Juriste, ex-universitaire à Toulouse, conseiller régional, Serge Regourd préside Occitanie Livre et Lecture et la commission culture au conseil régional. Il publie le troisième tome de la passionnante Anthologie des Acteurs et des Actrices du Cinéma français et de la TV. Par une volonté d’égalité, les stars y côtoient, avec la même place dévolue, les interprètes moins connus. Pas moins de 1 170 mini-portraits à déguster !

Tous à égalité ! L’immarcescible Pierre Vaneck ; l’indépassable (carrière de) Charles Vanel ; celle, incroyable, de Dominique Zardi, le roi des “3e couteaux”…! ;  Jean Le Poulain ; Jacques Seiler (le colérique et borné Bidasses en Folie) ou encore l’indépassable – tout court – Michel Simon, l’acteur qui eut l’une des plus extraordinaires carrières de l’histoire… Eh bien, ils y sont tous, sans préférence, sinon la… vôtre !

Une anthologie que “j’aurais aimé lire à mes 12 ans”

C’est une bible. Renfermant 1 170 mini-portraits de tous les acteurs remarquables, petits, grands ou stars, le tome 3 de l’Anthologie des acteurs et actrices du cinéma français et de la télévision (1) de Serge Regourd se déguste avec gourmandise. Avec une affection évidente pour le vintage joli. Beaucoup de ces acteurs ont usé les planches du théâtre. Pas utile de lire dans l’ordre ; on peut picorer au gré de ses envies ; à la découverte d’un visage dont on a le nom “sur le bout de la langue” ; que l’on a adoré dans tel ou tel film… C’est un livre que Serge Regourd “aurait aimé déguster à ses 12 ans”. Dans l’un des précédents tomes, très réussi, les seconds rôles y jouaient enfin les premiers, injustice là aussi réparée, comme Dis-Leur vous l’avait expliqué ICI !

Pas moins de 1 170 acteurs intègrent ce tome 3

Il dit : “J’aurais voulu avoir entre les mains ce genre de dictionnaire. Devenu prof à la fac, directeur de labo, président de l’agence Livre et lecture de la région Occitanie, je n’ai jamais eu ce temps-là car cette anthologie, ce fut un sacerdoce… ! elle s’est concrétisée quand, bien plus tard, j’ai rencontré Dominique Besnehard, directeur de casting, agent de beaucoup de stars et producteur, qui avait le même désir. Un jour, lui-même en regardant la TV, n’arrivait pas à mettre un nom sur les visages des acteurs qu’il reconnaissait.” Les confinements dus au covid ont fait le reste. Comme base, Serge Regourd s’est associé à Alain Stouvenel, un passionné qui dispose d’une vaste base de données sur la filmographie française et les les fictions TV. Il a des milliers de captations de portraits.

Pas moins de 1 170 acteurs ont été choisis pour intégrer ce tome 3 de l’anthologie (quelque 3 000 au total sur les trois tomes) alors que la base de données de l’Adami (qui gère les droits des artistes) en recense 80 000 sur une année. Suivant un cheminement complexe et parfois subjectif, Serge Regourd explique a postulé que les acteurs devaient faire partie du cinéma parlant (1930) et qu’ils aient commencé une carrière à partir de l’an 2000. De l’an 2000 à aujourd’hui, cela fait une génération ; on a le temps de constater les traces puissantes qu’un acteur laisse dans la mémoire collective.

Acteur, c’est un métier qui est une loupe grossissante des inégalités de la société”

“On est dans une situation ambivalente sinon schyzophrénique où des lecteurs disent que l’on a mis dans le bouquin des gens très peu connus et en même temps il y en a beaucoup que j’aurais pu mettre ; ils sont dans une zone grise, et que je n’ai pas mis. Sinon, on en aurait 6 000 dont beaucoup de très méconnus…!” L’auteur, qui se positionne comme “un historien”, ne voulait pas, compte tenu, du nombre d’acteurs qui émergent continûment des films et des séries, s’inscrire dans une “course sans fin”. 

Serge Regourd rétablit ainsi une justice avec cette anthologie “égalitaire. L’idée cela laquelle les grands acteurs sont des acteurs connus c’est ridicule. Et personne ne peut le démontrer. Acteur, c’est un métier qui est une loupe grossissante des inégalités de la société. Je mets quiconque au défi de démontrer que tel acteur est supérieur à tel autre acteur. Il y a, certes, des cas singuliers, ceux que l’on appelle les monstres sacrés, les génies, il y en a très peu. Comme Michel Simon, Raimu… Un Benoît Poelvoorde… Eux, ils sont hors normes. Ce sont des fous dans la vie qui ont un comportement hors normes.”

Serge Regourd poursuit son analyse : “Pour les autres acteurs, c’est une injustice absolue, notamment ceux qui sont partout sur les chaines de TV et qui ont eu la chance de faire des films commerciaux qui ont marché. Et, à côté d’eux, il y a des centaines d’acteurs merveilleux et totalement méconnus. Il y a plein d’acteurs magnifiques qui sont dans la galère”. Et, ajoute-t-il, Fanny Ardant, qui, elle, est une star avait ouvert la cérémonie des César en disant : “Il n’y a pas de bons ou de mauvais acteurs. Il y a les acteurs que l’on aime et les acteurs que l’on n’aime pas.”

Occitanie : la donne bouleversée par les séries TV

Serge Regourd livre cette anecdote : “À Toulouse, il y a un théâtre baptisé Sorano. Daniel Sorano, qui a fait du théâtre, du cinéma – beaucoup de seconds rôles – et de la télé, a été pour moi le plus grand interprète de Cyrano de Bergerac à la TV, très supérieur aux autres. Eh bien, au départ du directeur à la retraite, je me suis aperçu que parmi les jeunes, personne ne connaissait Daniel Sorano ! Toujours à Toulouse, il y a Roger Souza qui est parti travailler à Paris et y faire beaucoup de choses ; eh bien, il est méconnu. En Occitanie, la donne est aujourd’hui bouleversée avec les séries TV quotidiennes qui sont pour la plupart tournées dans notre région. Les acteurs de ces séries, pour beaucoup, habitent en Occitanie.” Dont Ingrid Chauvin, à Sète, ou Alexandre Brasseur.

Olivier SCHLAMA

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(1) Éditions Un Autre Reg’Art, 24 €. Dans les principales librairies ou directement auprès de l’éditeur sur son site. Prix spécial pour la trilogie, les trois tomes : 50 €.

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