Mèze : L’étang de Thau, piscine naturelle pour apprendre à nager… gratuitement aux enfants !

Cours gratuits natation à Mèze. Ph. DR.

Grâce à l’intelligence collective, la cité conchylicole, qui n’a pas de piscine, arrive à offrir aux enfants de la commune quatre semaines de stages gratuits. Pertinent à l’heure où, malgré les dispositifs nationaux, on a compté en France, à l’été 2023, plus de 1 300 noyades dont plus de 400 mortelles.

L’étang de Thau, formidable terrain de jeux. Terrain de “je”. À Mèze, on connaît toute la richesse séculaire de cette lagune unique de 7 500 hectares où poussent les meilleures huîtres de l’Hexagone et où se déroule le Thau Swim Trek pour les plus grands.

Savoir nager figure dans les attributs évidents à acquérir pour tout Mézois. Mais la cité du Boeuf, tout aussi conchylicole qu’elle soit, ne dispose pas de piscine pour l’apprentissage de la natation. Le maire, certes davantage jouteur que crawleur, n’en connaît pas moins l’impérieuse nécessité pour sa jeunesse. Élu en décembre 2021, Thierry Baeza dit : “Nous avons mis en place des cours gratuits l’été pour nos jeunes de 4 ans à 10 ans. Ces cours avaient existé il y a quelques années. Puis, abandonnés. C’était dommage. Il y a une demande. Quand je suis devenu maire, apprenant que Caroline Aubertin était aussi maître-nageur, je lui ai demandé d’organiser cela.

Les familles se pressent pour inscrire leur enfant

Ph Ville de Mèze.

Il existe des dispositifs d’Etat mais il faut pouvoir accéder à une piscine et à des créneaux. Cet apprentissage, à Mèze, dans une zone naturelle se rencontre rarement. Aucune commune autour de l’étang de Thau n’a, par exemple, repris cette initiative qui profite, par ailleurs, aux enfants d’autres communes proches de Mèze, comme Loupian ou Bouzigues.

Cette année, ces cours gratuits, très courus dans l’étang, débutent le 2 juillet et finissent le 2 août. Ainsi depuis trois ans, les familles se pressent pour inscrire leurs bambins. Mèze n’a pas de piscine. “Jusque-là, les enfants de Mèze allaient à partir de la classe de 6e à Bessilles mais elle n’est pas couverte…” Depuis quelques mois, ils disposent du joli bassin de Gigean. Mais les cours d’été sont maintenus dans l’étang de Thau. “Parce qu’il n’en émerge que du positif.”

“Chaque été, nous apprenons à nager à environ 80 jeunes”

À l’image des jeunes Sétois qui avaient eux-mêmes appris à nager dans les canaux, avant l’avènement du chlore et des lignes d’eau enfermées, “chaque été, nous apprenons à nager à environ 80 jeunes, explique Caroline Aubertin, soit 16 jeunes par semaine.” L’opération se déroule sur cinq semaines, sur simple inscription. Une semaine maximum par été et par jeune. “Sur une semaine, c’est une bonne chose, cela permet d’avancer et de progresser ; je fais deux groupes, le premier de six à huit ans ; le second de huit ans à dix ans”, dit la maître-nageuse.

“Une classe de 6e sur trois ne sait pas encore nager”

Ph. Ville de Mèze.

À la fois prof de natation en auto-entreprise et agent municipal au service commerce, Caroline Aubertin ajoute, en substance, que ce projet est gratifiant pour tous. “J’ai longtemps été cheffe de bassin à Bessilles, et j’ai pu constater qu’une classe de sixième sur trois qui ne sait pas encore nager !” Ce projet d’apprentissage dans l’étang est donc une offre permettant de mieux mettre à profit l’apprentissage en classe de sixième. “Avant ce projet, je n’avais jamais fait de cours de natation dans l’étang de Thau. Quand j’ai commencé, je m’étais dit “ça va être chaud” mais finalement, non. C’est différent. Les enfants peuvent avoir une appréhension du milieu naturel ; avoir peur des algues, de la faune et la flore présentes ; l’eau salée ; la visibilité. Mais c’est hyper-riche et ils progressent hyper-vite. Ensuite, quand ils vont à la Plagette avec leurs parents, grands-parents et amis, tout le monde voit leurs progrès. Ce n’est que du plus.”

“Ces cours gratuits sont très prisés”

Quelques lignes sont ainsi jetées dans l’étang. Un projet qui ne coûte finalement pas grand-chose. L’élu aux sports et conchyliculteur, Nicolas Archimbeau renchérit : “Ces cours gratuits sont très prisés, notamment pour des enfants de 4 ans à 6 ans. On a même réduit par rapport à la première année où nos cours étaient accessibles à tout le monde. Loupian, Villeveyrac… On avait même des enfants de Fabrègues ! Cela prenait trop de place. Notre priorité, c’est nos petits Mézois. Et, s’il reste des places, on en fait profiter les enfants des villages avoisinants.” C’est aussi un coup de pouce financier aux familles.

Au collège, le “niveau est catastrophique”

Une professeure d’EPS à Mèze va plus loin : “Actuellement et depuis le retour des vacances d’avril tous les 6e du collège de Mèze vont à Bessilles pour 2 heures de natation hebdo. Mais il n’y a pas de natation pour les 5e, 4e, 3e”, constate-t-elle. Elle relève quelques chiffres “terribles” : “Dans deux classes de 6e, où je fais cours, on a enregistré six et huit enfants non nageurs ! Sans oublier ceux qui flottent et nagent mal, sans technique… Le niveau est catastrophique.” Elle ajoute : “Notre besoin : des cours de natation aussi à 11 ans et 12 ans…”

Plus de 1 300 noyades durant l’été 2023 en France dont plus de 400 ont été mortelles

Au cours de l’été 2023, plus de 1 300 noyades ont été recensées dans l’Hexagone, selon l’enquête de l’INVS !  Parallèlement à ce triste record, il y a de plus en plus de piscines. L’un et l’autre sont liés. La pratique de la nage est en trompe-l’oeil. Les compétitions promettent des champions mais des millions de Français ne savent pas nager… L’enquête de l’Institut de veille sanitaire est claire : près de 30 % des 1 300 situation de noyades au cours de l’été 2023 ont entraîné un décès. Précisément, entre le 1er juin et le 30 septembre 2023, 1 336 noyades ont été enregistrées dont 361 suivies de décès, soit 27 % (versus 24 % en 2021).

Ph. Ville de Mèze

Les adultes représentent la population la plus concernée par les noyades (55 % des victimes de noyades, contre 30 % de moins de 6 ans et 15 % de 6 ans-17 ans) et celle chez qui les noyades sont plus souvent suivies de décès (44 % chez les adultes contre 3 % chez les enfants de moins de 6 ans).

Un tiers des décès par noyade chez les mineurs a lieu en piscine privée

La mer est justement le lieu où le nombre de noyades suivies de décès est le plus important (45 % des décès), suivi par les cours d’eau (23 %), les piscines privées (15 %) et les plans d’eau (14 %). La moitié des décès par noyade chez les adultes a lieu en mer tandis qu’un tiers des décès par noyade chez les mineurs a lieu en piscine privée.

Enfin, deux-tiers des noyades et plus de la moitié des décès se concentrent dans cinq régions côtières : Provence-Alpes-Côte d’Azur, Occitanie, Nouvelle-Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes et Bretagne. La proportion de noyades suivies de décès en piscine est plus importante dans les régions du sud-est (Paca, Occitanie, Corse), qui concentrent un nombre important de piscines, par rapport aux autres régions.

Olivier SCHLAMA

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