Un rapport de la Cour des Comptes de juin 2023, sur le maillage aéroportuaire français (*), relève certaines anomalies en Occitanie. Il pointe notamment le cas des aéroports de Pau (Pyrénées-Atlantiques) et de Tarbes-Lourdes-Pyrénées (Hautes-Pyrénées), distants de seulement 50 km. Ces plateformes “partagent en partie la même zone de chalandise et s’affrontent sur la liaison vers Orly”, souligne la juridiction financière. Président du département des Hautes-Pyrénées, Michel Pélieu réagit.
“Au regard des critiques lues et entendues au sujet de la pertinence de la liaison
aérienne entre Lourdes et Orly, je crois de ma responsabilité, en ma qualité de
président du Département des Hautes-Pyrénées, de réagir“, souligne Michel Pélieu qui renchérit : “Nous enregistrons une croissance d’activité sans précédent, une croissance qui récompense nos efforts pour relancer la destination Lourdes et plus largement accompagner l’attractivité touristique de nos Pyrénées.”
Michel Pélieu explique la “très forte dynamique” de Tarbes
Pour l’élu pyrénéen, les adversaires du moment sont clairement identifiés : “Je crains que la question de la liaison vers Paris ne soit pourtant qu’un écran de fumée qui masque la réalité de la transformation profonde du modèle économique de l’aérien. Une transformation qui touche de plein fouet aujourd’hui nos voisins palois et booste notre aéroport (…) Un développement qui, selon certains élus des Pyrénées-Atlantiques, semble porter un tort coupable au fonctionnement de l’aéroport de Pau.”, insiste-t-il.
Et Michel Pélieu de citer les chiffres de fréquentation, à l’avantage du site de son département : “Lourdes, c’est 600 000 passagers projetés en 2023, 13 liaisons régulières (2 en France et 11 en Europe) et 80 liaisons charters vers 24 pays dans le monde. Pau, c’est une fréquentation estimée à 400 000 passagers cette année, 5 liaisons régulières en France et 4 vols charters (…) la structure de notre trafic est beaucoup plus touristique et force est de constater que celui-ci a repris une très forte dynamique…”
L’accent mis sur la participation financière des collectivités
Dans son rapport, la Cour des Comptes précise : “La proximité des plateformes de Tarbes et de Pau est emblématique. Distantes de 50 km, elles partagent en partie la même zone de chalandise et s’affrontent sur la liaison vers Orly (…) Cette concurrence frontale est d’autant plus atypique que la liaison Tarbes-Orly est financée par l’État et les collectivités territoriales, sous le régime des lignes d’aménagement du territoire…”
Mais, rétorque Michel Pélieu : “Notre participation financière au maintien de la ligne vers Orly n’est (…) pas le nœud du problème. Je rappellerais que cette participation n’émouvait personne lorsque la Région Occitanie, le Département des Hautes-Pyrénées et l’Agglomération Tarbaise étaient contraints de financer Air France pour des avions de 70 places qui volaient à moitié vides et offraient des billets à plus de 500 €. (…) Désormais, Volotea (compagnie espagnole à bas-coût, NDLR) satisfait la même obligation de service avec un avion deux fois plus grand, un taux de remplissage supérieur à 90% et un tarif raisonnable similaire à ce qu’offrent les autres compagnies depuis Biarritz, Pau ou Toulouse.”
Carole Delga propose “un seul aéroport, avec deux pistes”
Défendant bec et ongle son territoire, le président des Hautes-Pyrénées souligne également : “Lorsque je fais le constat, les Pyrénées-Atlantiques disposent de deux aéroports, trois liaisons autoroutières, des ports et un projet de train à grande vitesse qui bénéficiera d’abord et avant tout à Bayonne et à Pau. En comparaison, dois-je rappeler que l’économie haut-pyrénéenne n’est connectée aux grandes métropoles que par une seule autoroute, un seul aéroport et que la première gare LGV demeurera longtemps encore à plus de 150 km !?”
Interrogée voici quelques semaines par nos confrères de Sud-Ouest, la présidente de la Région Occitanie Pyrénées-Méditerranée Carole Delga (la région est actionnaire majoritaire dans le Syndicat mixte qui gère l’aéroport de Tarbes-Lourdes) déclarait : “Je pense qu’il faudrait qu’il y ait un seul aéroport des Pyrénées, avec deux pistes. Cela pourrait offrir une complémentarité en termes d’horaires et permettre de mieux organiser les vols…”
En 2019, la Région Occitanie a créé une SPLAR (Société Publique Locale Aéroportuaire Régionale), gouvernance intégrée de trois plateformes aéroportuaires régionales : Carcassonne, Tarbes et Perpignan.
L’obligation de service public concernant la liaison Paris-Tarbes a été renouvelée jusqu’en 2026. L’Etat ayant considéré que “les types de compagnies, de clientèles et de destinations sont suffisamment différents pour ne pas constituer une distorsion de concurrence.” Donc il est peu probable que les choses bougent, quel que soit le sens du vent, avant trois ans !
Philippe MOURET