Pyrénées : Prison avec sursis pour le chasseur ayant tué l’ourse Caramelles, la population d’ursidés croît toujours

L’avocat du prévenu, un Ariégeois, a fait appel. L’association pro-ours en appelle à “une prise de conscience”. Selon l’Office français de la biodiversité, une centaine d’individus ont été détectés en 2024 dans les Pyrénées.

Un chasseur, qui a été reconnu coupable par le tribunal de Foix, le 6 mai, d’avoir abattu l’ourse Caramelles, une femelle de 150 kilos, accompagnée de deux oursons, lors d’une battue illégale en Ariège, dans les Pyrénées, a écopé de quatre mois de prison avec sursis. Les quinze autres participants à la battue se sont vu retirer leur permis de chasser. L’ensemble des prévenus devront payer 60 000 € de dommages-intérêts aux associations de défense de l’ours qui s’étaient constituée partie civile. L’avocat des prévenus a fait appel de cette décision arguant que son client “n’avait fait que se défendre”. Une légitime défense, en somme.

“L’occasion d’une prise de conscience”

“Pays de l’Ours-Adet prend acte de la décision du tribunal correctionnel de Foix condamnant les chasseurs qui ont organisé et réalisé la battue ayant mené à la blessure d’un des chasseurs et à la mort de l’ourse Caramelles le 20 novembre 2021 à Seix (Ariège). Ce verdict nous semble justifié.” C’est par ces mots que réagit l’une des associations les plus actives dans le domaine de la réintégration de l’ours dans les Pyrénées.

“A l’issue, poursuit l’association pro-ours, d’une enquête approfondie et d’une audience qui a permis d’examiner les éléments en détails, le tribunal a reconnu les manquements et infractions attribuant aux prévenus une part de responsabilité dans les évènements survenus lors de cette battue.” Et : Nous souhaitons que cette décision soit l’occasion d’une prise de conscience locale des progrès à réaliser pour parvenir en Ariège à une cohabitation apaisée et respectueuse de chacun, à l’instar d’autres fédérations de chasse des Pyrénées.”

L’ours “poursuit son développement” dans les Pyrénées, avec une centaine d’individus détectés

Ours brun. Mai 2024. Ph Pays de l’Ours

En 2020 et 2021, quatre ours avaient été illégalement tués et n’ont pas été remplacés. Quatre mois de prison avec sursis ont récemment été requis contre un chasseur, poursuivi pour “destruction d’espèce protégée” après avoir accidentellement abattu l’ourse Caramelles, lors d’une battue au sanglier non autorisée, en 2021.

L’ours “poursuit son développement” dans les Pyrénées, avec une centaine d’individus détectés, mais la pérennité de l’espèce dans les Pyrénées ne serait pas garanti. Déjà, “on ne sait pas si l’année 2025 va continuer sur cette tendance”, souligne encore l’Office français de la biodiversité (OFB). La diminution de la diversité génétique, notamment, pourrait “altérer cette dynamique”. En détail, en 2024, “un minimum de 96 ours a été détecté sur l’ensemble du massif des Pyrénées, dont 13 portées totalisant 22 oursons de l’année”, détaillait le 3 avril l’OFB, qui coordonne en France le Réseau Ours brun et établit un bilan en collaboration avec les Espagnols et Andorrans. En 2023, ils étaient au moins 90 individus, selon le décompte établi avec différentes méthodes de suivi, comme l’analyse génétique d’échantillons de poils et de crottes.

“Capacité à résister à des maladies, au changement climatique, de nourriture ou à des événements extérieurs”

L’ours dans les Pyrénées. Photo OFB Réseau ours

La population d’ours poursuit ainsi un développement régulier avec un “taux d’accroissement moyen annuel entre 2006 et 2023”, estimé “à + 11 % pour l’ensemble des Pyrénées”, selon le rapport. Soit un rythme de doublement de la population tous les six ans. Mais sera-ce suffisant ? L’état de conservation d’une population se mesure par des éléments quantitatifs mais aussi qualitatifs, comme “sa capacité notamment à résister à des maladies, au changement climatique, à un changement de nourriture ou à des événements extérieurs”, explique-t-on. Ce qui ajoute de l’eau au moulin des associations de défense de l’ours à réclamer à l’Etat de nouveaux lâchers.

Dans les années 1990, alors que l’espèce était menacée et qu’il ne restait qu’une poignée de spécimens dans la chaîne montagneuse, une campagne de réintroduction d’ours bruns originaires de Slovénie avait été lancée. Mais éleveurs de bovins et d’ovins, soutenus par les politiques, se plaignent des prédations notamment durant la période estivale, quand le bétail se trouve dans les hauts pâturages. Le rapport de l’OFB dénombre 310 attaques d’ours sur le bétail et 14 attaques sur les ruchers en France l’an dernier, contre respectivement 349 et 7 en 2023.

Moins de sollicitations en 2024

L’aire de répartition de l’ours continue de progresser : elle est estimée à 7 200 kilomètres carrés, soit une augmentation de 100 kilomètres carrés par rapport à 2023 et de 1 500 kilomètres carréspar rapport à 2022. Cette extension de sa présence n’est pas forcément synonyme d’aggravation des tensions avec les éleveurs. À l’OFB, qui peut réaliser des tirs d’effarouchement, on constate que, “sur l’été 2024, on a eu moins de sollicitations d’interventions que sur les années précédentes”. Les moyens de protection ? Chiens, gardes, parcs de nuit électrifiés semble fonctionner.

Olivier SCHLAMA