Société : Travail, santé, logement… : Malgré les difficultés, les jeunes restent optimistes

Exercer un métier passion, être propriétaire de son logement, gagner de l’argent… Au lendemain de la Journée internationale de la jeunesse, le 12 août, les jeunes cherchent par ailleurs à s’épanouir mais leurs aspirations restent simples et concrètes, selon une enquête de la Fédération des Caisses d’épargne qui y associe le regard croisé des associations sur la jeunesse, ses difficultés et ses aspirations.

C’est la toute première étude du genre menée sur la jeunesse par la Fédération des caisses d’épargne (30 000 salariés) “à la faveur d’une nouvelle réorientation stratégique en 2022. Nous voulions apporter un complément d’analyse à nos activités classiques. C’est pour cela que nous avons mené cette étude en 2022 et 2023”, indique Aude Pringault, directrice de la prospective et de la stratégie.

Les jeunes à la fois optimistes et angoissés

Selon la conclusion de cette étude (1), les jeunes sont à la fois très optimistes et très… angoissés. “C’est ce qui est assez étonnant, confirme-t-elle : ils sont assez optimistes vis-à-vis de l’avenir parce qu’ils croient en leur capacité à agir. Cela donne de l’espoir. Et d’ailleurs on remarque que le taux d’engagement chez les jeunes est important : 68 % déclarent avoir un engagement associatif. C’est élevé par rapport à il y a dix ans.” On y apprend que la première cohabitation en couple s’établit à 22,5 ans pour une femme et 25 ans pour un homme ; que le départ du foyer parental se fait généralement vers 24 ans et que l’arrivée d’un premier enfant se déroule autour de 31 ans.

Deux fois et demi plus de risques d’être au chômage

Aude Pringault. DR.

L’Hexagone compte près de 12 millions de jeunes de 15 ans à 29 ans (17,54 % de la population totale début 2023 contre 23,6 % en 1982) avec un recul du chômage (16,9 % des moins de 25 ans à la recherche d’un emplois contre 20 % fin 2019). Mais, entre 1975 et 2020, le taux de chômage a été multiplié par 3,5 pour les 15-24 ans. Aujourd’hui, les jeunes actifs ont deux fois et demi plus de risques d’être au chômage que leurs aînés. Et un jeune sur deux, quand il occupe un poste, celui-ci est précaire.

“Réussir sa vie : avoir un métier-passion”

Second enseignement, c’est ce que les peuvent mettre derrière “réussir sa vie”. “Pour un jeune, c’est avoir un métier-passion, en premier lieu (57 %), avec cette idée d’épanouissement personnel au quotidien. Ce qui pose la question de savoir comment les entreprises peuvent, dans ces conditions, attirer des jeunes.” Ensuite, dernière cette vision, les jeunes sont “happés très vite par la volonté d’être propriétaire de son logement. Ils sont rattrapés par des préoccupations matérialistes, finalement pas en décalage avec la génération de leurs parents. Ils ont une conception de la vie classique”.

L’étude livre cette analyse : “Il ne s’agit pas tant de travailler dans une entreprise engagée (cet item n’est plébiscité que par 29 % des interrogés) que de pouvoir exercer leur activité dans un cadre qui reconnaisse leur engagement personnel et leur assure une autonomie de décision.”

Le logement, “obstacle pour la jeunesse”

Sur le logement, l’étude pointe évidemment que c’est “un obstacle pour la jeunesse” : c’est le “premier poste de dépense (…) difficile à assumer” alors qu’un jeune sur cinq entre 18 ans et 29 ans vit en-dessous du seuil de pauvreté. Et à cause des exigences du marché du travail, 10 % des jeunes de moins de 30 ans changent de lieu de vie chaque année.

Les jeunes cherchent à s’épanouir mais leurs aspirations restent simples et concrètes

Conclusion, c’est une “jeunesse de paradoxe” avec “un décalage grandissant entre les besoins exprimés par les jeunes et l’offre d’accompagnement des associations. Santé mentale, logement… Confrontés à des difficultés nouvelles et plus fragilisés qu’avant, les jeunes sont malgré tout plus optimistes qu’on ne le pense”. Par ailleurs, l’offre d’accompagnement est insuffisante pour faire face aux nouvelles difficultés, sans oublier que les assos disent avoir plus de mal à les rencontrer. Enfin, exercer un métier passion, être propriétaire de son logement, gagner de l’argent… Les jeunes cherchent à s’épanouir mais leurs aspirations restent simples et concrètes.

Se faire plaisir, les voyages, donner de l’argent à la famille en tête du point de vue des associations

Réussir sa vie c’est aussi, pour la jeunesse du pays sondée, gagner de l’argent pour se faire plaisir et les voyages (53 %) ; avoir la capacité de donner de l’argent à sa famille, d’aider financièrement les autres (49 %) ; ou encore se projeter dans une vie de couple stable (47 %). Pour les associations, ce top 5 est un peu différent. Les responsables associatifs disent que réussir sa vie pour les jeunes d’aujourd’hui c’est d’abord gagner de l’argent (46 %) ; avoir un métier passion (41 %) ; réussir à faire passer sa vie personnelle avant son travail (34 %) ; découvrir d’autres régions en France ou dans le monde (25 %) et être son propre patron (19 %) !

Résultats en Occitanie identiques qu’au niveau national

Et en Occitanie ? “Les résultats de cette étude Midi-Pyrénées et en Languedoc-Roussillon sont très en phase avec ceux de l’étude nationale. Mais cela peut être différent dans d’autres régions où le métier-passion n’arrive pas forcément en tête.” En Midi-Pyrénées, la population jeune “est quasiment égale en proportion à la moyenne nationale ; c’est moins le cas en Languedoc où, là, il y a moins de jeunes avec une pointe cependant dans l’Hérault avec 18,8 % de jeunes, effet sans doute d’une métropolisation.” Il y a quand même un déclin de la population jeunes depuis 1999. Et pourtant selon les projections, la France fera partie des pays les plus jeunes d’Europe en 2050.

Cette étude intervient moins de six mois après le lancement du plan régional pour “les jeunesses, élaboré par les jeunes” avec des mesures originales qui n’existent pour certaines qu’en Occitanie, comme la faible tarification jusqu’à la gratuité des transports ; la prise en compte de la précarité alimentaire ou la mise en place de médiateurs dans les lycées contre le harcèlement et le racisme. Comme Dis-Leur vous l’a expliqué ICI. Et alors que la jeunesse se radicalise à l’ombre des écrans d’ordinateurs.

“Mieux accompagner la jeunesse notamment par la philanthropie”

Pourquoi une étude de plus alors qu’il en existe pléthore ? Est-ce juste pour mieux savoir comment la Fédération des caisses d’épargne va-t-elle flécher des aides aux associations ? Sans doute aussi avec de visées mercantiles. “Des études sur la jeunesse, il y en a beaucoup, c’est vrai. Mais des études où l’on écoute vraiment les jeunes, il y en a peu. Il y a aussi un regard croisé des associations sur la jeunesse sur ses difficultés et ses aspirations.”

Est-ce mieux cerner les jeunes pour leur proposer des produits bancaires par la suite…? “Ce n’est pas du tout la finalité de notre Fédération de faire des études à portée commerciale. Notre métier, c’est d’accompagner les Caisses d’épargne à développer leur modèle coopératif. Cette étude va probablement aider les Caisses à mieux accompagner la jeunesse notamment par la philanthropie. Et en soutien aux associations. Et comme c’est une étude sociétale, elle va nous permettre de comprendre comment faire pour que les jeunes soient plus attirés par notre modèle coopératif qui n’est pas suffisamment connu du grand public.” D’améliorer in fine l’image de la banque.

Olivier SCHLAMA

  • (1) L’étude de la FNCE Regards croisés sur la jeunesse a été réalisée avec le soutien de l’institut Audirep. Objectif recherché ? Être à l’écoute de la jeunesse pour identifier et comprendre ses besoins, ses attentes, ses difficultés… et ainsi être en mesure de lui apporter des solutions adaptées. Pour obtenir une vision d’ensemble, 1 604 jeunes âgés de 18 à 29 ans ont été interrogés via un questionnaire en ligne et des entretiens ont été réalisés auprès de 116 dirigeants d’associations.