Marine Tondelier (EELV) : “Comment peut-on avoir le projet d’un golf aujourd’hui?”

Secrétaire nationale EELV Marine Tondelier est en visite dans l’Aude jusqu’à demain, à l’invitation du groupe local du Carcassonnais. Pour dénoncer des “grands projets inutiles”, comme un golf dans la Montagne Noire, et se rendre compte in situ des solutions portées localement, comme un écoquartier et un parc photovoltaïque à Luc-sur-Aude. C’est aussi l’occasion d’alimenter la plate-forme d’un programme électoral d’un nouveau parti, les Ecologistes, en vue des Européennes de 2024 et de la présidentielle.

Quel est le sens de votre venue dans l’Aude ?

Marine Tondelier lors d’une visite d’exploitation dans le Pas-de-Calais (Oppy). Ph. DR.

D’abord, je vais sur le terrain depuis longtemps, bien avant d’être élue secrétaire nationale d’EELV. Là, je viens pour voir de mes propres yeux ce qu’il se fait de formidable sur ce territoire. Et pour dénoncer aussi des projets qui appartiennent au passé, complètement obsolètes, comme ce golf à Fontiers-Cabardès qui comprend aussi un projet immobilier de luxe, avec une appropriation de l’eau et des terres agricoles.

De plus, il y a déjà trois golfs près de Carcassonne. Celui de Fontiers-Cabardès n’est pas acceptable. Il me fait penser à la chanson de Francis Cabrel Est-ce que ce Monde est Sérieux ? On est vraiment là dedans ; il n’y a rien qui va dans ce projet dans un département déjà touché par la sécheresse. On se demande comment on peut avoir de tels projets aujourd’hui (qui fait l’objet d’une forte contestation, notamment d’une association Montagne Noire Avenir, Ndlr). C’est, de plus, une manière de faire de l’hôtellerie de luxe…

C’est un projet symbolique ?

C’est un combat.

De la même manière, vous allez voir des projets vertueux ?

Le projet de golf. Ph. Montagne Noire Avenir.

Exactement. Il y a dans tous les territoires des projets ambitieux, qui vont dans le sens de l’histoire et que, du coup, nous venons soutenir, comme donc à Luc-sur-Aude. Où je vais visiter un projet d’habitat participatif, le Pech des Possibles. C’est un lieu convivial à partager entre plusieurs foyers intergénérationnels, porté par la commune. Il y aura un écoquartier et également un parc photovoltaïque qui a été mis en service il y a dix-huit mois. C’est la première centrale solaire française. C’est un exemple dans tout le pays. Comme quoi, sur un même territoire, le pire côtoie le meilleur.

Ce genre de projet vient-il alimenter votre programme en vue des prochaines échéances électorales ?

Ce sont déjà des choses que nous avons dans notre programme. Nous sommes en train de lancer un nouveau parti d’écologie qui s’appellera Les Ecologistes. Et on va ainsi partout sur le territoire à la rencontre des Français. C’est ce que l’on fait ce lundi 12 juin au soir à Carcassonne où l’on organise un atelier des états généraux de l’écologie. Où l’on demande aux gens comment ils imaginent ce mouvement. On le construit vraiment avec les gens. Il sera opérationnel en octobre. Il y a en ce moment une grande enquête populaire en ligne qui s’appelle lesécologistes.fr. avec des cahiers de doléances. Il y a aussi des ateliers comme celui de l’Aude partout sur le territoire ; il y en a deux ou trois par jour en ce moment. Ma visite dans l’aude c’est aussi l’occasion de concerter les habitants.

Que pensez-vous du tourisme de masse, le deuxième secteur économique le plus important en Occitanie ?

Sandrine Rousseau, députée EELV, et Marine Tondelier, secrétaire nationale EELV dans l’Aude. DR.

C’est bien de se déplacer, de visiter sur les territoires ; cela forge une ouverture d’esprit. Après, de moins en moins de personnes en ont les moyens… Sur le tourisme de masse, on ne pourra pas continuer ainsi encore longtemps : on le constate avec ce projet de golf dans l’Aude ; qui n’aurait aucune considération pour les limites planétaires, encore une fois dans des départements touchés ainsi par la sécheresse qui est de plus en plus sévère. Nous ne sommes pas contre le tourisme, bien entendu. Mais on doit le faire dans les limites environnementales. Si on ne pense pas à la planète, elle finira pas se rappeler à nous.

Et l’agriculture ? Le monde agricole souffre, se sent oublié et les relations avec les écolos sont parfois tendues…?

Marine Tondelier. DR.

Je suis petite-fille d’agriculteurs et j’ai pleinement conscience de la difficulté de ce métier. On a quand même deux cents exploitations qui disparaisse chaque semaine dans notre pays. Deux cents exploitations par semaine… ! Et ce n’est pas la faute des écologistes. Ce sont des boucs émissaires faciles parce que les politiques publiques les concernant ne marchent pas. Et certains accusent les écolos. Ce qu’il faut ce sont des cultures qui s’adaptent au changement climatique. On est là pour aider. Dans notre projet, nous souhaitons un million de paysans d’ici 2050 dans des exploitations vertueuses des sols, de la ressource en eau, de la santé de l’environnement et de la qualité de vie des agriculteurs. C’est un modèle gagnant-gagnant-gagnant-gagnant !

Quel est l’avenir de la Nupes ?

Radieu, pourquoi ? (rires). Mais ce n’est pas grave.

Une liste 100 % écolo aux Européennes et à la présidentielle… ?

J’ai toujours plaidé pour une réunion de la gauche et des écologistes. Ce n’est pas le même mode de scrutin. La Ve République nous oblige à une coalition. En Allemagne, il y a une coalition de gouvernement sans que ses composantes de gauche soient obligées à chaque scrutin de partir ensemble aux Européennes. Il y a toujours eu des listes ouvertes.

Pourquoi EELV fait-elle de bons scores aux Européennes sans que cela ne se traduise dans les autres scrutins…

Nous avons fait de très bons scores aux municipales que personne n’avait vu arriver ! On change ainsi la vie au quotidien de millions de Français. Et on en est très fiers. (EELV a gagné Lyon, bordeaux, Strasbourg, Poitiers, Grenoble et a participé à la victoire à Paris ou Marseille, Ndlr).

Propos recueillis par Olivier SCHLAMA