Histoire : Jean Jaurès, de l’Ecole normale à l’entrée au Panthéon, il y a 100 ans

Jeran Jaurès - Phjoto DR

Le 23 novembre 1924 Jean Jaurès -inhumé à Albi après son assassinat en 1914- est transféré au Panthéon. C’est une décision voulue par le Cartel des gauches (coalition des radicaux et des socialistes), arrivé au pouvoir après sa victoire aux élections législatives du 11 mai. A l’occasion du centenaire de cet événement, l’Occitanie rend hommage à ce grand homme né à Castres dans le Tarn (*) le 3 septembre 1859.

De nombreux événements marquent, cette semaine, le centenaire de l’entrée de Jean Jaurès au Panthéon. Dans son article “La « panthéonisation » de Jean Jaurès”, le chercheur Avner Ben-Amos (**) écrit :

“Jean Jaurès fut enterré deux fois : en août 1914, après son assassinat à la veille de la Grande Guerre, et en novembre 1924, quand son corps fut transféré solennellement au Panthéon. Le premier enterrement fut un événement national majeur, en relation avec le choc de l’assassinat survenu à un moment de tension politique ; le second fut aussi un événement national d’importance (…) L’entrée au Panthéon de Jaurès, fut, au contraire, un événement spectaculaire, planifié des semaines à l’avance, et entièrement mis en scène par l’État (…) Mais la panthéonisation de Jaurès fut bien plus qu’un simple spectacle. Comme le premier enterrement, ce fut avant tout un événement politique qui eut d’importantes conséquences…”

Plusieurs rendez-vous à travers l’Occitanie

Mettre justement à l’honneur “l’héritage politique et les valeurs universalistes défendues par cet enfant du pays”, c’est l’objectif des différentes manigestations officielles qui vont ponctuer la semaine de la présidente de la Région Occitanie. Ainsi, Carole Delga a déposé une gerbe devant la tombe de Jean Jaurès et de Jean Moulin au Panthéon, à Paris. Jeudi (14h), aux côtés de Raphaël Glucksmann, député européen, et de Christophe Ramond, président du Département du Tarn, elle participera au colloque “Jaurès, un discours de vérité toujours d’actualité” organisé par la faculté Champollion à Albi. Puis, à 16h une gerbe sera déposée sur le cénotaphe de Jaurès, au cimetière des Planques.

Enfin, aux côtés de Bernard Cazeneuve, Carole Delga participera à la soirée hommage (vendredi 22 novembre, à 18h) organisée par la Région Occitanie, en partenariat avec la Dépêche du Midi. Se tiendra une rencontre-débat “Jaurès est vivant !”, en présence notamment de la présidente de l’Université Jean-Jaurès, Emmanuelle Garnier, de l’universitaire et président de l’association des amis de Jaurès, Rémi Pech, et de l’essayiste Frédéric Potier. A cette occasion, la Fondation Jean-Jaurès et son co-directeur, Jérémie Peltier, présenteront les résultats d’une enquête inédite menée avec l’Ifop sur le niveau de connaissance des Français des grands combats de Jean Jaurès. La soirée se clôturera par une lecture par Magyd Cherfi, chanteur et écrivain.

En savoir plus (et inscription) : https://www.laregion.fr/jaures#nb3-1

Des rendez-vous à Albi, Castres, Narbonne…

Le Tarn, “le” département de Jaurès, a aussi souhaité lui rendre hommage à travers des manifestations et expositions durant toute l’année. Ainsi, jusqu’au 30 novembre, il est encore possible de découvrir “Jaurès intime” (Centre national et musée Jean Jaurès – Castres), “Le Tarn au temps de Jaurès” (Hôtel Reynès – Albi), “Jean Jaurès, l’homme de paix” qui retrace la vie de Jean Jaurès de sa jeunesse tarnaise à son engagement national (Musée-Mine départemental – Cagnac-les-Mines) et “Jean Jaurès : reflets d’une vie à travers les Archives”, aux Archives Départementales à Albi.

Plus d’infos : https://www.albi-tourisme.fr/cent-ans-de-la-pantheonisation-de-jean-jaures/
Détail de l’affiche pour la conférence de Max Assié à Carmaux… également illustration de couverture de son livre : “Jean Jaurès – Du Tarn au Panthéon” (éd. Un autre Reg’Art) DR

Le musée Toulouse-Lautrec d’Albi n’est pas en reste, avec un accrochage spécifique lié à cette grande figure (jusqu’au 12 janvier). Se joignant aux commémorations, il lui rend hommage à travers une sélection d’oeuvres et objets. Médaille de député, habits portés lors de son assassinat, masque mortuaire, projet de monument…

Et à la médiathèque de Carmaux, le 12 décembre, l’Université pour tous du Tarn proposera une conférence de Max Assié sur les grèves des mineurs… (https://mediatheques.dlireetplus.fr/agenda/a-venir/185-exposition-jean-jaures-l-homme-de-paix)

Plus : https://musee-toulouse-lautrec.com/fr/centenaire-de-la-pantheonisation-de-jean-jaures

Narbonne également s’apprête à rendre hommage à cette date symbolique. Jeudi 21 novembre à 18 heures, l’Espace Média (ex Médiathèque) accueillera Gilles Candar, historien (spécialiste des gauches françaises) et président des études jaurésiennes. Vendredi 22, le vernissage (à la Maison des Jeunes) de deux expositions, “Jaurès intime” et “Autour de Jaurès”, précédera la projection du film “Qui a tué Jaurès ?”. Et le mardi 26, la Maison de la Région proposera de découvrir une exposition “Jaurès le pacifique”, avant une conférence de Philippe Martel : “Jaurès l’Occitan.”

Biographie express

Né le 3 septembre 1859 à Castres (Tarn) Jean Jaurès est issu d’une famille de la petite bourgeoisie castraise. Il grandit à Castres où il passe son enfance et sa jeunesse, puis, brillant élève, il étudie ensuite à l’École normale supérieure de Paris et obtient une agrégation de philosophie avant de s’orienter vers la politique. Il est élu député en 1885 et devient alors le benjamin de l’Assemblée nationale.

Il soutiendra notamment après sa réélection en 1893, la grande grève des mineurs de Carmaux, puis s’engage plus encore en contribuant à la fondation du Parti socialiste français en 1902, puis à celle du quotidien L’Humanité, qu’il dirigera à ses débuts.

Lors de son passage à Toulouse, il travaillera encore comme journaliste. En 1905, il est un des rédacteurs de la loi de séparation des Églises et de l’État. Il consacrera les dernières années de sa vie à tenter d’empêcher le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Ces positions pacifistes lui valent d’être assassiné par le nationaliste Raoul Villain à la veille du conflit. En 1924, sa dépouille est transférée au Panthéon.

Le Centre des monuments nationaux, en partenariat avec l’Ecole Normale Supérieure, la Fondation Jean-Jaurès et les éditions Perrin, propose une rencontre autour de Jean Jaurès. Pour célébrer l’événement, une rencontre fait dialoguer des historiens et philosophes sur la personne de Jaurès, depuis ses études à l’École Normale Supérieure jusqu’à ses derniers combats contre la guerre au début de l’été 1914 : “Jaurès, de l’école normal au panthéon”, le 23 novembre (15h-16h30) au Panthéon. Elle sera suivie d’une lecture musicale d’extraits de textes de Jean Jaurès, intitulée Je veux dire (Lecture : Blaise Pettebone et Musique : Ulysse Chaffin).

Philippe MOURET

(*) A Castres, sa maison natale est située 5 rue Réclusane (plaque commémorative) et il passe sa jeunesse au Domaine de la Fédial (lieu-dit « La Lauretié haute »). Il fréquente le collège où il a étudié de 1869 à 1876 et qui porte désormais son nom (plaque commémorative). On y trouve également le Monument à sa gloire sur la place … Jean Jaurès ! On peut aussi y visiter le Centre national et musée Jean-Jaurès, qui retrace le parcours de l’homme politique, enseignant, philosophe, journaliste et tribun d’exception qu’il était.
(**) Avner Ben-Amos, de l’Université hébraïque de Jérusalem. Avner Ben-Amos, « La «panthéonisation» de Jean Jaurès », Terrain, 15 | 1990, 49-64. Référence électronique : Terrain [En ligne], 15 | 1990, mis en ligne le 09 juillet 2007URL  http://journals.openedition.org/terrain/2983  DOI : https://doi.org/10.4000/terrain.2983
(***) A Albi, Jean Jaurès a enseigné la philosophie à ses premiers élèves, de 1881 à 1883, au lycée Lapérouse. Il contribue également à la création de la Verrerie Ouvrière d’Albi (VOA) – qui se visite. A sa mort, et avant que ses cendres ne soient transférées au Panthéon, Jean Jaurès a été inhumé au cimetière des Planques où un cénotaphe abrite toujours la dépouille de son épouse.

Jaurès : chansons et poésies :

Dès l’assassinat de Jean Jaurès, de nombreuses poésies et chansons participent à la construction de sa mémoire. Mieux encore, elles définissent le modèle archétypal de discours qui va être accolé au souvenir du tribun. Grâce à Thomas Valero, découverez (sur le site de la Fondation Jean-Jaurès) ces compositions, avec la participation d’artistes comme Anna de Noailles, Montéhus, Brel…