Les Archives départementales ont accueilli durant neuf semaines Lilie Pinot en résidence. Elle a pu ainsi s’immerger dans les fonds d’archives gersois relatifs à l’immigration italienne… L’artiste photographe Matthieu Rosier l’a accompagnée dans cette recherche. Il explore le format du documentaire subjectif en se concentrant sur des thématiques liées aux identités, à la mémoire, à l’histoire, sa réécriture et sa transmission. Ce projet a vu le jour grâce au dispositif “Regards sur collection” porté par Occitanie Livre & Lecture.
Parmi les fonds proposés par les Archives départementales, Lilie Pinot et Matthieu Rosier ont choisi d’explorer celui consacré à l’immigration italienne dans le Gers, en écho à l’histoire familiale de Lilie, et à l’intersection de leurs axes de recherche partagés (territoires, identités, mémoire, Histoire…). Ce fonds riche est composé de documents de contrôle (permis d’entrée sur le territoire, de cartes de séjour…), de recensements quinquennaux et de plusieurs ensembles photographiques conservés aux Archives départementales du Gers qui ont permis aux artistes de s’immerger dans les années 1920-1940.
“Comprendre une part de mon histoire familiale”
“En partant en résidence à Labastide-Rouairoux pour travailler sur l’histoire de
l’industrialisation textile dans le Tarn, j’ai appris […] que j’avais été retenue pour la résidence dans le Gers sur l’histoire de l’immigration italienne. J’étais ravie. […] Pour mes grands-parents, il a fallu s’intégrer ; alors ils ont effacé leur langue maternelle et les histoires de l’Italie. Aujourd’hui, me plonger dans la grande histoire de l’immigration italienne, c’est aussi comprendre une part de mon histoire familiale”, explique Lilie Pinot.
Photographe-plasticienne de formation, Lilie est diplômée de l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles. Ses travaux “sont empreints d’une réflexion autour de l’usage de la photographie, de l’expérimentation de ses contraintes, de la trace et de l’utilisation d’archives photographiques. Elle éprouve un rapport à la matière dans son processus de création d’image, par la réalisation de transfert photographique. Elle s’engage à bras-lecorps pour obtenir des traces de celle-ci…”
La complicité avec Matthieu Rosier, co-fondateur de VOST
Elle a choisi d’associer à sa résidence et à ses recherches sur l’esthétique de la trace l’artiste-plasticien-vidéaste-documentariste Matthieu Rosier, dont le travail d’auteur se concentre sur le storytelling au travers de reportages et de documentaires d’investigations au long court. Ses sujets abordent la question de territoires intimes ou géographiques, d’identités et de communautés. Matthieu Rosier et Lilie Pinot ont co-fondé en 2012 le collectif d’artistes VOST.
Durant la résidence, s’est dessiné au fur et à mesure un triptyque d’exposition : “Des histoires de terre – Storie della terra.” À Lombez, dans une première exposition “À l’ombre des fleurs – All’ombra dei fiori”, des images d’immigrés italiens viennent s’inscrire sur les piliers en brique qui soutiennent la halle (photo ci-contre). L’image se superpose ainsi en transparence à la matière emblématique des constructions du sud-ouest.
Cette exposition interroge le récit de l’intégration “réussie” : certes les Italiens venus dans le Gers depuis le nord de la Péninsule (Piémont, Frioul entre autres) ont fait souche grâce à la musique, au rugby, aux collectifs agricoles, à la proximité de la langue occitane avec leurs propres parlers. Mais il y a aussi, refoulé, le récit plus sombre, la face douloureuse de l’exil : les injonctions des contrôles administratifs, les incompréhensions, les rejets. All’ombra dei fiori, comme le dit la chanson Bella Ciao, la vie était rude aussi.
Le soutien d’Occitanie Livre & Lecture
Les deux autres expositions prennent place à Auch, aux Archives départementales du Gers. Sur le parvis, quatre stèles photographiques sont comme un hommage aux Italiens, venus travailler la terre. À l’intérieur, à la manière d’un journal suivant
chronologiquement l’histoire, une exposition retrace l’utilisation des documents et images d’archives dans le processus créatif de Lilie Pinot et Matthieu Rosier.
Ce projet a bénéficié du soutien du dispositif “Regards sur collection” (*) conduit par Occitanie Livre & Lecture, en partenariat avec la Maison des Écritures de Lombez et les Archives départementales du Gers.
Le Gers : https://www.gers.fr/
Philippe MOURET
Entrée libre et gratuite; Tout public. Jusqu’au 27 septembre, du lundi au vendredi : 9h00-12h30 / 13h30-17h00.
(*) L’ambition de “Regards sur collection” est d’offrir un regard neuf sur le patrimoine écrit, son territoire et son histoire. En savoir plus : https://www.occitanielivre.fr/residence-patrimoine-regards-sur-collection
Maison des écritures, à Lombez
La Maison des écritures est un lieu de résidence, qui reçoit, les artistes-auteurs de
l’écrit. Ils trouvent à Lombez un appartement et des conditions propices à l’avancement de leur projet : ils sont rémunérés et un programme concerté d’interventions leur permet de faire connaître leur travail, d’en éprouver le partage avec leurs lecteurs, de nourrir la vie littéraire du département.
C’est un lieu d’expérimentation de médiations en faveur du livre, de la lecture et de toutes les écritures. Un terrain de jeu, d’invention, de croisement, d’hybridations, sur les territoires ruraux du Gers en priorité. Dans ce lieu d’innovation culturelle et sociale, on aime tenter les croisements de pratiques, fédérer et catalyser les initiatives en faveur du livre et de la lecture, pour tous les publics, à tous les temps de la vie, dans un esprit d’éducation populaire dont l’Éducation Artistique et Culturelle est l’héritière.
Six à huit autrices et auteurs sont accueillis en résidence de création chaque année, 30 artistes ont été accueillis en 2023, 2 000 personnes touchées par ses actions. Dont 600 scolaires. https://www.maison-ecritures.fr/
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