Quel exemple pour toutes les communes de la région ! Aurélien Daloz, premier adjoint de cette commune héraultaise incroyablement inspirée, nous explique la philosophie de cette véritable transformation écologique qui commence à essaimer !
Il y a de quoi se frotter les yeux ! La commune de Montbazin, entre Sète et Montpellier (Hérault), concentre une incroyable avalanche de projets en faveur de la biodiversité. Et à ce titre elle a été désignée lauréate nationale – dans la catégorie sobriété et diversité et pour les communes de moins de 20 000 habitants – d’un concours prisé organisé par le ministère de la Transition écologique. Au total, seules sept communes toutes catégories confondues ont été lauréates.
Le but : montrer l’exemple. C’est, d’ailleurs, ce que fait Montbazin qui a déjà vu quelques un de ses projets essaimer – ou qui pourraient l’être – autour du bassin de Thau comme la Fête de la Garrigue ou la désimperméabilisation de la cour d’école pour un coût de plus de 500 000 €, cofinancés par l’Agence de l’eau, l’agglo de Sète et le département.
L’idée, c’est de donner à d’autres communes l’idée de faire pareil. Si nous, sans argent et peu de moyens humains, on arrive à ce résultat, tout le monde peut le faire”
“L’idée, c’est de donner à d’autres communes l’envie de faire pareil. Si nous, sans argent et peu de moyens humains, on arrive à ce résultat, tout le monde peut le faire”, enseigne Aurélien Daloz, premier adjoint de Montbazin, d’une équipe municipale qui avait annoncé la couleur en 2020 dans son programme électoral. “Ce qui est important pour nous également, c’est de faire participer les gens à notre projet”, dit-il. C’est aussi améliorer le bien-être. “Les gens sont contents ; ils voient une évolution et comprennent ce que nous faisons. La cour d’école, les gens se sont rendus compte que c’était pour eux que nous l’avions fait.” D’ailleurs, cela a valeur d’exemple : “Grâce à nous, des projets de désimperméabilisation de cours d’école, qui sont bien financés, se sont enclenchés dans des communes avoisinantes, à l’échelle de l’agglomération de Sète mais aussi au-delà, autour de Montpellier.”
Près de 3 M€ d’aides réunies depuis le début du mandat
Parmi les innombrables initiatives, il y en a une, phare : une “action foncière ambitieuse, une ambition que nous allons ancrer dans notre plan local d’urbanisme en pleine révision” : “Depuis sa prise de fonction, en 2020, les élus mènent une stratégie foncière d’envergure en vue de préserver le paysage et les espaces naturels.” Grâce aux “réseaux” et aux “compétences” de ses élus, à leur volonté d’aller chercher des financements comme auprès de l’Agence de l’eau pour l’école, la commune est arrivée à mobiliser, seule, beaucoup d’argent de partenaires institutionnels, “près de 3 M€ d’aides, depuis le début du mandat, ce qui ne s’est jamais vu à Montbazin”, confie Aurélien Daloz, premier adjoint de Montbazin.
“Quand on va à fond dans la transition écologique, on parle bien-être des habitants, cadre de vie, attractivité…”
Ce dernier travaille à l’Office français de la biodiversité (OFB) : ça aide pour avoir une vision d’ensemble et une bonne connaissance des circuits d’aides pour faire mieux voir se concrétiser des appels à projets. Encore faut-il suffisamment d’énergie pour aller à leur terme ! “On est aussi une équipe soudée autour de valeurs ; je vois encore trop d’élus esseulés…” Aurélien Daloz souligne : “On va à fond vers la transition écologique et quand on va à fond là dedans, on parle bien-être des habitants ; on parle cadre de vie ; attractivité de la commune et on travaille aussi par la même occasion sur les risques.”
42 hectares acquis par la commune
Ainsi, pour éviter du lotissement à tout crin, de la cabanisation, pour mieux ouvrir les paysages et faciliter le maintien de la biodiversité, “à travers divers dispositifs, 42 hectares ont été acquis à l’amiable ou via le droit de préemption et préservés sur le long terme, avec l’appui du Conservatoire d’espaces naturels d’Occitanie qui va les gérer sur 99 ans. C’est dans ce cadre que certaines parcelles revivent aujourd’hui avec différentes activités mises en place via des conventions avec la commune (oléiculture, élevage…) Ces usages permettent de maintenir une mosaïque de milieux diversifiés, favorables à la nature, tout en limitant l’embroussaillement et le risque incendie”.
Pas de nouveaux lotissements à Montbazin
Là aussi, les élus sont pragmatiques : pas de nouveaux lotissements. Pour autant, on n’envoie pas les accédants à la propriété dans d’autres communes. “Notre priorité est de regarder ce qui est possible en densification urbaine ; cela ne veut pas dire que l’on ne veut pas accueillir de nouveaux habitants mais de les accueillir mieux que ce qui avait été le cas avant. On a déjà beaucoup de lotissements. On se rend compte que l’offre en pavillons-jardins est énorme par apport à ce qui se fait ailleurs. En revanche, des petits logements pour les personnes âgées, les jeunes couples, on en manque. Tout en restant dans l’enveloppe urbaine existante.”
Importance de la faune nocturne
Autre action phare : l’extinction de l’éclairage public. “Grâce à son Atlas de la biodiversité communale des garrigues, explique la commune, Montbazin a rapidement identifié l’importance de la faune nocturne sur son territoire : amphibiens, chauves-souris mais aussi pollinisateurs que sont les papillons de nuit. La municipalité a adopté l’extinction de l’éclairage public en cœur de nuit fin 2021 et la rénovation du parc d’éclairage public en cours permet de remplacer les points lumineux les plus énergivores de la commune. Tout cela est favorable à la faune nocturne mais aussi à la santé humaine. De plus, la consommation liée au parc d’éclairage public est passée de 210 MWh en 2021, à 72 MWh en 2023, matérialisant une réduction de plus de 65 %.”
Désimperméabilisation et végétalisation de la cour d’école : un cas d’école !
Ce n’est pas tout. Il y eut tout aussi importante la désimpermébilisation et végétalisation des cours d’école la plus ambitieuse de France : “7 500 m² de surface ont été déconnectés du réseau d’eaux pluviales, limitant ainsi le risque d’inondation dans le village. Un projet intégré qui allie la création d’un îlot de fraîcheur et la rénovation énergétique réalisée dans les bâtiments. Et quand il pleut, l’eau qui s’accumulait sur ces 7 500 m2 ne dévalent plus dans les rues car nous avons créé un bassin de rétention”, reprend Aurélien Daloz.
Cette école a bénéficié de la plantation de 900 végétaux dont 60% de la marque Végétal Local dont des plantes vivaces, des arbustes et de nouveaux arbres : chêne vert, tilleul à feuille en cœur, érable de Montpellier, pistachier lentisque, immortelle commune, romarin, lavande, thym, ciste cotonneux, myrte, amélanchier, filaire... Mieux encore : “Le bois utilisé provient d’un rayon de moins de 300 km. Les lampadaires boules ont été remplacés par des Led à détecteurs de présence en façade des bâtiments.”
La mare sert de support pédagogique
Et encore : la mare qui récolte les eaux de pluie est équipée d’une pompe permet d’irriguer l’ensemble des espaces plantés. La mare sert de support pédagogique : demi-journées d’animation qui s’inscrivent dans la continuité de l’ABC, réalisation de fiches animations pour une utilisation en autonomie par les enseignants ou les agents du centre de loisirs, l’ensemble proposé par le CPIE. Crapaud calamite et rainette méridionale y ont été observés comme le cortège des odonates pionnières, et les hirondelles qui viennent s’y abreuver et y chercher la boue nécessaire à leurs nids. “La végétation autour de la mare (semences de la marque Végétal local proposées par le CEN Occitanie dans le cadre du projet européen Interreg Sudoe “Fleurs locales”) est laissée en libre évolution, et aucune plante hélophyte n’a été plantée.”
“L’équipe municipale s’est construite autour de valeurs partagées, dont la transition écologique ; nous travaillons beaucoup sur la transformation écologique”, précise l’élu. Cette commune de 2 928 habitants a aussi décidé le gel de l’ensemble des opérations d’urbanisme, même celles programmées jusque-là. D’abord pour se donner le temps de connaître finement faune et flore grâce à un atlas de la biodiversité.
“Maillon important de connexion écologique entre le Massif d’Aumelas et la Montagne de la Gardiole”
Le jury de ce concours a d’ailleurs bien résumé les enjeux : “La moitié de sa superficie est concernée par deux sites Natura 2000 et la présence de deux Znieff de type II et de trois Znieff de type I.” Dans ce cadre, le travail partenarial a permis la protection d’une des très rares stations d’Ophrys bombyle (Ophrys bombyliflora), une orchidée considérée comme menacée en Méditerranée et protégée à l’échelle nationale, ou encore du Lézard ocellé, le plus grand lézard d’Europe. Concernant le maintien de l’activité agricole sur son territoire communal, le diagnostic agro-écologique a mis en lumière l’enjeu de transmission de l’activité agricole, une grande majorité des agriculteurs ayant plus de 55 ans.” N’en jetez plus !
Montbazin est aussi concernée par neuf plans nationaux d’action passés ou en cours : pie grièche à poitrine rose, pie grièche méridionale, pie grièche à tête rousse, aigle de Bonelli, Faucon crécerellette, chiroptères, outarde canepetière, lézard ocellé, papillons de jour. “Ce territoire est également un maillon important de connexion écologique entre le Massif d’Aumelas et la Montagne de la Gardiole, deux massifs possédant des compositions floristiques et faunistique équivalentes. L’enjeu est de maintenir en bon état de conservation la garrigue avec des strates de végétation variées, entretenue par le pastoralisme. Au niveau de la plaine agricole, l’intérêt se porte sur les prairies, les ripisylves et les bosquets.”
Olivier SCHLAMA
Faune nocturne exceptionnelle dont Eteobalea dohrnii
L’ABC a permis de collecter 2 180 données supplémentaires sur les chauves-souris (un chiroptérologue de la LPO a mené des prospections avec analyse des ultrasons recueillis). Le minioptère de Schreibers a notamment été recontacté. Il s’agit d’une espèce menacée (classée vulnérable sur la liste rouge). Sa conservation revêt un enjeu de conservation très fort sur le territoire.
De plus, ont été aussi détectés le Petit Murin et le Molosse de Cestoni, deux espèces à enjeu fort de conservation. Sur 16 animations réalisées à Montbazin (sorties nature et inventaires participatifs) dans le cadre de l’ABC, cinq ont porté sur la faune nocturne, en partenariat avec le CPIE Bassin de Thau : amphibiens, chouette chevêche, grand-duc d’Europe et deux sur les chauves-souris.
Au total, 82 personnes ont suivi des animations à la découverte de la faune nocturne, qui ont été l’occasion de revenir sur les actions menées (extinction et adaptation des éclairages). Les inventaires citoyens ont en outre permis la découverte de Eteobalea dohrnii (microlépidoptère jusqu’alors inconnu pour l’Hérault, avec moins de 10 mentions en France) et du Calosome de Madère, rare coléoptère (60 mentions en France) visible la nuit. Ils ont aussi été menés par l’intermédiaire d’une enquête participative diffusée dans les boîtes aux lettres, l’Enquête chauve-souris !