Le panorama national des associations établi tous les six ans par la sociologue Viviane Tchernonog, confirme une tendance forte : les grandes associations aspirent l’essentiel des subventions publiques et des financements privés. Les petites structures, elles, se multiplient à l’envi : on enregistre plus de 200 000 nouvelles associations entre 2011 et 2017 qui, faute de rentrées d’argent suffisantes, s’appuient davantage sur les bénévoles et les produits dérivés pour boucler leurs budgets. Ces enseignements seront détaillés lors du FNAT (Forum national des associations et fondations), ce mercredi 17 octobre 2018, à Paris.
Amorcée depuis plus de douze ans, la tendance se confirme en profondeur dans le nouveau panorama des associations dressé par Lionel Prouteau et la sociologue Viviane Tchernonog, du centre d’économie de la Sorbonne, à Paris. Il émane d’un ouvrage : Le paysage associatif français – mesures et évolutions. Ce secteur se divise en deux deux pôles diamétralement opposés. Ce résultat ainsi que les autres riches enseignements sont très attendus, surtout en terme de budgets. Ils doivent officiellement se dévoiler aujourd’hui, 17 octobre 2018, au Forum national des associations et des fondations (FNAT), à Paris, la grand-messe annuelle du secteur où doit s’exprimer notamment l’ancien président de la République François Hollande.
De grandes associations de moins en moins nombreuses et de plus en plus grosses sous l’effet de concentrations”
Viviane Tchernonog, sociologue
D’un côté, on trouve de très grandes associations qui mettent en oeuvre les principaux thèmes des politiques publiques à travers la gestion d’équipements publics : maisons de retraite, foyers pour handicapés, prévention de la délinquance, les réseaux d’aides ménagères, le secteur médico-social, etc. Elles “aspirent” l’essentiel des subventions publiques et “l’essentiel des financements privés” pour réunir leur budget. Ces grandes associations sont de moins en moins nombreuses et de “plus en plus grosses, notamment sous l’effet de concentrations”, souligne Viviane Tchernonog.
“Les petites associations gèrent des budgets de plus en plus petits”
De l’autre, on assiste à une “effervescence, une vivacité” des petites voire très petites associations sans aucun salarié, “gérant des budgets de plus en plus petits”. Ces micro-associations qui croissent de façon importante en nombre et constante montrent la volonté de démultiplier les initiatives citoyennes. “Elles animent la vie locale et les quartiers. “Elles expliquent à elles seules la création nette de quelque 200 000 associations supplémentaires entre 2011 et 2017″, précise Viviane Tchernonog. Mais, leur financement public, est “epsilonnesque”.
Elles font davantage participer les usagers aux budgets des associations”
Comment font-elles pour s’en sortir ? “Ces petites associations -dont 75 % gèrent un budget de moins de 10 000 euros – ne sont pas spécialement pauvres. Elles fonctionnent autrement pour boucler leurs budgets ; elles ont pour la plupart à coeur de ne pas augmenter leurs cotisations annuelles, par philosophie, pour que leur accès soit le plus populaire possible et, plus prosaïquement, pour ne pas décourager les adhésions. En revanche, elles recherchent davantage de bénévoles (ce sont elles qui concentrent le plus le bénévolat), et vendent des produits dérivés pour faire davantage participer les usagers au budget de l’association. Un club de volley vendra par exemple des tenues de sports, des survêtements, des ballons, etc.”
On compte au total 1,5 million d’associations en France contre 1,3 millions en 2011. Soit 33 300 associations de plus chaque année dû à la croissance importante donc des petites structures.”
“On compte au total 1,5 million d’associations en France contre 1,3 millions en 2011. Soit 33 300 associations de plus chaque année dû à la croissance importante donc des petites structures.” Mais seules 10,6 % (159 000), les plus grosses, en légère baisse, sous l’effet d’une concentration, emploient des salariés, les autres s’appuient exclusivement sur des bénévoles (1). Toutes prises ensemble, les associations représentent un budget total de 113 milliards d’euros annuels, dont 20 % proviennent des aides et subventions publiques contre 34 % en 2011. “On enregistre une baisse importante des financements publics, convient Viviane Tchernonog. La seule marge de manoeuvre pour les petites associations, c’est que leurs usagers “achètent” un service.”
Ces 113 milliards d’euros contribuent à hauteur de 3,3 % du PIB. Mais compte tenu de l’inflation “le poids économique des associations a stagné”.
Sport, nature, loisirs représentent 69 % de ce secteur
Voilà les principaux enseignement de cette étude unique en France menée depuis deux ans. Mais ce panorama recèle bien d’autres enseignements. On y apprend par exemple que parmi les petites associations, celles qui promeuvent du sport, de la culture ou des loisirs représentent 69 % de ce secteur ; que les associations militantes, de défense des droits sont stables, à 11,5 % ; les associations humanitaires représentent 14 % de l’ensemble des associations mais “23% des associations “employeuses”.
Problématique des emplois aidés
S’agissant enfin des emplois aidés que le gouvernement a décidé de presque tous supprimer il y a un an, Viviane Tchernonog dit : “Cette problématique trop récente n’apparaît pas encore sur cette étude. Dans les colloques auxquels je participe, ce n’est pas la question qui vient en premier. Contrairement à la baisse des aides publiques…”
Olivier SCHLAMA
(1) En 2017, les associations ont bénéficié de 31 272 000 participations bénévoles représentant un volume de travail bénévole de l’ordre de 1,425 million d’emplois en équivalent temps plein. Ce qui est considérable, si on le rapporte au volume de travail salarié dans les associations (1,6 millions). Les associations sans salarié concentrent 85 % du nombre des participations bénévoles et 72 % du volume total bénévole dans le secteur associatif.
Panorama : “Les petites associations gèrent des budgets de plus en plus petits”