(Avec vidéo). Le bilan de l’Office français de la biodiversité est éclairant : la population d’ours dans le massif progresse avec au moins 22 oursons en 2024. Mais cela ne suffit pas encore, explique Alain Reynes, pour pérenniser cette population de grands mammifères.
Caramellita, Bambou, Nheu, Plume ou encore Gaia ou Réglisse… : “Au moins 13 femelles ont eu une portée en 2024 (soit un minimum de 22 oursons), c’est le record du nombre de portées et d’oursons détectées”, affirme, sourire aux lèvres l’association Pays de l’ours-Adet. Du jamais-vu. Alain Reynes, directeur de l’association, réagit :“C’est une très bonne nouvelle, on ne va pas bouder notre plaisir. Si on nous avait dit dans les années 1990 qu’il y aurait une centaine d’ours dans les Pyrénées en 2024…Cela veut aussi dire qu’ils se sont bien adaptés ; que les Pyrénées sont accueillantes”. Il n’y avait aucun de ces mammifères en Pyrénées centrales à l’époque et è à 8 ours sur l’ensemble du massif.
96 individus formellement identifiés et 104 estimés

“Avec de nouvelles reproductions en 2024, la population pyrénéenne d’ours poursuit son développement”, dit sobrement l’Office Français de la Biodiversité (OFB) qui vient de publier un rapport sur le sujet. L’OFB est en charge du suivi de l’ours dans les Pyrénées en collaboration avec ses homologues espagnols et andorrans. Le suivi de l’espèce mené depuis 2024 a permis d’identifier 96 individus dont 13 femelles qui se sont reproduites. La population d’ours poursuit ainsi son développement dans les Pyrénées. L’une des 13 portées détectées en 2024 : F036 (code génétique) et son ourson de l’année (F167), le 12 août 2024, sur la commune de Couflens (09) (Réseau Ours brun, OFB, 2025).
Population d’ours suivie des deux côtés de la frontière
La population pyrénéenne d’ours se répartit sur 7200 km², des Pyrénées-Atlantiques aux Pyrénées Orientales et de part et d’autre de la frontière. Le suivi de cette espèce fait donc l’objet d’une coopération avec les services techniques des différentes provinces de l’Espagne (Catalogne, Navarre, Aragon), et de l’Andorre. En France, l’OFB assure la coordination du Réseau Ours Brun (ROB) qui regroupe des partenaires professionnels ou bénévoles en charge du recueil des indices sur le terrain.
Un nombre d’ours à la hausse

En 2024, un minimum de 96 ours a été détecté sur l’ensemble du massif des Pyrénées, dont 13 portées totalisant 22 oursons de l’année. Sur ces 96 individus, 46 % ont été détectés uniquement en France, 26 % uniquement en Espagne ou en Andorre et 28% de part et d’autre de la frontière. Tous les animaux n’étant pas systématiquement détectés chaque année, le chiffre de 96 est donc un minimum. Une estimation sur la base de modèles statistiques développés en collaboration avec le CNRS, évalue la population à 104 individus, avec un intervalle de crédibilité compris entre 97 et 123 individus.
La Slovaquie veut tuer 350 ours
Le suivi mis en place depuis 30 ans permet de constater que le taux d’accroissement moyen annuel entre 2006 et 2023 est estimé à + 11 % pour l’ensemble des Pyrénées. La population d’ours des Pyrénées poursuit donc son accroissement sur le plan démographique.
De quoi alimenter l’antagonisme entre pro-ours et ceux qui n’en veulent plus à l’heure où le gouvernement slovaque décide, lui, de tuer 350 de leurs 1 300 ours qui vont être abattus sur décision du gouvernement, malgré la directive européenne qui interdit l’abattage de cet anima qui figure sur la liste rouge des espèces menacées. Pour ce pays, l’ours est devenu un “danger pour l’homme avec des dizaines de rencontres avec les ours” avec la mort d’un randonneur récemment qui serait imputée à une rencontre avec un ours.
Le Premier ministre slovaque a même justifié sa décision : “On ne peut pas vivre ce pays où les gens auraient peur d’aller dans les bois et encore on a une période où les ours sont censés être encore en divers internassions.”
“Ce genre de situation, c’est souvent dû à une mauvaise gestion des populations de mammifères”

Les défenseurs de l’environnement dénoncent avec vigueur cette situation préférant mettre l’accent sur la prévention, l’éducation et la gestion des déchets qui attire les animaux. Ce sont aussi les arguments d’Alain Reynes, directeur de l’association Pays de l’Ours qui va plus loin : “Ce genre de situation, c’est souvent dû à une mauvaise gestion des populations de mammifères. C’est le cas, par exemple, aussi, en Roumanie où il y a des décharges à ciel ouvert près des forêts avec des ours qui, petit à petit deviennent familiers et il peut arriver des incidents…”
La population de plantigrades n’est pas encore viable

S’agissant de la population en hausse dans les Pyrénées, Alain Reynes dit : “Une centaine d’individus, c’est une bonne nouvelle mais ce qui compte pour qu’une population de grands mammifères soit viable c’est qu’elle affiche un indicateur de “population efficace” (avec une diversité génétique et en capacité de se reproduire) de 50 %. Pour cette population d’ours, on en est à seulement 10 %. Ce n’est pas suffisant.” Ce que confirme l’OFB dans son bilan : “La faible diversité génétique pourrait potentiellement altérer cette dynamique dans les années futures. Des travaux de recherche, menés par le MNHN, l’OFB et le SLU (Université suédoise des sciences agricoles), sont donc actuellement en cours pour évaluer les effets de la consanguinité sur la démographie des ours des Pyrénées.”
D’autres lâchers d’ours sont par ailleurs envisagés dans les Pyrénées par les pouvoirs publics. Et de conclure : “Nous sommes en train de réapprendre à vivre avec l’ours…”
Olivier SCHLAMA
👉 UN DON POUR SOUTENIR DIS-LEUR !
L’information a un coût. En effectuant un don, vous réduisez, en plus, votre impôt en soutenant les journalistes indépendants de Dis-Leur ! à partir de 1 € et défiscalisé à 66% !
– Après notre premier prix un concours national organisé par le ministère de la Culture en 2018 devant 500 autres medias, après l’installation de bandeaux publicitaires en 2019, après avoir été agréés entreprise de presse, nous lançons en collaboration avec le syndicat de la presse numérique (Spiil) un appel aux dons. Merci pour votre générosité et merci de partager largement !
- Le 19 mars, le tribunal de Foix a requis quatre mois de prison avec sursis pour le chasseur incriminé. Ce dont s’était félicitée l’association Pays de l’Ours-Adet.
-
L’OFB est un établissement public de l’État créé le 1er janvier 2020, l’Office français de la biodiversité est placé sous la tutelle des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture. Il a pour missions la surveillance, la préservation, la gestion et la restauration de la biodiversité terrestre, aquatique et marine, ainsi que la gestion équilibrée et durable de l’eau, dans l’Hexagone et les Outre-mer. Il est chargé de développer la connaissance scientifique et technique des espèces, des milieux et de leurs usages, de surveiller et de contrôler les atteintes à l’environnement, de gérer des espaces protégés, d’appuyer la mise en œuvre des politiques publiques, et de mobiliser l’ensemble de la société, acteurs socio-économiques comme citoyens.