En Occitanie, plus de 500 opérations de recherche archéologique sont autorisées chaque année. Les nombreux sites, musées de et centres d’interprétation dédiés à l’archéologie, présents sur tout le territoire, confirment la richesse exceptionnelle du patrimoine régional.
Parmi les lieux les plus emblématiques de ce patrimoine archéologique on retrouve notamment le Musée Henri-Prades adossé au site archéologique de Lattara à Lattes (Hérault), le Clos de la Lombarde et le Narbo Via à Narbonne (Aude), le Musée de l’Ephèbe à Agde (Hérault), l’Amphithéâtre et le Musée de la Romanité à Nîmes (et sa Maison Carrée), ainsi que le Pont du Gard (Gard), la Cité des Gabales à Javols (Lot), le Musée Saint-Raymond à Toulouse (Haute-Garonne), le Musée Fenaille à Rodez (Aveyron), le Musée de Tautavel (Pyrénées-Orientales)… Focus aujourd’hui sur un chantier-école situé près d’Elne en Pays Catalan…
Un village médieval sur le site d’une villa gallo-romaine
Installé en bordure de la voie domitienne qui relie Rome au sud de l’Espagne, le site de Palol d’Avall est occupé de façon continue du IVe siècle de notre ère jusqu’au XIIIe siècle. En 1967, des sondages réalisés sur la partie sud du site ont permis de mettre au jour le plan partiel d’une villa gallo-romaine constituée d’au moins huit pièces. La découverte d’un chapiteau et d’un fragment d’une table d’autel du VIe siècle laisse supposer la présence toute proche d’une église paléochrétienne.
À partir des Xe-XIe siècles, un village médiéval se structure autour de l’église Sainte-Marie. Ce dernier est fortifié avec le creusement, dès le XIIe siècle, d’un fossé. La désertion du village semble intervenir dans le courant du XIIIe siècle tandis que l’église, encore en élévation au XIXe siècle, est rasée au début du siècle suivant.
Un site bien conservé et des centaines de tombes
Ce site, majeur en Roussillon, pourrait correspondre à la station-relais d’Ad Stabulum installée le long de la voie domitienne et mentionnée par les auteurs antiques. En collaboration avec la Direction Régionale des Affaires Culturelles Occitanie, des sondages de reconnaissance ont été réalisés en mars 2023 par le service archéologique du département. Ils ont mis en lumière un site bien conservé, avec les vestiges d’une église, d’un cimetière riche d’environ 700 tombes et d’un village ceinturé par un fossé, “installé probablement sur ou en bordure d’une grande villa d’époque romaine.”
La stratigraphie (ou empilement des couches) est remarquable et atteint par endroits 2 m d’épaisseur. Cette accumulation de vestiges est rarement observée en contexte rural.
Une vingtaine d’étudiants venus de toute la France
Cette fouille archéologique est aussi un chantier-école destiné à la formation des étudiants à l’archéologie et à la préservation du patrimoine. Elle s’inscrit dans le cadre d’une convention qui lie le Département des PyrénéesOrientales et le laboratoire du CRESEM de l’Université de Perpignan Via Domitia afin de favoriser l’accueil des
étudiants et leur apporter une formation pratique. Elle complète ainsi la fouille de la Cauna de l’Arago à Tautavel, consacrée à la Préhistoire ancienne, en axant la formation sur les périodes historiques : la période romaine et médiévale.
Durant cette première campagne de l’été 2024, le chantier-école accueille 21 étudiants, de l’université de Perpignan mais aussi des universités de Montpellier, Toulouse, Paris et Bordeaux. Les étudiants sont encadrés par six archéologues
professionnels du département et participent à toutes les activités de la fouille : fouille de maisons, de tombes, traitement du matériel mis au jour (*).
Ce site récemment mis en lumière est symbolique de l’incroyable richesse du patrimoine archéologique de la Région Occitanie, et couvrant toutes les périodes de l’histoire. Le chantier va s’inscrire dans la durée et est appelé à durer de nombreuses années avec tous les ans une campagne de fouille organisée au mois de juillet.
Philippe MOURET
(*) Cette année, la fouille a permis de dégager les fondations de l’église Sainte-Marie. Il s’agit d’un édifice roman à deux nefs, de grande taille. Au centre de la nef, se trouve un bâtiment qui intrigue les archéologues. Il pourrait s’agir soit d’une d’une église plus ancienne soit d’un bâtiment romain englobé lors de la construction de l’église. Sa fouille s’annonce passionnante mais n’interviendra que l’année prochaine. Autour de l’église se déploie un important cimetière, estimé entre 400 et 700 tombes, bien conservées et dont la fouille devrait apporter des informations sur les modes de vie et les pratiques funéraires d’une population médiévale roussillonnaise.
Fouilles à Cadayrac, en Aveyron…
Autour de l’archéologue Martine Joly, des fouilles sont réalisées sur un site gallo-romain majeur, à Cadayrac.
“Le chantier de fouilles se trouve dans l’Aveyron, près de Rodez à Cadayrac. L’occupation humaine y est importante depuis la Préhistoire, de nombreux dolmens et tumulus ont été repérés dans le secteur, néanmoins ce sont les vestiges d’occupation antique qui intéressent Martine. Le site est connu depuis le XIXe siècle. En effet, la première mention de découvertes archéologiques sur le site de Cadayrac remonte à 1863, elle est due à l’Abbé Paulin François Cérès. Ce dernier identifia deux édifices particuliers, un temple et un théâtre, ainsi que les restes d’un autre bâtiment” explique le site de l’association Grottes&Archéologies dans le cadre d’un portrait de Martine Joly qui en dirige les fouilles : https://grottesarcheologies.com/2022/04/21/martine-joly-et-son-chantier-a-cadayrac/
… et aussi dans le Gard
Depuis fin janvier 2024, une équipe d’archéologues de l’Inrap explore, sur prescription de l’État (Drac Occitanie), des parcelles situées le long de la rue de Beaucaire, qui reprend le tracé de l’antique voie Domitienne, à environ 640 m de l’enceinte et de la Porte d’Auguste.
Durant l’époque romaine, la voie Domitienne constituait l’un des principaux accès à Nîmes et pénétrait dans l’agglomération par la porte d’Auguste. Un axe routier bien connu qui reliait l’Espagne à l’Italie. Mais ce nouveau site archéologique de la rue de Beaucaire a révélé l’existence d’une deuxième et importante voie, mesurant 15 mètres de large, qui s’oriente vers Grézan et donc dans une direction distincte de la voie Domitienne.
“Des implantations funéraires, datant entre les IIe et Ier siècle avant J.-C. et le courant du IIe siècle après J.-C., s’échelonnent aux abords de cette voie et de la voie Domitienne. Elles soulignent la vocation funéraire de ce secteur péri-urbain dans l’Antiquité et du caractère attractif de ces deux axes de circulation” précise le site de la Ville de Nîmes VivreNîmes.fr.
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