Sollicitée pour une expertise par le ministère de la Santé, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) estime qu’il y a “des risques de saturation de la lutte ou de tension sanitaire” alors que le moustique tigre est désormais présent dans 78 départements de l’Hexagone et fortement ancré en Occitanie.
Dengue, chikungunya, zika… Le moustique tigre est désormais présent dans 78 départements de France hexagonale. Son implantation augmente le risque d’épidémie de ces trois maladies. Dans une expertise publiée le 13 septembre 2024, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) estime que la probabilité d’apparition de ces épidémies est assez élevée. Leur survenue pourrait avoir un impact sanitaire ainsi qu’économique et social, notamment sur les secteurs de la santé et du tourisme.
En 2023, une cinquantaine de cas autochtones de dengue ont été détectés, après un record de 66 cas en 2022. Jusqu’à présent, les cas autochtones ont été des foyers localisés, où il a toujours été possible de retracer l’origine des contaminations. Comme nous l’expliquions ICI, les cas de dengue sont en hausse en Occitanie, attention aux arnaques aux pièges et répulsifs…
les experts estiment qu’une épidémie d’arbovirose, tous virus confondus, a une probabilité comprise entre 6 et 7 sur une échelle de 0 à 9 de survenir dans les cinq prochaines années”
“Jusqu’à présent, explique l’expertise de l’Anses, les cas autochtones de virus transmis par le moustique tigre dans l’Hexagone ont été des foyers localisés, dans lesquels il a toujours été possible de retracer l’origine des contaminations. À l’heure actuelle, les experts estiment qu’une épidémie d’arbovirose, tous virus confondus, a une probabilité comprise entre 6 et 7 sur une échelle de 0 à 9 de survenir dans les cinq prochaines années.” Émeline Barrès, de la Direction d’évaluation des risques à l’Anses, l’une des deux coordonnatrices de l’expertise complète : “On parle d’épidémie à partir du moment où il n’est pas possible de relier toutes les personnes infectées à un foyer. Cela veut dire que les transmissions échappent au dispositif de contrôle.”
“Le système de santé serait en tension en cas d’épidémie majeure”
L’agence alerte aussi “sur les risques de saturation de la lutte ou de tension sanitaire”. Comme l’explique Véronique Raimond, économiste de la santé au sein de la direction sciences sociales, économie et société de l’Anses, l’autre coordinatrice de l’expertise. Les experts estiment que “le système de santé serait en tension en cas d’épidémie majeure, c’est-à-dire si de nombreux cas surviennent sur un territoire élargi. Il y a également un risque de saturation si cette épidémie coïncide avec une autre, comme cela a été le cas dans les Antilles en 2020, où une épidémie de dengue est survenue en même temps que celle de covid”.
Les cas de dengue et de chikungunya ont augmenté ces dernières années en France hexagonale : en 2022, il y a eu 66 cas de dengue autochtone, c’est-à-dire de personnes s’étant infectées localement, soit autant que le nombre total de cas autochtones durant les dix années précédentes. La dengue, comme le chikungunya ou le Zika, est une arbovirose, c’est-à-dire une maladie due à un virus transmis par des arthropodes vecteurs, ici des moustiques..
“La valorisation des expériences des départements et régions d’Outre-mer doit être renforcée”
L’Agence recommande donc d’adapter les moyens aux besoins de prévention, de surveillance et de contrôle des arboviroses. Elle préconise également la mise en place d’un plan interministériel de lutte contre ces maladies afin de mieux identifier et coordonner les acteurs impliqués, y compris la mobilisation de la population. “La valorisation des expériences des départements et régions d’Outre-mer doit être renforcée”. Les experts soulignent également l’importance de former les personnels de santé pour qu’ils connaissent les facteurs de risque et signaux d’alerte des formes graves d’arbovirose.
Beaucoup d’expériences sont menées, notamment le piégeage de masse. Ou le largage de moustiques stériles dans l’Hérault
“Vigilance pour que les populations les plus défavorisées”
les épidémies sont connues pour aggraver les inégalités sociales. En cas d’épidémie d’arbovirose, l’Anses appelle “les autorités à la vigilance pour que les populations les plus défavorisées aient accès aux informations, aux moyens de prévention et aux soins.” Et de conclure : “La présence du moustique tigre étant favorisée par le dérèglement climatique et l’augmentation des températures, la lutte contre les arboviroses doit s’inscrire dans une approche plus large de lutte contre les changements climatiques et autres changements globaux.”
Le moustique, tueur en masse
Plus largement, le Moustique, Ennemi Public N°1 ? Rien que le titre-question d’un livre discret mais puissant appelle la nuance un poil provocatrice en ces temps d’avanies. Certes, le moustique, qui est apparu il y a 270 millions d’année (!), est un tueur en série multi-millénaire, roi de l’adaptation, qui s’est toujours sorti des pires situations ; c’est un tueur en masse et il ne fait pas bon d’être dans son ombre tellement les maladies qu’il génère peuvent être de sacrés défis sur la planète ; certes, c’est aussi l’incarnation de la mondialisation et des maladies planétaires. Mais…
Paludisme : deux milliards d’êtres humains exposés
Paludisme – deux milliards d’êtres humains exposés avec 627 000 décès par an ! Et ce, alors que ces chiffres ont chuté de 21 % juste grâce à la pose de moustiquaires imprégnées de produits chimiques -, mais aussi chikungunya, dengue, zika, filarioses (vers parasites), arboviroses (virus)… Le moustique est à l’origine de véritables pandémies, poussé qu’il fut par “la perturbation des écosystèmes et l’intensification des échanges internationaux, accentués par les changements climatiques…” Mais… il a un rôle important dans la pollinisation et nourrit beaucoup d’espèces, par exemple ! Comme nous l’expliquions ICI.
Olivier SCHLAMA
À lire également sur Dis-Leur !
Cas de dengue en hausse : Évitez le moustique-tigre, les arnaques aux pièges et aux répulsifs
Première en France : 40 000 moustiques tigres stériles largués par drones !
Moustique : Ces stratégies d’avenir qui veulent faire mouche