La cavité de L’Herm ouvre bientôt : L’Occitanie, région riche de grottes remarquables

La grotte de l'Herm. Ph.DR.

Pas encore de road trip pour aller scruter ces entrailles fascinantes selon un circuit touristique mais si vous avez un penchant pour ces pièces merveilleuses avec une atmosphère à chaque fois singulière et unique, vous avez le choix parmi la quarantaine d’avens, anfractuosités et autres gouffres ! Ainsi que la grotte préhistorique de l’Herm, la dernière à être bientôt aménagée.

De grottes en grottes. En Ariège, il y a plusieurs grottes intéressantes comme celle de Niaux, dans la vallée de Vicdessos, face à la grotte de la Vache, à Alliat. Ornée du paléolithique supérieur, qui fait partie du réseau de grottes de la chaîne pyrénéo-cantabrique, c’est l’une des dernière où l’on peut contempler des peintures de l’homme de Cro-magnon, vieilles de 15 000 ans… Elle ne se visite que par petits groupes pour préserver ce trésor. Il y aura bientôt celle de l’Herm, toujours en Ariège. Près de l’aire naturelle la Clairière, elle présente quelque fascination.

Repaire d’ours, lions et hyènes…

Grotte de l’Herm, en Ariège, DR.

Dans ce repaire jadis d’ours, de lions et de hyènes (!), on a trouvé des ossements humains, “une centaine environ, précise Claude Ridoire, son propriétaire depuis six ans (elle fait partie d’un ensemble avec forêt, ruisseau, moulin) qui va l’ouvrir – un peu – au public, d’ici l’année prochaine (2). “Pas mal de restes sont exposés au muséum de Toulouse, à ceux de Paris ou Stockholm. Cette grotte est aussi pillée de façon permanente ; c’est pour cela que, dans un premier temps, j’ai voulu la fermer, avec l’aide de plusieurs services de l’Etat et grâce à une subvention”, soupire-t-il.

“Sans que ça devienne un site touristique…”

L‘Ana-Conservatoire d’espaces naturels-Ariège, qui a signé une convention de gestion avec le propriétaire, a tenu à apporter sa vision précise du projet d’ouverture de la grotte de l’Herm. Une convention “afin d’encadrer la réalisation des aménagements et de mettre en place des actions liées à la recherche et à l’éducation à l’environnement”, dit Thomas Cuypers, chargé de mission (…) “La visite de la grotte est déjà possible en s’appuyant sur les clubs spéléologiques. Des visites ont été faites pour les enfants de l’Herm plus tôt ce printemps par exemple. On souhaite élargir ce genre d’initiatives aux élus et habitants de quelques communes voisines sans que ça devienne un site touristique étant donné son extrême sensibilité.”

Protéger 5 000 chauves-souris dans leur reproduction

Claude Ridoire est sur le point de conclure avec un prestataire pour créer une vraie muséographie et organiser donc des visites par très petits groupes “soit d’ici septembre soit début 2023”, confie-t-il. “De toute façon, on ne pourra le faire que dans de courtes périodes : la seconde quinzaine de mars et en septembre. À cause d’un arrêté de biotope, pris en 1996, visant à protéger ces chauves-souris, évaluées à quelque 5 000 individus, dans leur période de reproduction.”

“Grotte au potentiel incroyable…”

Christine Téqui visite la grotte de L’Herm. DR

Présidente du département de l’Ariège, Christine Téqui, juge qu’elle “fait partie des grottes au potentiel incroyable pour continuer à raconter notre histoire”. À 650 mètres d’altitude, elle s’ouvre dans le massif calcaire du Plantaurel sur la commune de l’Herm la grotte du même nom datant du Jurassique en direction et limite de Pradières. De vastes galeries et salles, creusées par d’anciens écoulements hydrauliques, se succèdent. L’entrée principale est large et murée en partie, une entrée secondaire et artificielle à aussi été aménagée en partie supérieure.

Insecte endémique, l’abeille de Perrin

On a aussi trouvé dans cette grotte de l’Herm, exploitée jadis comme carrière à phosphates pour amender les terres agricoles, un insecte endémique, l’abeille de Perrin (1). Fouillée pour la première fois sérieusement depuis 1870. Elle est grande : plus de 1,5 kilomètre de long avec des salles de plus de trente mètres de haut et quarante mètres de large. Il faut bien une journée pour tout visiter. C‘est aussi la première grotte à chauve-souris du département. Il reste encore beaucoup d’ossements. “C’est pour cela qu’il faut faire avec les scientifiques un état zéro de ce qu’elle contient”. Thomas Cuypers, chargé de mission à l’Ana-Cern ajoute : “La grotte abrite quelques espèces endémiques de l’Ariège. Dans la grotte, il existe des sous-espèces qui ne se retrouve que dans le réseau karstique de la grotte. Par exemple : Speonomus longicornis hermensis.” Autrement dit… l’abeille de Perrin

Quantité impressionnantes d’ossements fossiles

“L’existence de cette grotte et son intérêt paléontologique sont signalés pour la première fois en 1855 dans le journal l’Ariegeois, explique Claude Ridoire. L’auteur est un médecin naturaliste des Cabannes, le docteur Alzieu. Il mentionnera que la grotte est connue scientifiquement par l’abbé Pouech de Pamiers qui publiera à la Société géologique de France par la suite le résultat de ses recherches, en 1862. Dès lors, le Muséum d’histoire naturelle de Toulouse, fraîchement institué, présentera au public les découvertes de la grotte de l’Herm”, dit-ilUne quantité impressionnante d’ossements fossiles y est recueillie, composée de crânes, mandibules et squelettes complets d’ours des cavernes en majorité avec aussi des restes de hyènes, de panthères des cavernes, de loups, de gloutons, d’ours bruns et de Lions des cavernes…

L’ours, animal emblématique des cavernes

D’autres fouilles suivront en cette fin de ce 19e siècle dont celles, notables, de Gustave Marty. C’est ainsi que le Muséum de Toulouse est riche des résultats de ces fouilles mais aussi celui de Paris, Lyon, Bâle, Bergen, Londres, Florence… Plus proche, le château de Foix dispose d’un squelette d’ours des cavernes, l’animal emblématique de la préhistoire locale. Dans la grotte de l’Herm il aurait été omniprésent quels que soient les secteurs ou niveaux de la cavité, plus d’une centaine de sujets adultes ont étés extraits et étudiés. Vient ensuite le grand félin des cavernes (panthera spelaea) dont la population ici est estimée en seconde place pour l’Europe, après Équi en Italie.

Compétition entre l’homme et l’animal

Si la grotte de l’Herm représente un gisement paléontologique de premier plan, tant à l’échelle nationale qu’internationale il existe un débat sur la relation homme-animal. Des restes humains de 20 à 30 individus ont été dénombrés. Une interprétation avance que la cavité aurait servie de grotte sépulcrale vers la fin de la préhistoire ; une autre avance une certaine compétition d’habitat entre l’homme et l’animal ! Quelques outils de la préhistoire y sont aussi retrouvés.

Des grottes réparties dans toute la région

Grotte du Mas d’Azil ©D VIET CRTL Occitanie

Dans notre région, il y a de nombreuses grottes et gouffres (Lire ICI), la grotte des Demoiselles ; celle de Clamouse, à Saint-Jean-de-Fos (Hérault) ; la grotte de Labouiche ICI, parcourue par la rivière souterraine navigable la plus longue d’Europe (1 500 mètres) ; 125 millions d’années ont été nécessaire pour façonner la grotte de Lombrives ; la fissure de l’abîme de Bramabiau mesure 70 mètres de haut. Il y a encore la grotte de Trabuc bien protégée avec 100 000 mystérieux soldats, concrétions uniques au monde.

Il y a encore le gouffre de Padirac qui renferme une stalactite de 60 mètres. Celui dont on a fêté les 130 ans d’ouverture au public en 2019 est le site souterrain le plus visité d’Europe (et le 3e site le plus visité d’Occitanie parmi les sites faisant l’objet d’une billetterie). Et la petite dernière en date, la grotte de la Salamandre, dont Dis-Leur vous a parlé, proposant une descente en rappel de 50 mètres. On peut aussi évoquer la seule grotte d’Europe que l’on peut traverser en voiture, celle du Mas d’Azil.

Plus importante collection de cavités souterraines

Le Comité régional du tourisme (CRT) souligne que l’Occitanie, avec ses nombreuses zones calcaires (Causses du Quercy dans le Lot, Causses de Lozère, du Gard, de l’Hérault ou de l’Aveyron, Pyrénées…) “offre à la France sa plus importante collection de cavités souterraines : une quarantaine de grottes et gouffres aménagés et des centaines qui sont accessibles avec un encadrement dans le cadre d’un “safari spéléo”. Soulignons la présence du “balcon de verre” : un prouesse technique mondiale au gouffre de Cabrespine (Aude)”.

Que des grottes originales, pas de fac-similés en Occitanie

Grotte des Demoiselles© Rémi Flament

En Occitanie, on a la chance de pouvoir encore visiter les originaux, et non les fac-similés des grottes ornées” comme c’est le cas à Lascaux (Dordogne), Chauvet (Ardèche) ou bientôt à Marseille pour la grotte Cosquer. Ainsi, la grotte du Pech Merle à Cabrerets (Lot) ou la grotte de Niaux (Ariège), “garantissent une émotion intacte à la vue des fresques pariétales que l’on peut y admirer dans un état de conservation exceptionnelle. Ces grottes sont soumises à des quotas de visiteurs journaliers garantissant la non-altération des peintures”.

Concurrence rude entre sites

Toujours selon le CRT, “les grottes ont tout intérêt à se diversifier pour attirer de nouveaux publics sur de plus larges amplitudes saisonnières. La concurrence entre sites est rude et pour se démarquer de la classique visite guidée, certaines ont bien compris qu’il fallait voir plus grand avec des propositions d’activités génératrices d’expériences à vivre toujours plus insolites ; le tout, dans le respect de l’environnement et en tenant particulièrement en compte la fragilité du milieu souterrain”.

Une quarantaine de grottes et cavités sont ouvertes au public (Lire ci-dessous). Quelles expériences insolites y vivre ? Nuit sous terre (sous une pyramide transparente, en bivouac), safaris spéléos, rivières souterraines, accro-grotte, passerelles de verre, visite à la lueur des bougies, concerts souterrains, escape-games… (À lire ci-dessous). On peut même réaliser un safari souterrain avec des spéléologues avertis en dehors des sites aménagés : plus de renseignements auprès du Comité spéléologique régional d’Occitanie.

Olivier SCHLAMA

👉 Pour tout renseignement, vous pouvez consulter le site du CRT ICI.

  • (1) La grotte de l’Herm ou Caverne de Monlaur possède une responsabilité internationale pour la conservation des chiroptères (chauves-souris). Elle en abrite d’importants effectifs toute l’année, en hiver comme en période de reproduction. D’autres espèces comme le Petit Murin, le Grand Murin ou le Grand Rhinolophe viennent ajouter des enjeux conséquents de préservation.
  • Cette population de chiroptères a subi une forte diminution depuis trois ans avec des mortalités inexpliquées. Au dernier comptage, en 2021, ce sont environ 5 000 adultes comptabilisés avec une bonne reproduction. Ces effectifs se situent dans une moyenne basse mais loin de la situation alarmante de ces dernières années.
  • Une espèce dite Abeille de Perrin découverte en 1873 est endémique de la grotte de l’Herm. Elle a été baptisée comme il se doit Hermensis. Un entomologiste professionnel réputé en visite dans la grotte m’en a fait une description avec :une longueur inférieure à 5 millimètres, coloris orangé et sans yeux. Lui-même ne l’a jamais vu et elle n’aurait jamais été photographiée !

Pour les fans de peinture rupestre

S’émouvoir devant les fresques de nos ancêtres de la préhistoire en découvrant leurs talents artistiques à la grotte de Gargas (Hautes-Pyrénées), le sanctuaire des mains (mains peintes en pochoir) ; à la grotte de Niaux (Ariège), mondialement réputée pour son Salon Noir riche de 80 peintures animales ou celle de la grotte du Pech-Merle, à Cabrerets (Lot), dont la célébrité réside dans sa spectaculaire fresque de chevaux ponctués.

Grotte du Pech Merle©R_Flament

On fête son centenaire en 2022 qui révèle la présence de mammouths en terre quercynoise et il y a de cela quelques milliers d’années ! Avec l’art pariétal expliqué aux enfants : ateliers peintures murales au Parc de la préhistoire de Tarascon-sur-Ariège mais aussi une visite à la torche comme aux temps des explorateurs à la grotte de Niaux : le moment fort de la visite. On éteint la lampe et on écoute le “silence des ténèbres” puis on rallume, le guide nous demande de nous retourner et on découvre, stupéfait, les fresques du Salon Noir…

Pour le travail de l’eau et les formations géologiques

La grotte de Dargilan (Lozère) dite La grotte rose pour sa draperie unique au monde (2000m2) ; la grotte de la Cocalière (Gard) pour ses perles des cavernes. les coulisses de cette dernière lors d’une escapade d’une demi-journée voire d’une journée permettant d’accéder aux parties non aménagées. Le CRT rappelle la possibilité d’une nuit sous terre sous une pyramide transparente. Il y a, bien sûr, la grotte de Clamouse à Saint-Jean-de-Fos (Hérault) pour ses très rares cristaux d’aragonite excentriques, avec un Spéléopark (accrobranche souterrain) et même un Escape game grandeur nature.

Gouffres de Cabrespine, Padirac…

Gouffre de Padirac_La Salle du Grand Dôme©L.NESPOULOUS-SES de Padirac

Le gouffre géant de Cabrespine (Aude) pour ses dimensions hors normes (250 m de profondeur) que l’on apprécie notamment depuis une impressionnante passerelle transparente unique au monde, suspendue dans le vide. Avec une accro-grotte (ponts de singe et tyrolienne). Et sur la trace des premiers explorateurs en canoë gonflable sur la rivière souterraine. Signalons aussi le gouffre de Padirac (Lot) pour sa balade en barque sur une rivière souterraine mémorable. Avec la cuvée des 130 ans : à déguster dès l’été 2022 et des soirées explorateurs en barque à la lueur des lanternes… A noter le samedi 30 avril et dimanche 1er mai 2022 Démonstration de Slack Line (et initiation).

Naviguer sur une… rivière souterraine

Outre Padirac, il est également possible de voguer sur les eaux calmes d’une rivière souterraine à Labouiche (Ariège), aux grottes de Médous (Hautes-Pyrénées) ou à la grotte de Bétharram (Hautes-Pyrénées), mais aussi la grotte de Bédeilhac (Ariège).

L’Occitanie, terre de grottes :

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