Historique, cette décision du TA de Toulouse pour une raison environnementale est qualifiée “d’ubuesque” par le ministre des Transports et risque de fragiliser d’autres projets en cours.
C’est une première. Pour la première fois en France, la justice annule l’autorisation environnementale d’un chantier de cette ampleur, délivrée, le 1er mars 2023, par les préfets de la Haute-Garonne et du Tarn. Atosca “prend acte de cette décision du tribunal administratif de Toulouse, entraînant l’interruption des travaux”. Le chantier, déjà réalisé à 75 % (300 M€ sur 450 M€), va devoir être “mis en sécurité”. De quoi engager des surcoûts inévitables.
Un chantier de 53 km. L’autoroute A 69, entre Toulouse et Castres, lancé par la société Atosca, déjà bien avancé. Un projet, censé désenclavé le sud du Tarn, dont l’utilité publique a été reconnue par décret en 2018, confirmée par le Conseil d’État ainsi que par la représentation nationale en 2019 dans la loi d’orientation des mobilités. Atosca avance avoir déjà dépensé un demi-milliard d’euros. L’Etat, annonce le ministère des Transports, va faire appel de cette décision, dénonçant une situation “ubuesque“.
Les arguments présentés en faveur de ces projets ne justifient pas qu’il soit dérogé à l’objectif de conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvages”
“Le tribunal observe que le territoire ne présente ni un décrochage démographique (…) ni un décrochage économique”, lit-on comme argument dans un communiqué mis en ligne ce jeudi. Ajoutant : “L’A69 et l’élargissement de l’A 680 n’ayant que des bénéfices de portée limitée, il n’y a pas de nécessité impérieuse à les réaliser, et les arguments présentés en faveur de ces projets ne justifient pas qu’il soit dérogé à l’objectif de conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvages.”

Le ministre des Transports, Philippe Tabarot, le ministre, rappelle que “la liaison a été déclarée d’utilité publique en 2018 et qu’elle bénéficie d’un large soutien local de la part des élus, des habitants et des acteurs économiques. En effet, la liaison autoroutière entre Castres et Toulouse a pour objectif d’offrir une accessibilité autoroutière répondant aux besoins de l’économie locale et de la population, en permettant une diminution et une sécurisation des temps de parcours tout en apportant des améliorations en termes de sécurité et de réduction des nuisances pour les riverains”.
Les deux-tiers du chantier déjà réalisé
Réalisé en concession et financé principalement par le péage, ce projet est mené en partenariat entre l’État, la région Occitanie, le département de la Haute‑Garonne, le département du Tarn, la communauté d’agglomération de Castres‑Mazamet et la communauté de communes Sor‑et‑Agout. “Les travaux ont démarré en mars 2023 à la suite de l’obtention de l’ensemble des autorisations prescrites par la réglementation et, jusqu’à ce jour, confirmées par toutes les décisions de justice, soit six décisions favorables au projet depuis le début des travaux. C’est globalement 300 M€, soit les deux-tiers du coût de la construction, qui ont été engagés sur le chantier jusqu’à présent”, poursuit le ministère des Transports. Soit 450 M€. L’Etat “réaffirme son attachement à la réalisation de cette infrastructure”.
“C’est une décision historique qui porte un coup d’arrêt définitif à un projet inutile”

Dans un communiqué, le collectif d’associations, la Voie est Libre réagit : “Le TA de Toulouse reprend nos arguments, persiste et signe : ce projet ne répond à AUCUNE Raison Impérative d’Intérêt Public Majeur et ne sera pas régularisable ! C’est une décision historique qui porte un coup d’arrêt définitif à un projet inutile, destructeur et irresponsable, que nous dénonçons avec force depuis plusieurs années. C’est un grand jour pour le droit environnemental.” Et de juger que c’est “un tournant décisif pour l’autorisation des projets routiers”.
“Depuis quelques mois, des projets insensés sont arrêtés dans le Vallespir, le Val d’Oise, les Pyrénées-Orientales, l’Ardèche, et la Manche. En Haute-Loire, un rapporteur public a remis en cause des mesures compensatoires jugées insuffisantes sur la RN88. Cette décision sur l’A69 fera jurisprudence ! Les projets routiers et autoroutiers ne sont plus en roue libre. Le retentissement de cette victoire sera national et remettra l’intérêt général au centre du jeu.”
Olivier SCHLAMA