénographie très minutieuse. Cela me permet de nouer des contrats pro, même si j’aime aussi avoir le retour du public sur mon travail…” Ce qui l’a marquée : “Lors de la première journée, j’ai vendu un triptyque de tableaux en ardoise.” Elle a aussi été remarquée par une architecte de Vinci Immobilier pour lequel elle a livré dix bas reliefs pour décorer six halls d’immeubles de la société en Seine-et-Marne.

Cette vente représente dix-huit mois de mon chiffre d’affaires !”

Sabine Fillit. Ph. Julien Cresp.

Cela représente “de quoi vivre un bon moment sans avoir à trop se soucier du lendemain : cela représente dix-mois de mon chiffre d’affaires !”, confie Sabine Fillit titualire d’un BTS d’architecture intérieure et d’un diplôme de l’Ecole nationale des arts décoratifs de Paris.

Parce que les métiers d’arts sont inféodés à un paradoxe existentiel : ils représentent parfois un savoir-faire ancestral qui participe de l’image et du prestige de la France, mais peu d’entre-eux ne permette de se verser un salaire convenable. “C’est justement ce genre de salon qui permet de mettre en valeurs les artisans d’art”, souligne la Montpelliéraine, ajoutant : “J’ai toujours eu de petits revenus. Je m’arrange pour vivre de ça…” Les artisans d’art ont beaucoup de mal à vivre comme Dis-Leur vous l’a expliqué ICI. 

Rapport remarqué d’un député héraultais

Les métiers d’art sont plébiscités par le public qui vient en masse l’été visiter leurs ateliers. Un savoir-faire unique au monde avec des pépites comme les jeans Tuffery en Lozère ou la Forge de Laguiole. Mais la filière, mal organisée, délaissée, a du mal à subsister. C’est tout le sens d’un rapport remarqué du député LaRem de l’Hérault, Philippe Huppé, qui ne cesse de proposer au gouvernement ses solutions pour sortir de l’ornière.

Architecture et jardins ; ameublement et décoration ; luminaire ; bijouterie ; joaillerie ; orfèvrerie et horlogerie ; métal ; céramique; verre et cristal ; mode ; textile ; cuir ; spectacle ; jouets, etc. Les 281 métiers d’art et de patrimoine, selon la nomenclature officielle, sont les parents pauvres du génie français. La Région Occitanie leur a même versé une enveloppe de 200 000 euros. Et, vu l’urgence, le Premier ministre a missionné un député LaRem de l’Hérault, Philippe Huppé, jadis assistant de Georges Frêche, pour en faire un audit et proposer des solutions. Vingt-deux, pour être précis.

C’est aussi une “question de culture…”

Pierre Caruana dans son atelier d’ébénisterie. DR.

Ébéniste, Pierre Caruana ne dit pas autre chose. Adhérent à Ateliers d’art de France, l’Héraultais, vivant à Popian, à 40 km de Montpellier, met deux à trois mois pour fabriquer une pièce, buffet, bureau, etc., qu’il est “obligé de vendre entre 5 000 € et 15 000 €.Vivre de mon métier c’est plus que compliqué, dit-il. question revenus, c’est très difficile.” Pour lui, si à l’étranger, ses homologues vendent “plus facilement, c’est une “question de culture. Et puis il faut un bon réseau. Personnellement, je travaille beaucoup avec des galeries ; avec le particulier directement, c’est rare”. Quant à sa participation à cette biennale, “le seul salon auquel je participe ; c’est le meilleur”.

4 000 artisans d’art en Occitanie

On compte environ quatre mille artisans d’art en Occitanie. Les métiers d’art sont représentés à travers 281 activités, répertoriées dans seize domaines. “Dans la région, nous avons beaucoup de céramiques, verre, bijoux et du bois.” Fabienne Fabre, elle, a son atelier au Crès (Hérault). C’est la première fois qu’elle participe à Révélations. Elle dit : “J’y participe parce que vendre en France, contrairement à l’international, pour moi, c’est la misère… Je veux donc davantage me faire connaître dans l’Hexagone.” Encore une bonne raison de faire Révélations.

Olivier SCHLAMA

(1) Rozenn Alapetite, Eloïse Baro, Sophie Blanc, Pierre Caruana, Laura Demichelis, Fabienne Fabre, Sabine Fillit, Fabienne Laheurte, David Léger et Félic Valdelièvre.

À lire également sur Dis-Leur !

Carole Delga : “Votez pour le parti des produits d’Occitanie !”

Secteur fragilisé : Les métiers d’art veulent continuer à faire rêver

 

Patrimoine : “Les métiers d’excellence, l’âme de notre France, en danger !”

 

Métiers d’art : Comment sauver un savoir-faire unique au monde