En 2021, la récolte dans les Côtes de Gascogne avait été impactée, comme dans la plupart des vignobles européens, par la grande gelée d’avril, qui avait entraîné une diminution des volumes de l’ordre de 20 % par rapport à la moyenne quinquennale. En 2022, la baisse est malheureusement encore plus forte puisqu’elle est estimée entre 35 % et 40 %.
Les raisons de cette baisse significative, expliquent les professionnels : un “débourrement” (*) très précoce qui a exposé la vigne aux gelées noires, une succession d’orages de grêle qui, de plus, ont touché des secteurs chaque fois différents (1er juin, 3 juin, 19 juin, 16 août) et une sécheresse estivale très marquée. 2022 est ainsi la plus petite récolte depuis 1991.
Or, les vins des Côtes de Gascogne sont des vins dont on consomme le millésime le plus récent. Les petites récoltes 2021 et 2022 impactent donc les capacités conjoncturelles du vignoble sur les marchés, à la fois cette année et l’année prochaine.
Pour l’interprofession, “les indicateurs (…) s’avèrent tous positifs”
Pour contrebalancer leurs petits volumes, les opérateurs privilégient les marchés les plus rémunérateurs, comme les États-Unis, l’Europe du Nord ou la France, un pays historiquement minoritaire mais qui représente désormais la moitié des ventes.
Les indicateurs permettant d’évaluer la compétitivité du “modèle gascon” sur le long terme (valorisation du prix moyen, croissance sur les marchés les plus concurrentiels…) “s’avèrent tous positifs” selon l’IGP Côtes de Gascogne, ainsi que le souligne (lire plus bas) Olivier Dabadie, président de la scction interprofessionnelle des Côtes de Gascogne.
Des choix commerciaux qui s’imposent
Normalement supérieur aux 100 millions de cols, le potentiel commercial des Côtes de Gascogne s’est retrouvé réduit sur le millésime 2021 à 85 millions de cols. Par conséquent, les sorties de chai sont en repli sur 2022. Mais la baisse est inégale selon les marchés. En effet, les opérateurs, confrontés à des disponibilités limitées, ont favorisé leurs destinations les plus dynamiques (Belgique, Irlande) ou les plus rémunératrices, comme les États-Unis, le Danemark, la Suède, la Finlande ou… la France.
Sur ce marché national, les Côtes de Gascogne, qui étaient surtout présents en restauration, ont progessé notamment en grande distribution, tant en volume qu’en valeur, en dépit du recul observé sur les ventes de vins tranquilles dans le circuit.
Trois questions à Olivier Dabadie
C’est donc une petite vendange qui a été réalisée en 2022 ?
C’est même la plus faible des trente dernières années ! Nous, le monde paysan, sommes les premières victimes du changement climatique. Et pourtant la qualité est là grâce à un état sanitaire parfait et à des maturités optimales : les vins, les blancs notamment (69% de la production en blanc sec, 14% en banc moelleux et doux, NDLR), seront très expressifs avec des notes caractéristiques d’agrumes et de fruits exotiques, beaucoup de vivacité et un très bel équilibre en bouche.
Comment les opérateurs ont-ils adapté leur stratégie commerciale à cette situation exceptionnelle ?
Concrètement, les opérateurs sélectionnent leurs marchés afin de favoriser les plus rémunérateurs. Pour les marchés importants en volume mais qui rapportent moins, ils ont mis en place un système d’allocations, afin de préserver la relation commerciale. Car la problématique est conjoncturelle, liée à l’enchaînement de deux petites récoltes. Nos bases sont bonnes : notre positionnement en termes de rapport qualité-prix-plaisir est celui que les marchés plébiscitent et, là où les opérateurs concentrent leurs efforts, on voit que les Côtes de Gascogne progressent.
Qu’est-ce qui est fait afin de réduire l’impact de ces aléas climatiques de plus en plus fréquents ?
Nous ne nous comportons pas en spectateurs mais en acteurs. Face à la sécheresse, nous avons développé l’utilisation d’engrais organiques car ils permettent de conserver l’humidité au sol. Concernant la grêle, comme les orages arrivent de l’ouest, nous déployons, en lien avec les collectivités et les assureurs, tout un réseau de diffuseurs, dans les territoires situés en amont, afin de transformer le grêlon en pluie : c’est un système naturel qui vise à protéger la vigne, mais qui permet aussi de protéger les autres cultures, ainsi que les personnes, les toitures et les biens matériels.
Philippe MOURET
(*) Le “débourrement” correspond au moment clé du réveil végétatif de la vigne. Il marque la fin du repos hivernal. Concrètement, les bourgeons entourés de leurs écailles – la bourre – commencent à pointer le bout de leurs feuilles. Généralement, cela a lieu avec l’arrivée du printemps. Depuis quelques années, on assiste à un débourrement précoce, aux alentours du 15 mars.
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