Budgets participatifs : Un food truck solidaire pour les étudiants de l’académie de Toulouse

Les membres du bureau de l'Agemp qui ont imaginé ce projet. Ph. DR

Des distribution alimentaires itinérantes pour des jeunes dans le besoin : c’est le but du projet Elément’air de l’association des étudiants Agemp qui bénéficie d’une aide de 30 000 € dans le cadre des budgets participatifs de la Région Occitanie. Au-delà de cette mesure, la présidente, Léonie Chouat, milite pour une prise en charge plus juste des étudiants précaires.

Un étudiant sur cinq ne mange pas à sa faim. Face à cette statistique monstrueusement famélique, les étudiants de Toulouse de l’Agemp (Association générale de Midi-Pyrénées, représentant plus de 165 000 étudiants) ont imaginé une solution simple : un food truck solidaire qui viendra d’ici un an apporter de quoi manger aux étudiants de l’académie qui en ont besoin. Le budget de cette opération baptisée Elément’air avoisine les 90 000 € dont 30 000 € ont déjà été accordés par la Région Occitanie, après que l’Agemp eut été lauréate de ses budgets participatifs.

Lauréat des budgets participatifs de la région Occitanie

Léonie Chouat, présidente de l’Agemp, et Nadia Pellefigue, vice-présidente de la Région Occitanie. DR.

Pendant un mois, de septembre à octobre 2024, les citoyens ont voté pour leurs projets étudiants préférés parmi 30 présélectionnés. Le budget participatif Vos solutions pour la vie étudiante, doté d’une enveloppe budgétaire de 500 000 €, a recueilli plus de 10 000 votes citoyens. Parmi les projets lauréats, Elément’Air, dont la subvention a été validée le 14 février. Son but : parcourir les campus universitaires de Toulouse et d’autres villes de l’académie pour “distribuer des denrées alimentaires, des produits d’hygiène et d’entretien et des protections périodiques aux étudiants en situation de précarité. Une initiative essentielle dans un contexte où plus d’un étudiant sur deux vit avec moins de 2 € par jour”.

Ce food truck est aussi “un bon prétexte pour animer les campus, et permettre aux étudiants, bénéficiaires ou non, des distributions de rompre l’isolement et de se retrouver pour partager un moment de convivialité. Grâce à l’habilitation “Aide Alimentaire” et à son partenariat avec la Banque Alimentaire, l’AGEMP est reconnue sur le territoire pour distribuer une aide alimentaire de qualité, et répondant à toutes les normes régissant cette activité”.

Des distributions alimentaires depuis la crise du covid

Dans quel lieux, site ou campus universitaire le projet sera-t-il mis en œuvre ? Element’Air a vocation à se déplacer sur l’entièreté des campus universitaires de l’académie de Toulouse, à la fois sur Toulouse mais également sur toutes les Villes et Territoires Universitaires d’Equilibre (Albi, Auch, Cahors, Castres, Figeac, Foix, Millau, Saint-Affrique, Montauban, Rodez, Tarbes…)

Le food truck est en fabrication. DR.

“Depuis la période du covid, nous organisons des distributions alimentaires grâce à une subvention de l’Aide alimentaire et un service de l’État, la Dreets”, confie Léonie Chouat, présidente de l’Agemp, qui effectue une césure dans ses études d’infirmière pour s’occuper à plein temps des étudiants. La jeune femme suivra un master en pratiques avancées plus tard (autorisées à faire des actes et des prescriptions habituellement réservées aux médecins). “Grâce à cela nous pouvons acheter des produits d’hygiène et des aliments et les distribuer gratuitement aux étudiants en précarité qui ne paient rien. Ce sont des produits “secs” de base pour l’instant (3 kg de pâtes ou riz, cinq boîtes de conserves dont deux grosses, plusieurs plats cuisinés, des biscuits, sodas…) qui servent aux étudiants à composer eux-mêmes les repas. Et des produits ménagers (sacs poubelle, savon, papier WC). Nous allons aussi bientôt pouvoir distribuer des produits frais. Les produits d’hygiène sont, eux, distribués à volonté.

“Des étudiants qui n’arrivent pas à boucler leurs fins de mois”

Ces distributions ont lieu au moins une fois par semaine auprès d’une centaine d’étudiants leur permettent de “subsister au moins une semaine”. Avec une particularité : “Nous avons à peine 10 % à 15 % de boursiers.” C’est dû à un néfaste effet de seuil qui joue à plein : “Déjà, le système de bourses n’est pas performant, très échelonné ; et puis, il suffit de ne pas “être assez pauvre” pour ne pas en bénéficier. Les étudiants qui viennent à nos distributions sont rarement boursiers. Ce sont juste des étudiants qui n’arrivent pas à boucler leurs fins de mois.”

Ce sera comme un magasin itinérant qui proposera des denrées de base et des produits frais et locaux : des paniers maraichers mais aussi des produits de crèmerie…”

Âgée de 23 ans, Léonie Chouat, présidente de l’Agemp, complète : “Nous avons choisi le mot de food truck mais nous ne distribuerons pas des plats cuisinés : ce sera comme un magasin itinérant qui proposera des denrées de base et des produits frais et locaux : des paniers maraichers mais aussi des produits de crèmerie (oeufs, yaourts…)

Les lauréats de budgets participatifs de la Région Occitanie. Ph. Leo Arcangeli, Region Occitanie

“Là, énonce-t-elle, avec ce food truck, nous allons passer à la vitesse supérieure. Nous sortirons de l’enceinte de la ville de Toulouse. On arrive à aller à Albi ou rodez vu que nous y avons des associations adhérentes dans ces villes mais nous n’avions pas les moyens d’aller dans chacune des villes universitaires d’équilibre avec des étudiants de l’académie : c’est trop compliqué du point de vue logistique pour la chaîne du froid et plein d’autres choses. Avec ce food truck, on va pourvoir le faire ; nous sommes d’ailleurs en train de démarcher les villes d’équilibre du territoire pour une subvention. Comme nous pourrons faire des distributions plus régulières à Toulouse.”

Des projets d’intérêt collectif soutenus par la Région

Léonie Chouat confie encore : “Cet engagement m’apporte beaucoup. On voit et on vit les problématiques du monde étudiant et on apprend énormément de choses, le fait de gérer des équipes, des budgets, réaliser des projets. Ce sont des choses que l’on ne nous apprend pas à l’école.”

Le mardi 26 novembre à 17h, les 28 étudiants lauréats du budget participatif se sont réunis pour célébrer leur sélection à Toulouse en présence de Nadia Pellefigue, vice-présidente de la Région en charge de l’enseignement supérieur, de la recherche, de l’Europe et des relations internationales, et à Montpellier en présence d’Olivier Romero Gayo, conseiller régional délégué à la participation citoyenne.

Avec les budgets participatifs, la Région propose aux citoyennes et citoyens d’Occitanie de choisir eux-mêmes les projets d’intérêt collectif qui sont soutenus financièrement par la collectivité. Une fois encore, ces derniers se sont fortement mobilisés pour prendre part à cette démarche participative, en votant pour les initiatives étudiantes qu’ils ont jugé les plus utiles, intéressantes ou innovantes.

“Réforme des bourses, diminution du coût des rentrées, à la baisse des frais d’inscription dans les écoles privées”…

“Aujourd’hui plus que jamais, nous devons redonner confiance dans l’action publique à nos concitoyens, et en particulier à notre jeunesse. Chaque année, les conditions de vie des étudiants reculent et il est de notre responsabilité d’élaborer avec et pour eux des solutions concrètes adaptées à leurs besoins. C’est l’objectif de ce nouveau budget participatif“, a déclaré la présidente de Région, Carole Delga. Depuis 2019, la Région Occitanie a lancé 13 budgets participatifs, permettant ainsi d’accompagner plus de 300 projets sur l’ensemble du territoire régional, financés à hauteur de 13 M€.

L’étape suivante, c’est le restaurant solidaire…? Un peu façon du feu Petit Mickey de Montpellier…? “Je n’espère pas sinon cela voudra dire que la précarité grandit encore. Non, l’objectif est de sortir des mesures palliatives, de “pousser” autrement : de voir si au sein-même de l’université, voire du ministère de l’Enseignement supérieur, s’il y a des choses faisables pour accompagner des étudiants précaires, comme une réforme des bourses, à la diminution du coût des rentrées, à la baisse des frais d’inscription dans les écoles privées ?” Cela ressemble à de la politique…

Olivier SCHLAMA