Avec l’arrivée de néo-ruraux, peut-on parler d’un choc des cultures au sein des mondes agricoles et ruraux ? Comment se manifeste-t-il ? A quelles innovations donne-t-il lieu ? Quelles en sont les origines, comment le dépasser ? Comment accueillir les alternatives et l’altérité en préservant l’identité et l’habitabilité du territoire ? Le 6 février, 250 participants seront amenés à échanger sur ces thématiques. et réfléchiront ensemble aux grands enjeux actuels.
Le projet “Retour à la Terre et Choc des Cultures” explore l’impact de l’arrivée de ces néoruraux et néo-agriculteurs dans les campagnes. À travers une enquête d’un an, menée dans le Massif Central, les Pyrénées et la Thessalie (Grèce) il s’agissait d’analyser “les processus d’acculturation réciproque entre les nouveaux arrivants et les populations locales.”
Ce projet, porté par l’association Back To Earth -en partenariat avec Le Cube Consultants, l’Agence des Pyrénées, l’Institut d’Auvergne-Rhône-Alpes de Développement des Territoires et Terra Thessalia-, bénéficie du soutien du Réseau Rural National, du ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire, ainsi que de l’Union européenne.
“Plus d’un agriculteur sur deux est âgé de 50 ans ou plus”
Et on constate qu’il est loin le temps où Michel Delpech pouvait chanter “on dirait que ça te gêne de marcher dans la boue…” (Le Loir-et-Cher, 1977). Les ex-citadins, devenus néo-ruraux en veulent, eux, de la boue ! En effet, 57% des urbains aimeraient quitter la ville, mais “ce retour reste freiné par les questions de l’emploi, de la mobilité, de l’éducation et de l’accès au foncier et aux services.”
“Les néo-paysan.ne.s représenteraient chaque année environ 30 % des installations agricoles” souligne Valéry Rasplus (Les néo-paysan.ne.s comme facteurs de changements ?, AgriGenre, mars 2024).
On a si souvent opposé les citadins faisant le choix d’un retour à la terre et les agriculteurs du crû, à travers quelques “affaires” souvent caricaturales, que l’on en a oublié qu’il s’agit d’un vrai sujet. Car en 2019, en France, l’Insee comptait environ 400 000 agriculteurs exploitants, soit 1,5 % de l’emploi total (7,1% en 1982 !). En baisse régulière de 1,5 à 2% chaque année… Et, toujours selon l’institut de la statistique, “plus d’un agriculteur sur deux est âgé de 50 ans ou plus.”
La moitié des agriculteurs partira à la retraite d’ici 10 ans ! Comme le précise Florian Grenon (Carenews Info) “relancer le métier passe par l’accueil de néo-paysans, qui représentaient déjà 62,4 % des nouveaux agriculteurs en 2018, selon Yannick Sencébé chercheuse à l’Inrae et enseignante en sociologie rurale à Agrosup Dijon.”

Des nouveaux venus aux compétences différentes
Les néo-paysans peuvent donc constituer un atout pour redynamiser les campagnes. Mais attention, pas n’importe comment. “Leur intégration et leurs liens notamment avec les agriculteurs peuvent aussi bien être fluides que problématiques, souligne Emmanuelle Coratti (Back To Earth et UMR Territoires). Comment leurs projets sont-ils accueillis dans les territoires ? Comment les impactent-ils ? Leurs pratiques font-elles évoluer celles des agriculteurs de souche et inversement leurs projets sont-ils influencés par les spécificités et les pratiques territoriales ?”
Cette spécialiste précise : “Notre association et notre recherche étudient depuis plusieurs années le “retour à la terre” d’urbains en reconversion. Si le phénomène est encore de l’ordre du signal faible, un nombre croissant de néo-agriculteurs s’installent dans les territoires ruraux et y renouvellent les approches environnementales et productives, venant ainsi faire évoluer les dynamiques territoriales. Non issus du monde agricole, ces nouveaux installés venus des villes, apportent des compétences issues de précédentes vies professionnelles et des pratiques agroécologiques, leur reconversion s’inscrivant dans un projet d’engagement environnemental et de changement de vie au service du Vivant.”
Découvrir plus : https://www.backtoearth.fr/post/quelle-contribution-du-retour-a-la-terre-a-la-transition-agroecologique-des-territoires
Chercheurs, agriculteurs, associations, entrepreneurs, élus… 250 participants attendus à Lourdes
“Il faut concevoir autrement aujourd’hui nos territoires, dans leur capabilité, leur autonomie et leur capacité à faire de la place en reliant mieux les énergies. Et le tout dans une démocratie locale et éclairée ! Cela implique de s’organiser et d’en avoir le goût pour développer une autre culture de l’accueil et de la cohabitation. S’il faut encore convaincre les populations, c’est plus largement un écosystème de l’accompagnement des nouveaux habitants qu’il faut mettre en place”, commente pour sa part Jean-Yves Pineau (Les Localos) qui sera présent à Lourdes le 6 février.
Plus : https://www.backtoearth.fr/post/les-nouveaux-defis-des-politiques-d-accueil
Le 6 février prochain, à Lourdes (Hautes-Pyrénées), les 3es Rencontres nationales du retour à la terre et de l’avenir des territoires – Retour à la terre et choc des cultures ? proposeront justement “une journée pour comprendre, s’inspirer et rencontrer chercheurs, territoires, porteurs de projets, monde agricole, associations, structures d’accompagnement.”
Lors de cette journée, chercheurs, agriculteurs, associations, entrepreneurs, grands groupes, porteurs de projets, financeurs ou encore élus locaux seront amenés à échanger sur ces thématiques. et réfléchiront ensemble aux grands enjeux actuels. L’association Back To Earth partagera notamment les résultats de l’enquête terrain réalisée en partenariat avec l’Agence des Pyrénées.
On y attend 250 participants ; un colloque, du networking, un atelier d’intelligence collective, une scène de pitchs, la restitution des 8 mois d’enquête… Découvrez le programme et inscrivez-vous sur https://www.rnrtt.fr
Philippe MOURET
Jeudi 6 février – de 9h à 19h. Espace Robert-Hossein – 19 avenue Alexandre-Marki, à Lourdes (Hautes-Pyrénées).
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