Résurrection : “L’Espérance”, une mise à l’eau symbolique d’histoire et d’espoir

L'Espérance a retrouvé son élément naturel après la restauration assurée par le chantier d’insertion de charpenterie de marine du parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée. A bord, toute l'équipe autour de Yannick Pajot. Photo DomSch - Conservatoire Maritime et Fluvial

C’est le chantier d’insertion de charpenterie de marine du Parc naturel régional qui a entrepris la restauration en 2020 après la restitution de la goélette Majorquine Miguel Caldentey sous la houlette de Yann Pajot et de son équipe. Ce lieu devenu phare pour la restauration de notre patrimoine maritime et fluvial se situe aux abords du canal de la robine, au coeur du Parc.

Le Parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée est en effet reconnu dans la région et au-delà pour son expertise en matière de conservation du patrimoine maritime méditerranéen.

Et un tel projet était conforme aux orientations de la Charte de territoire 2010-2025 qui prévoit notamment de “mettre en place une stratégie de coopération au service du projet de territoire” et de “rendre accessible au grand public la compréhension des patrimoines culturels.”

Juste avant la mise à l’eau ! Photo DomSch – Conservatoire Maritime et Fluvial

C’est donc sur ce site exceptionnel que “L’Espérance” a été reconstruit en quasi-totalité, de 2020 à ce jour, avec un respect des savoirs-faire des maîtres charpentiers méditerranéens. Il y a enfin retrouvé son élément, avec une visibilité sur l’avenir digne de son neuvage (tribut payé par tout armateur pour la mise en service d’un bateau neuf).

“L’Espérance”, jamais navire n’aura aussi bien porté son nom !

Philippe MOURET

Une histoire commencée il y a… 144 ans !

Il suffit de relire ces quelques mots de Paul Valéry pour comprendre l’enjeu de cette résurrection : “Il n’y a pas dans toute la Méditerranée de bateaux de pêche aussi forts, aussi beaux que les nôtres et rien n’est plus gracieux que la gerbe des antennes de nos bœufs quand ils sont tous à quai, bordant le port vieux…”

Passeur de mémoire, “L’Espérance”, armé le long des berges audoises, retrouvera son port d’attache agathois qui l’exploitera le temps de cette énième vie sur la grande bleue.

Jamais la garde n’aura été baissée pour L’Esperance depuis 1881, date de sa construction au chantier Vidal d’Agde. De son activité première pour la pêche au bœuf, le bateau a par la suite décliné une multitude d’activités emblématiques.

Photo DomSch – Conservatoire Maritime et Fluvial

De Agde à Monaco, puis vers le Grand Nord et Canet-en-Roussillon

Après de longues années à la pêche, il sera transformé en bateau de servitude pour les besoins des aménagements du port de Monaco, où doté de deux bathyscaphes de poche, il est l’un des acteurs de l’enrochement artificiel du site portuaire de la principauté. Puis, il rejoindra son club de plongé pour accueillir sur son pont Princes et Princesses le temps d’une plongée.

Déjà fatigué par le poids des années, il cependant racheté par une bande de trois amis qui le guideront vers le Grand Nord par les canaux, le temps d’une première restauration. Alors que ses congénères au nombre de 72 bateaux armés sur le seul port de Cette (Sète à partir de 1927) disparaissent au fur et à mesure, il rejoint le port de Canet-en-Roussillon.

Un naufrage qui aurait pu lui être fatal

Lieu de convivialité pour les vacances et petites sorties, ses demandes de suivi deviennent exponentielles… et compliquées ! Il est alors inscrit en 2009 par le service des monuments historiques sous la houlette de Christian Jacquelin alors conseiller en ethnologie à la DRAC de Montpellier. Racheté par un particulier qui le conduit vers sa terre natale, le bateau fait alors naufrage dans l’Hérault, en plein centre d’Agde.

La ville s’en porte acquéreur et, sous la houlette d’Hélène Palouzié alors conservatrice des Monuments Historiques, une opération de la dernière chance est menée avec succès en 2012 pour sauvegarder cette unité aujourd’hui le plus vieux bateau de travail à voile des côtes de France. Après de nombreux soins de première urgence réalisés par le conservatoire Maritime et Fluvial des Pays Narbonnais, la coque est transférée à Narbonne en 2018.

C’est le chantier d’insertion de charpenterie de marine de Yann Pajot et son équipe (lire plus bas), du Parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée, qui entreprend sa restauration en 2020.

Ph.M.

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