Contournement de Montpellier : Devoirs de vacances pour défenseurs et opposants…

Maquette du futur contournement ouest de Montpellier. DR.

L’enquête publique environnementale de ce barreau de 6 km qui concerne directement 70 000 personnes se tient tout le mois d’août. Le président de la CCI mobilise le monde économique qui est “pour“, dit-il. Les opposants, incarnés par le collectif AutreCom, tentent de se faire entendre dénonçant le positionnement du préfet, favorable, qui n’en fait pas mystère.

Drôles devoirs de vacances… L’enquête publique préalable à l’Autorisation environnementale du Contournement Ouest de Montpellier (Com), surprise, se tient du 28 juillet au 29 août. En plein mois du relâchement suprême ! D’ailleurs très peu de gens sont au courant. À ce jour, 865 personnes ont déposé un avis dont une grande majorité serait favorables (61,85 %). Le projet est consultable ICI.

L’impartialité du préfet remise en cause

Les opposants à ce projet, notamment le collectif AutreCom, s’enflamment (lire ci-dessous) et André Deljarry, président de la CCI de l’Hérault, échaudé par les péripéties de l’A 69, arrêtée puisréautorisée fait feu de tout bois en faveur de ce projet ! Les premiers mettent en cause “l’impartialité” du préfet du projet routier de contournement ouest de Montpellier (Com). C’est le futur tronçon manquant de 6 km censé relier l’A 709 et l’A 750. Le préfet avait défendu un certain “volontarisme” qui se traduit notamment par le fait qu’il se dit “respectueux des commissaires enquêteurs” mais qu’il garde “sa liberté vis-à-vis d’eux”. Et que ce projet, en substance, répond aux attentes des élus, du monde économique et des habitants dans leur majorité. Ambiance… De quoi laisser imaginer aux opposants que le préfet sera plus enclin à valider ce projet quelle que soit l’issue de l’enquête publique en matière environnementale.

Le projet est déjà autorisé par une enquête publique

Une première enquête publique avait eu lieu en 2020 à l’origine du feu vert administratif au projet. Cette seconde enquête publique, du 28 juillet au 29 août, précède le feu vert du préfet donc s’agissant des conditions environnementales – qui, selon le collectif AutreCom, ne seraient pas idoines, notamment compte tenu du niveau de pollution. Des dizaines d’observations ont déjà été portées. Elles se divisent en deux camps logiquement opposés : ceux qui militent pour la réalisation d’un projet déjà validé et qui améliorera la fluidité du trafic et ceux qui mettent en avant l’inutilité d’une nouvelle route, que certains apparentent même à un écocide, terme que l’on retrouve chez les opposants à l’A 69.

Le Com exige une réponse forte et unie du monde économique, de la Métropole et des territoires voisins : pour la compétitivité des entreprises, pour l’attractivité du territoire, pour l’emploi”

André Deljarry, président de la CCI 34

Pourquoi est-il important de relayer l’enquête publique environnementale ? Hyper-favorable, André Deljarry  répond : “Il est important que les chefs d’entreprise se mobilisent autour de ce projet auquel ils sont majoritairement favorables. Les dirigeants ont toute légitimité à intervenir sur cette enquête environnementale. Ils ont une expertise concrète du terrain, en raison de leurs usages, de leurs activités, de leurs interactions directes sur l’environnement (eau, sol, air, déchets, énergie). Ils peuvent fournir des données techniques précises et utiles à l’enquête. Il est important de poursuivre notre mobilisation car nous avons tendance à toujours plus entendre ceux qui sont “contre” que ceux qui sont “pour”. J’invite donc les dirigeants à déposer leurs avis avant le 29 août ICI.”

André Deljarry.

Le président de la CCI de l’Hérault précise : “Les entreprises en tant qu’acteurs économiques locaux jouent un rôle essentiel entre activité économique et l’environnement. Leurs avis, suggestions et contributions sont indispensables pour enrichir le débat et démontrer l’implication des entreprises dans le projet. Le Com exige une réponse forte et unie du monde économique, de la Métropole et des territoires voisins : pour la compétitivité des entreprises, pour l’attractivité du territoire, pour l’emploi.”

Le Com comme solution aux bouchons et à la pollution

Pourquoi le projet du COM est-il important ? “Si cet ouvrage est crucial, c’est qu’il est INDISPENSABLE”, redit André Deljarry. Et de pointer “des enjeux sont majeurs : réduire les embouteillages, améliorer la qualité de vie des habitants et faciliter les déplacements des entreprises et de leurs salariés.” Et d’ajouter : “Notre Métropole, qui accueille chaque année près de 10 000 nouveaux habitants, reste dépourvue de périphérique. Le Com permettra donc d’achever le contournement de Montpellier avec le LIEN et d’assurer une meilleure desserte de la zone urbaine de Montpellier.
La congestion actuelle n’est plus tenable, ni pour les riverains, ni pour les entreprises. En réduisant le trafic de transit et les embouteillages en centre-ville et en périphérie, le Com permettra de faciliter les déplacements et de lutter contre la pollution, avec des risques et des nuisances réduites.”

André Deljarry va sur le terrain justement de la lutte contre la pollution : “Tout le monde n’habite pas à côté de son lieu de travail, il faut tenir compte de cette réalité ! De plus, avec la congestion actuelle avec des voitures à l’arrêt, ce sont des émissions de gaz à effet de serre en plus. Ceux qui évoquent les émissions de CO2 oublient que les véhicules vont devenir de plus en plus propres au fil des années. Même si bien sûr, la complémentarité entre la voiture et les transports en communs est la clé pour bâtir une mobilité durable et efficace.” Enfin, le président de la CCI 34 assure que, “sur le volet économique, la réduction des temps de trajet favorisera incontestablement la compétitivité de nos entreprises et le bien-être de leurs salariés. Le COM, à l’image des autres grands projets d’infrastructures, est un outil au service du développement du territoire. Il en va de notre attractivité économique !”

Que pense-t-il de ces infrastructures remises en cause, comme la A 69 ? “Tout d’abord, précise-t-il, le Com n’est pas remis en cause. Au contraire, il bénéficie du soutien de tous les élus, des syndicats, fédérations et d’une grande partie de la population. ensuite, la construction d’une nouvelle infrastructure est une réelle opportunité pour nos concitoyens et pour nos activités économiques. Tel est le cas de la LGV, l’A69 ou le Contournement Ouest de Montpellier.”

“Le monde économique est pour !”

Maquette du futur contournement ouest de Montpellier. DR.

Et de conclure dans une envolée : “Lorsque l’on s’oppose à de grands projets, on met en péril le développement économique et la sécurité des citoyens. On s’oppose également à offrir aux usagers une plus large couverture du territoire ! Ce n’est pas ma vision ! Nous nous devons de penser le territoire à l’échelle du bassin de vie et pour les 20 à 30 prochaines années : pour attirer de nouveaux talents dans nos entreprises, pour contribuer à un maillage territorial équilibré et efficace en termes de déplacements et d’intermodalité, pour faciliter la connexion des autres territoires avec bassin méditerranéen. Le Com, le monde économique, est POUR sans détours !”

Nous demandons soit un report de l’enquête après le mois d’août, soit une prolongation d’un mois – jusqu’à fin septembre”

Collectif AutreCom

Du côté de l’AutreCom, principal collectif d’opposants à ce projet, c’est la soupe à la grimace. Ces cahiers de vacances, “c’est l’oeuvre de François-Xavier Lauch, préfet de l’Hérault et ancien Préfet du Tarn qui a déclaré la raison impérative d’intérêt public pour l’A69, chantier jugé illégal en première instance {mais qui a redémarré, Ndlr}, qui lance l’enquête environnementale !” Le même préfet qui avait “déclaré il y a quelques semaines, en parlant des avis de l’Autorité Environnementale et du Conseil national de la protection de la nature, que “des réserves subsistent et devront être corrigées”. Finalement, aucune des corrections majeures attendues ne nous semble possible dans des délais aussi courts ! (…) Au vu de la densité du dossier, de la période choisie, et de l’importance des enjeux pour le territoire, nous demandons soit un report de l’enquête après le mois d’août, soit une prolongation d’un mois – jusqu’à fin septembre. C’est le minimum pour permettre une participation réelle, sincère et éclairée, sans forcer les citoyens à choisir entre démocratie et congés.

“De plus en plus de mobilisation citoyenne contre ce projet. Il n’y a qu’à voir la carte de la pollution, affreuse”

Sur le fond du sujet, AutreCom, par la voix de Céline Scornavacca, affirme qu’il y a “de plus en plus de mobilisation citoyenne, de riverains, notamment contre ce projet. Il n’y a qu’à voir la carte de la pollution, affreuse. Nous avons juste repris celle de l’enquête publique mais en plus détaillé. Ce projet ne va pas résoudre les bouchons. Nous ne nions pas que pour la logistique urbaine il puisse avoir un intérêt. Mais pas à côté d’une ville. Et de 2026 à 2030, cela fera en outre quatre ans de travaux et les riverains vont en baver.”

Des lacunes pointées par l’Autorité environnementale

Maquette du futur contournement ouest de Montpellier. DR.

Plus largement, dans son argumentaire, AutreCom “se félicite du travail remarquable de l’Autorité environnementale qui, dans son avis du 15 mai 2025, met en évidence de graves lacunes dans le dossier de demande d’autorisation environnementale. Le maître d’ouvrage est prié de revoir sa copie, au nom de la bonne information du public. Ils dénoncent “un dossier non actualisé, basé sur des données de trafic anciennes, rendant les simulations peu crédibles et difficilement exploitables pour une prise de décision éclairée” ; signalant des “incongruences” dans le dossier : “Pour la bonne information du public, il ne paraît pas acceptable de maintenir sans même un avertissement une évaluation des coûts et avantages du projet dont une grande partie des éléments de calcul est caduque, et en contradiction avec d’autres parties du dossier.” Et : “Les mêmes incohérences se retrouvent concernant les consommations énergétiques, qui selon les parties du dossier seraient diminuées ou augmentées en exploitation.”

Le collectif Autre Com milite pour “un boulevard urbain à 70 km/h avec pistes cyclables

Pour AutreCom, ce dossier ne démontre pas l’adéquation du projet du Com aux enjeux locaux : “Le dossier n’apporte donc pas la démonstration qu’il répond à deux des objectifs qui lui sont fixés : contenir la circulation d’échanges périurbains et de transit sur un itinéraire adapté, afin de rendre son usage à la voirie secondaire des quartiers traversés et valoriser les accès a u réseau multimodal pour limiter le trafic routier vers le centre urbain.” Pointant que le futur Com va “augmenter les émissions de gaz à effet de serre : ces nouveaux calculs montrent à l’inverse une augmentation de 2 à 3 % des émissions de GES en exploitation du fait du projet aux horizons 2029 et 2049. Le projet occasionnerait donc des émissions supplémentaires, conséquence logique de l’accroissement des trafics occasionnés par le projet […] mais en contradiction avec le dossier des engagements de l’État d’octobre 2023.”

Suite à l’arrêt brutal de l’A 69 – qui a repris depuis – par la justice pour raisons environnementales, le président de la CCI de l’Hérault et le monde économique s’étaient mobilisés tôt pour éviter tout risque de “contagion” judiciaire pour ce barreau de 7 km prévu pour 2030. Pour Salvador Nunez, directeur opérationnel de Vinci Autoroutes, “c’est la seule solution face au casse-tête des bouchons. Et 90 % des gens y sont favorables”, nous avait-il expliqué en avril dernier. Le collectif Autre Com, qui a déposé des recours, milite pour “un boulevard urbain à 70 km/h avec pistes cyclables“.

90 % de gens qui sont favorables au com. Ils ne sont pas pour parce qu’ils aiment les Autoroutes du Sud de la France ; mais parce que c’est la seule solution financée pour répondre à leur problème”

Salvador Nunez, directeur opérationnel chez Vinci

Directeur opérationnel chez Vinci chargé de ce projet, Salvador Nunez nous expliquait le 10 avril : “C’est important parce qu’il y a eu une erreur ou un oubli historique : les deux autoroutes, pour l’une au Sud, l’ex-partie de l’A 9 et l’A 750 qui mène à l’A 75, elles ne sont pas reliées dans cette partie ouest de Montpellier. Et pour les habitants de l’Ouest de Montpellier, à part la route, il n’y a rien. Certains brament : “Le train !, le train !, le train !” Je ne suis pas contre, je le prends à titre personnel, mais dans cette zone il n’y a pas de voie ferrée ni de tramway, ni de bus express, même s’il paraît qu’il va y en avoir.” Comme Dis-Leur vous l’a expliqué ICI.

Maquette du futur contournement ouest de Montpellier. DR.

“Quand vous devez aller à Gignac… C’est la voiture. En attendant, le problème des bouchons empire. Nous, nous proposons une solution face au casse-tête de tous les matins où 70 000 à 80 000 personnes se déplacent en voiture matin et soir pour aller travailler. Les sondages que j’ai pu mener depuis trois ans par la voie de questionnaires, on arrive à 90 % de gens qui sont favorables à ce contournement Ouest. Ils ne sont pas pour parce qu’ils aiment les Autoroutes du Sud de la France ; ils sont pour parce que c’est la seule solution financée qu’on leur propose pour répondre à leur problème.”

Un coût de 300 M€

ASF s’y retrouve-t-elle financièrement parce que cette nouvelle voie rabattrait des automobilistes vers les l’A9, payante… ? “Beaucoup de gens racontent des âneries. On le fait parce que, et c’est une habitude chez ASF, de répondre positivement quand l’Etat nous demande de faire ce genre de projet. Ensuite, dès lors que l’on récupère de l’argent au travers de surpéages, on récupère notre investissement. Le “Com”, qui n’aura pas de péage, n’est pas un objectif pour grandir ou je ne sais quoi d’autre.” Salvador Nunez ajoute : “Et comme tous les oublis, cela finit par coûter plus cher. Le projet passé en 2021 avec l’Etat était de 270 M€. Il est aujourd’hui d’environ 300 M€. Qui paie ? à 100 %, les Autoroutes du Sud de la France (ASF).

Olivier SCHLAMA