Ce n’est pas tous les jours qu’une librairie ouvre ses portes. Ce sera le cas en juin à Montpellier avec Fiers de Lettres, un lieu spécialisé dans l’économie sociale et solidaire, une première dans la région. Derrière les rayons, Chloé Bellue et Wissam Mimouni impatientes de prodiguer leurs conseils. Les deux associées y proposeront un fonds de 5 000 références sur les alternatives durables, la solidarité, l’écologie, l’environnement, l’innovation sociale… Une initiative rare.
Fiers de lettres : c’est le joli nom d’une librairie pas comme les autres qui s’assume et qui ouvrira en juin à Montpellier, rue du Bras de Fer, dans l’Écusson. Ce ne sera pas qu’une librairie indépendante parmi les 258 existantes en Occitanie. Certes, le secteur de la librairie représente 452 emplois, non délocalisables dans la région. Ce secteur apporte selon une étude de la Drac et l’association Occitanie Livre et Lecture, une émanation de la région Occitanie un chiffre d’affaires annuel de 81,6 millions d’euros mais dont plus de la moitié est amenée par les mastodontes du secteur. Pour autant, il y a de la place pour une librairie spécialisée.
Nous offrirons un fonds de 5 000 références sur les alternatives durables, la solidarité, l’écologie, l’environnement, l’innovation sociale et, évidemment, l’ESS. De façon plus générale, nous proposerons des ouvrages ayant un rapport avec des réflexions sur la transition pour une société plus durable.”
Chloé Bellue et Wissam Mimouni, créatrices de la librairie
Place sera faite, dans cette librairie engagée, aux grands penseurs de la société : “Pierre Rabhi, Joseph Stiglitz, Vandana Shiva et bien d’autres. Mais aussi des tonnes de fictions, d’essais, d’albums jeunesse et de BD pour mieux comprendre le monde d’aujourd’hui et construire ensemble le monde de demain”. Fiers de Lettres cultive une différence unique dans la région. “Nous avons voulu créer une librairie spécialisée à taille humaine. Elle fait 60 m2 sur deux niveaux où l’on distillera conseils avisés”, confie Chloé Bellue, l’une des deux cofondatrices avec Wissam Mimouni, 34 ans, originaire de Grenoble. Toutes deux comptent également sur la dynamique de quartier, où s’épanouissent plusieurs commerces indépendants comme une épicerie bio avec des produits locaux de saison. “Nous offrirons un fonds de 5 000 références sur les alternatives durables, la solidarité, l’écologie, l’environnement, l’innovation sociale et, évidemment, l’ESS. De façon plus générale, nous proposerons des ouvrages ayant un rapport avec des réflexions sur la transition pour une société plus durable.”
Amazon a pris des parts de marché ; certes, il y a les liseuses, mais que les chiffres d’affaires des librairies sont stables.”
Chloé Bellue, l’une des fondatrices de la librairie
Le lieu s’adresse “autant aux adultes, qu’aux jeunes…” Et proposera aussi BD et romans, entre autres. “Quand on regarde les chiffres de la profession, on se rend compte que, certes, Amazon a pris des parts de marché ; certes, il y a les liseuses, mais que les chiffres d’affaires sont stables : la librairie reste le lieu principal où l’on achète un livre. Les gens viennent y chercher un conseil et puis il y a un lien affectif avec l’objet”, souligne Chloé Bellue, 36 ans, de Bordeaux, passée par Paris, qui vient de s’installer à Montpellier, après avoir bossé pour l’Avise, l’agence d’ingénierie pour développer l’Économie sociale et solidaire au niveau national, à Paris.
Fiers de lettres, c’est aussi fières de l’être… Ces deux libraires en herbe ont créé leur commerce en toute connaissance de cause : elles maîtrisent leur sujet et elles ont mené une étude de marché qui les conforte dans leur idée de départ. “Au-delà de la ville de Montpellier, terrain propice au développement de l’ESS où cet écosystème est fort, les Montpelliérains se disent à majorité avides d’un lieu comme le nôtre où il y aura classiquement des dédicaces d’auteurs, des temps de rencontres, des ateliers pratiques, etc. Les Montpelliérains voient positivement la création d’une librairie grand public sur ce thème.” Pour aller mieux “chercher” le chaland, conscientes que le livre seul en tout cas au début de l’aventure ne suffira pas forcément, les deux associées ont eu l’idée d’ajouter un salon de thé.” Une proposition cohérente.
L’emplacement de la librairie n’est pas dû au hasard : celle-ci ouvrira rue du Bras de Fer, au coeur d’un agréable entrelacs de rues piétonnes. Son but : aider le lecteur à trouver son chemin dans l’un des sujets à la mode, à juste titre : l’économie sociale et solidaire (ESS), un secteur qui représente 12 % de l’emploi salarié en Occitanie. Et sur lequel le nouveau Haut Commissaire fonde de grands espoirs (à lire ICI : https://dis-leur.fr/haut-commissaire-a-less-mets-leconomie-sociale-meme-rang-gastronomie-luxe/)
Dans ma famille, lire a une place importante. Le livre est perçu comme symbole d’engagement.”
Wissam Mimouni
Jusque-là consultante sur les questions d’organisation et de management dans le secteur industriel, Wissam Mimouni, 34 ans, de Grenoble, est installée depuis un an à Montpellier. “Rien à voir avec les livres !” C’est sa culture familiale, l’envie de transmettre et d’entreprendre qui l’a amenée à ce projet. “Dans ma famille, lire a une place importante. Le livre est perçu comme symbole d’engagement. Personnellement, j’ai été bénévole dans des associations et passionnée de développement durable.”
Wissam et Chloé ont quasiment bouclé leur budget de 130 000 euros pour ouvrir qu’elles ont bien sûr abondé de leurs fonds propres, de différents prêts et aides mais aussi avec une opération de crownfunding qui a déjà rapporté 6000 euros sur Tudigo.
Olivier SCHLAMA
Trois à quatre créations ou reprises par an
Selon l’association Occitanie Livre et lecture, “il est difficile d’établir une tendance générale sure la santé du secteur des librairies, pour deux raisons. La première est que nous avons réuni les données des deux ex-régions depuis la création d’Occitanie Livre & Lecture, c’est-à-dire quatre mois, ce qui est peu pour avoir une vision globale pertinente. La deuxième raison est que la situation est très différente entre les métropoles, les villes moyennes et les territoires ruraux”.
Toujours selon Livre et Lecture, on compte trois ou quatre créations ou reprises par an et ce, plutôt dans les métropoles. En voici la liste pour 2017 et 2018 :
- Librairie ambulante Libre cours à Toulouse ;
- Librairie Spécialisée L’Ouïe Lire à Toulouse
- Librairie Fiers de lettres à Montpellier
- Librairie Biffures à Toulouse ;
- Café-Librairie Le Kairn à Arras en Lavedan (Hautes-Pyrénées) ;
- Café-Librairie Le relais de poche à Verniolles (Ariège) ;
- Librairie La Géosphère à Montpellier
- Le Livre voyageur à Narbonne
Des dispositifs d’aides à la librairie sont proposés dans le cadre du contrat de filière Livre entre le Centre National du Livre, la Région Occitanie / Pyrénées-Méditerranée, la DRAC Occitanie et Occitanie Livre & Lecture.
http://www.lr2l.fr/actualites/aides-la-librairie-2018.html
D’autres financements existent par exemple pour les librairies des villes moyennes, les aides au commerce de proximité : http://www.cget.gouv.fr/actualites/222-villes-moyennes-soutenues-pour-redynamiser-leurs-centres-villes soit 24 villes d’Occitanie concernées.