Société : À Toulouse, on chasse les rats avec des furets !

Deux furettes ont été utilisées pour un test concluant à Toulouse par l'éleveur Alexandre Raynal. Ph. Mairie de Toulouse.

La méthode, ancestrale, revient au goût du jour, avec succès : en une heure, deux furets ont débusqué 63 rats ! La Ville Rose s’est aussi lancée dans la chasse aux autres nuisibles – moustique tigre, étourneaux, pigeons, frelon – avec des méthodes “naturelles”.

Dans la Ville Rose, tout ne l’est pas. Les rats, par exemple, y pullulent dans certains quartiers. La municipalité a décidé de prendre le problème de ces nuisible à bras le corps. Chargée de la délégation dite de l’animal dans la ville, Françoise Ampoulange est satisfaite d’une présentation-expérimentation menée il y a quelques jours, une délégation qui s’imposait pour gérer la place de l’animal de compagnie et des nuisibles.

“Méthodes de luttes plus naturelles”

“Lors de la campagne des municipales de 2020, le maire a souhaité me confier cette délégation. À Toulouse, comme dans de nombreuses villes, il y a un problème de rats. Jusque-là, nous avions à notre disposition soit des pièges à rats soit des raticides.” Les premiers sont moyennement efficaces, les seconds “pas très performants” et qui font des dégâts sur l’ensemble du milieu et de l’écosystème, notamment sur les individus adultes.

Et d’ajouter : “Nous voulons également limiter l’utilisation de produits chimiques en utilisant des méthodes de lutte disons plus naturelles”, précise Françoise Ampoulange. C’est là que nous avons cherché et trouvé deux prestataires utilisant le furet dont l’un se trouve dans le Gers, le second à Lyon”, explique-t-elle, confiant que la municipalité fera désormais appel à cette méthode “naturelle en 2022 pour traiter certains quartiers”, au-delà de celui testé, Ampalot. 

Euthanasie douce

Alexandre Raynal, l’éleveur de furets. Ph. Mairie de Toulouse

Utiliser le furet, l’une des plus vieilles espèces d’animal domestiquée (2e millénaire avant JC), est une méthode ancestrale. Le premier test s’est avéré concluant. Avec Nuit et Mûre, deux furettes de trois ans. Le rat a une sainte horreur de ce prédateur. “Nous avons donc fait un premier test le long du canal de Brière qui relie la Garonne au Canal Latéral.” Bim ! “En un quart d’heure, les furets ont fait sortir 10 rats de leur trou.” Et 63 rats en une heure ! En sortant, les rats ne peuvent fuir : ils en sont empêchés par des filets préalablement posés. Il ne reste plus qu’à les placer dans une boîte et de les euthanasier avec le CO2 dont il elle est remplie. C’est un gaz inodore, incolore et mortel : l’homme s’en méfie chaque hiver car ce gaz peut émaner des chaudières mal réglées et fait de nombreuses victimes chaque année.

L’odeur persistante est un répulsif qui empêche les rats de recoloniser leur tanière précédente”

👉 voir ICI IMG_0153Un second test a été tout aussi concluant. “C’est l’odeur, forte, du furet qui fait fuir les rats”, souligne l’élue. “C’est juste le fait que le rat a peur de ce prédateur”, corrige Alexandre Raynal, l’éleveur. “L’odeur persistante est un répulsif qui empêche les rats de recoloniser leur tanière précédente.” Françoise Ampoulange souligne que l’autre avantage de la méthode, c’est que “le furet déloge les rats adultes, et les mâles reproducteurs surtout, plus enclins à rester longtemps dans leur trou, sans cela on aurait beaucoup de mal à les attraper. Cette méthode est intéressante mais on ne pourra pas l’utiliser dans tous les cas…” Impossible, par exemple, dans les immeubles, où “le furet pourrait s’échapper”, précise Alexandre Raynal.

Ordures, pigeons…

Pourquoi y a-t-il autant de rats ? “A cause, notamment, d’une incivilité préjudiciable : pas mal de gens ne jettent pas toutes leurs ordures, comme la fin d’un sandwich, dans une poubelle publique mais à terre”, défendent l’élue et l’éleveur. Françoise Ampoulange pointe également ceux qui nourrissent les “pauvres pigeons soit-disant affamés ; ce qui n’est pas le cas et qui en plus nourrit les rats…”

Entreprises agroalimentaire, de transport…

Ph. Mairie de Toulouse

“Mûre et Nuit ont trois ans, explique Alexandre Raynal. Depuis le Moyen-Âge, et depuis la Rome antique (on s’en servait pour attraper des lapins et s’en nourrir) on sait que le furet est utile contre les rats. On me demande d’intervenir régulièrement dans des entreprises agroalimentaires ; c’est Tisséo (l’opérateur du métro et des bus toulousains, Ndlr) où les rats faisaient des dégâts sous les rames, ce qui est un danger pour la stabilité des voies ; chez Airbus où ils occasionnaient des dommages dans les bâtiments et sur la voirie. Certains rats mangent même des filets de terrains de foot ! Aux USA, utiliser les furets, c’est une pratique courante.”

Les habituer à l’homme

Alexandre Raynal a dû éduquer ses furets “surtout pour ne pas qu’ils mordent. Mordre pour eux, c’est presque un moyen de communiquer : dès qu’ils voient un chat ou un chien, ils peuvent attaquer spontanément. C’est un animal courageux. J’ai dû aussi faire tout un travail pour les habituer aux stimuli, à l’homme et pour qu’ils reviennent vers moi ; ces animaux étant carnivores, je les nourris exclusivement avec une préparation de viande, celle que l’on donne aussi aux chiens et aux chats, le “barf” En plus, ça permet que les furets n’aient pas envie de croquer le rat qu’ils chassent. Cela devient plutôt un jeu pour eux…”

Olivier SCHLAMA

Moustiques tigre, pigeons, frelons…

Françoise Ampoulange travaille sur d’autres luttes face à différents nuisibles. Après les rats chassés par les furets, “nous allons réguler les populations d’étourneaux en lançant des buses ; cela permettra d’éviter des tir d’effarouchement qui incommodent le voisinage et qui, finalement, sont peu efficaces : les étourneaux se posent un kilomètre plus loin…”

Hirondelles contre le “tigre”

La municipalité de Toulouse étudie également la possibilité de lutter contre les moustiques tigre avec des hirondelles, un oiseau apparemment très efficace. Ce n’est pas tout. Toulouse veut aussi limiter la prolifération des pigeons avec un moyen contraceptif, là aussi naturel : “Nous allons poser deux nichoirs en 2022 en plus de celui que nous avons déjà.” L’idée, c’est de faire intervenir la main de l’homme : “Dès que les oeufs ont été manipulés, les pigeons ne les couvent plus et donc ils ne peuvent pas éclore. Alors, il faut le faire prudemment en ne manipulant qu’une partie des oeufs pour que les pigeons continuent à venir pondre dans ces nichoirs et n’aillent pas ailleurs. Il faut savoir qu’un pigeon nait, se reproduit et meurt au même endroit où il est né.

Guêpier d’Europe contre le frelon asiatique

La ville Rose a aussi envie de tester le guêpier d’Europe, un petit oiseau friand de frelons asiatiques. “Nous avons la chance d’avoir un couple à Toulouse qui a fait trois petits…Il nous faut nous rapprocher de la LPO sur ce sujet-là.”

Par ailleurs, l’élue chargée de la délégation de l’animal en ville ajoute avoir créé pour  les propriétaires de chiens des “balades canines gratuites”, accessibles dès que le chiot a six mois, pour montrer à leurs propriétaires comment doit-on se comporter en milieu urbain. Les chats ? “Nous travaillons avec des associations sur la question des chats errants pour en stériliser certains”. Enfin, “nous intervenons dans les écoles maternelles et primaires pour sensibiliser les enfants au respect de l’animal et à la lutte contre la maltraitance.”

O.SC.