Espiguette et Tamarissière à restaurer : Jouez au loto de la biodiversité, la nature vous le rendra

Lagune Capelude. Ph. Rémi Jullian

C’est la 3e édition du loto de la biodiversité, Mission nature, qui permet de restaurer des milieux protégés au coeur de zones touristiques comme aux portes de la Camargue et à Agde. Les tickets à gratter sont disponibles dès ce 28 avril. Les deux précédentes éditions avaient rapporté 14 M€.

Le loto à la rescousse de la nature. Avec 21 projets sélectionnés, c’est la 3e édition de Mission nature avec pour thème : Mer et littoraux. Et avec comme financement principal le produit d’un loto avec des tickets à gratter disponibles à partir du 28 avril (un loto sera aussi proposé aux joueurs le samedi 24 mai, à l’occasion de la fête de la Nature). Il faut vite en profiter alors même que le gouvernement vient d’annoncer l’annulation de 3,1 milliards de crédit pour les missions écologie, économie et recherche…

Bâtiments en ruines, piscine bourrée d’amiante

Lagune à l’Espiguette. Ph. Remi Jullian

En Occitanie, deux projets du patrimoine naturel ont été sélectionnés pour intégrer ce loto qui se met au vert. Dans le Gard, le littoral du domaine de la Capelude, sur la commune du Grau-du-Roi, à l’Espiguette, à l’entrée de la Camargue, est fragilisé par l’artificialisation des milieux naturels et la fragmentation des habitats avec, notamment, deux bâtiments en ruines totalisant 900 m2, d’une… piscine bourrée d’amiante de 1 000 m2 et d’un réseau de pistes couvrant 1,5 hectares. Ces bâtiments à l’abandon vont être rasés et permettre à la dune de se reconstituer et aux espèces de se développer.

“Réhabiliter une mosaïque de milieux dunaires dégradés sur plus de 55 hectares”

Les travaux doivent débuter en janvier 2026 et se terminer trois mois plus tard. “Il s’agit là, sur ce qui est la propriété du Conservatoire du littoral, de poursuivre en les finançant les cinq actions qui avaient déjà été conduites en 2007 pour reconstituer le cordon dunaire et réhabiliter ces milieux naturels. Il s’agissait de solutions basées sur la nature permettant de reconstituer un cordon dunaire de second rang fonctionnel sur près de 11 km et de réhabiliter une mosaïque de milieux dunaires dégradés sur plus de 55 hectares”, explique Rémi Jullian, responsable territorial Hérault-Gard du CEN, conservatoire d’espaces naturels.

Pélobate cultripède et le Leste à grands stigmas. Et pour la flore la saladelle de Girard, et la Tolypelle saline

Gravelot. Ph. CEN Occitanie.

Le domaine s’étend sur plus de 911 hectares comprenant le Bois du Boucanet, l’Espiguette et la Camargue gardoise, secteur de l’étang du Médard. L’opération proposée désormais vise à réhabiliter un éco-complexe littoral fonctionnel sur 10 hectares. Il faudra dépolluer, déconstruire et remodeler une partie du site. L’ancienne piscine sera, elle, transformée en mare dunaire, lieu idéal de reproduction de plusieurs espèces comme le Pélobate cultripède et le Leste à grands stigmas. Et pour la flore la saladelle de Girard, et la Tolypelle saline.

Le Gravelot à collier interrompu, identifié comme un enjeu fort, nicheur sur les berges de la lagune verra son habitat restauré offrant une meilleure capacité d’accueil notamment pour ses jeunes. “À terme, indique l’Office français de la biodiversité, ces transformations permettront de restaurer les continuités écologiques en reconnectant les milieux naturels et de retrouver les fonctionnalités hydromorphologiques de la lagune.”

Restauration à 260 000 € dont 80 % de Mission nature

Limonium girardianum. Ph. M_Klesczewski

Le Domaine de la Capelude, propriété du Conservatoire du littoral de 200 ha d’un seul tenant sur 2 km de trait de côte, constitue l’extrémité Est de l’Espiguette (Gard). Ce grand ensemble littoral fonctionnel, joyau de biodiversité reconnu par de nombreuses mesures de protection, dont le Grand Site de France Camargue Gardoise, s’étend sur plus de 2 500 hectares d’espaces naturels protégés. En cela, “les steppes salées méditerranéennes, identifiées comme un enjeu exceptionnel du territoire et abritant la saladelle de Girard (espèce protégée à enjeu fort) seront en capacité de recoloniser les emprises des pistes des bâtiments”, note encore Rémi Jullian.

Et aussi : “Les dunes boisées, identifiées comme un enjeu fort seront en capacité de recoloniser les zones renaturées en lieu et place des bâtiments. Les lagunes méditerranéennes temporaires, identifiées comme un enjeu fort et abritant la Tolypelle saline seront positivement impactées par la restauration de l’hydromorphologie locale et la réhabilitation des continuités hydrauliques une fois les marqueurs de l’artificialisation des sols effacés.

Tout compris, cette restauration a été estimée à 260 000 € dont 80 % par l’entremise de Mission nature pour 184 000 €, la commune du Grau-du-Roi à hauteur de 25 300 € (11 %) et le Conservatoire du littoral pour 20 700 € (9 %).

Ganivelles et panneaux d’information à la “Tama”

Espiguette, milieu dunaire, Ph. Rémi Jullian

Ce n’est pas tout. Un second site emblématique a été sélectionné pour bénéficier de la manne de Mission nature : l’écosystème dunaire de la Tamarissière qui est menacé par la dégradation et l’érosion des dunes par le piétinement, sans oublier la présence d’espèces végétales envahissantes. Plage phare d’Agde, la “Tama” doit évidemment son nom aux tamaris plantés fin XVIIIe siècle. Le site présente un fort enjeu  de biodiversité : y sont présents des espèces protégées telles que l’Euphorbe péplis ou la Germandrées des dunes. Ainsi, l’agglo d’Agde veut poser des ganivelles et des dispositifs de piégeages sableux basés sur du paillage végétal. Et des panneaux d’information. Coût total : 169 443 €

Mission Nature est un jeu à gratter vendu 3 euros dans tous les points de vente de la Française des Jeux et disponible également en ligne. Sur ces 3 euros, 43 centimes sont reversés à l’OFB pour financer des projets de reconquête de la biodiversité dans les territoires. Pour sélectionner ces projets, un appel à projets est lancé chaque année.

Deux premières éditions couronnées de succès

Grâce à l’enthousiasme des joueurs, les deux premières éditions de Mission Nature ont permis de récolter plus de 14 M€ en faveur de la nature. Chaque année, les sommes versées à l’Office français de la biodiversité ont dépassé l’objectif fixé : en 2023, un projet supplémentaire a pu rejoindre les 20 projets sélectionnés au départ, et en 2024, ce sont trois projets supplémentaires qui se sont ajoutés aux 19 premiers lauréats.

Au total, 43 projets ont été soutenus sur l’ensemble du territoire, dans l’Hexagone comme dans les Outre-Mer : retour du Gypaète barbu et de l’Effraie des clochers, restauration des Pozzis du Renosu et des pelouses calcaires en forêt de Verdun, sauvegarde de la Tortue d’Hermann et des tortues marines, restauration de zones humides en Brenne et au Mont Saint-Michel, conservation du Gecko vert de Manapany et de l’Iguane des petites Antilles… autant de symboles de la restauration de la biodiversité qui ont été financés grâce à l’opération Mission nature.

Olivier SCHLAMA