Égalité : À Voix Égales, ce concours d’éloquence qui veut faire entendre la voix des femmes

Ce n’est pas un gadget. Et c’est une première en France : un concours d’éloquence est lancé par le rectorat de Montpellier auprès de toutes les femmes fonctionnaires, de l’Education nationale, des hôpitaux ou des collectivités. Pour leur donner l’élan de briser un plafond de verre et rejoindre les hommes dans leur progression professionnelle. sous le haut patronage du ministre de l’Education nationale, Pap Ndiaye.

Vous pouvez vous époumoner, cette fois, vous serez entendue ! Pour la première fois, une académie, celle de Montpellier, organise un concours d’éloquence, réservée à toutes les femmes fonctionnaires (Education nationale, hôpitaux, collectivités), joliment baptisé A Voix Egales.

“Il suffit de déposer sa vidéo sur le site A voix Egales…”

Le principe est simple (1) : “Il suffit, que l’on soit titulaire ou pas, de déposer sa candidature sur un site créé spécialement pour ça avant le 22 décembre 2022. Nous incitons les candidates à utiliser les réseaux sociaux pour tenter de gagner les dix séances d’accompagnement d’un coach spécialisé dans les RH”, souligne Sophie Béjean, rectrice de l’académie de Montpellier qui compte 46 000 personnels, dont 35 000 enseignants.

Se mettre en avant, repousser ses limites

Certains pourraient y voir un paradoxe majeur de poster une vidéo de 180 secondes pour évoquer un projet personnel alors que, justement, on n’ose pas dans le quotidien professionnel à prendre la parole, se mettre en avant, se mettre en scène. A repousser ses limites. Ce serait aller vite en besogne. Rectrice de l’académie de Montpellier depuis deux ans, Sophie Béjean a à coeur l’égalité, y compris professionnelle, entre les femmes et les hommes même si, à première vue, le ministère de l’Education nationale est majoritairement féminin.

Oui, il y a parité entre recteurs et rectrices et 83 % des enseignantes du secteur public sont des professeures des écoles mais elles n’ont pas la même progression de carrière

Sophie Béjean, rectrice de l’académie de Montpellier

Explication d’une situation en trompe-l’oeil, quelque peu sournoise, même : “Oui, il y a majoritairement des femmes dans nos professions, abonde Sophie Béjean ; les trois-quarts des personnels sont des femmes ; oui, il y a parité entre recteurs et rectrices et 83 % des enseignantes du secteur public sont des professeures des écoles mais elles n’ont pas la même progression de carrière.Plus le niveau de responsabilité est important, moins les femmes sont nombreuses à l’exercer.

Dans l’encadrement supérieur, à peine 40 % sont des femmes

Le plafond de verre ou le “tuyau percé” est parfois difficile à identifier. Sophie Béjean précise : “On compte, ainsi, moins de 53 % de femmes agrégées ; pour le niveau de responsabilités, c’est la même chose : elles représentent à peine 42 % des personnels au statut A + (chef de service, chef d’établissement…) Et pour l’encadrement supérieur, à peine 40 % sont des femmes.” En clair, “les femmes évoluent moins vite ; elles sont beaucoup longtemps adjointes d’un chef d’établissement ; et quand elles dirigent un établissement, c’est plus souvent un collège qu’un lycée.”

“Politique volontariste” menée depuis des années

Comment explique-t-elle cette situation, la rectrice, alors qu’elle elle-même une femme entourée d’une DRH “femme” ? “Le problème est plus large, dit-elle. Il y a un besoin d’accompagnement personnalisé pour les agentes pour que certaines retrouvent un niveau de confiance en soi”, souligne Sophie Béjean. La rectrice de l’académie de Montpellier ajoute avoir mené depuis plusieurs années une “politique volontariste” en la matière et, notamment, “mis en place dans la politique de ressources humaines un plan d’égalité professionnelle à Strasbourg où j’étais en poste auparavant”. Et elle fait de même à Montpellier qui s’appelle “feuille de toute pour l’égalité professionnelle”, à lire ICI. “L’idée c’est de retrouver une certaine confiance en soi, d’aider les femmes à s’exprimer en public, entre autres. Et qu’elles osent…”

Sous le haut patronage du ministre Pap Ndiaye

Sophie Béjean, rectrice de l’académie de Montpellier. Ph. Olivier SCHLAMA

C’est dans ce contexte que Sophie Béjean a favorisé ce concours d’éloquence, organisé sous le “haut patronage du ministre de l’Education nationale, Pap Ndiaye, et qui bénéficie d’une aide financière du ministère de la Transformation et de la fonction publiques. “C’est original. C’est une première en France qui s’adresse aux personnels d’Occitanie mais aussi à toutes les femmes fonctionnaires en France. La ville de Montpellier a réagir favorablement et rapidement et d’autres structures publiques aussi.”

Ce qui a changé, c’est que les hommes soutiennent cette cause ; nous avons les hommes à nos côtés et les choses progressent…”

De façon plus générale, Sophie Béjean pense que “les choses progressent, peut-être encore trop lentement. L’important, c’est cette égalité et que nous ayons une représentation de la société telle est. Et c’est aussi une question d’efficacité. Ce qui a changé, c’est que les hommes soutiennent cette cause ; nous avons les hommes à nos côtés et les choses progressent…”

“Briser le plafond de verre..”

Coach, Rania Kacimi, chef du projet A Voix égales, du rectorat de Montpellier.

Coach et formatrice, qui accompagne le rectorat sur ce projet, Rania Kacimi, qui fut fonctionnaire, “formée en coaching en 2014”, remet du contexte : “Ce projet, qui a été imaginé par la DRH du rectorat, Alma Lopes, s’inscrit dans la continuité de la feuille de route en ressources humaines qui consiste à innover, à mettre en route des projets nouveaux et plus agiles que ceux qui sont d’habitude mis en place dans la fonction publique. A vite émergé une volonté de monter en compétence en matière d’éloquence et, pour les femmes, briser le plafond de verre.”

“Un engouement pour justement oser mettre en place ce genre de projet”

Elle ajoute : “On se rend compte que les femmes, pour des raisons culturelles ou par simple manque de confiance en soi, occupent des postes moins élevés, plus précaires ; elles sont plus souvent contractuelles que les hommes, par exemple. Notre rectrice a fait, du coup, de l’égalité professionnelle, une priorité. D’où ce concours qui a deux objectifs : permettre aux femmes fonctionnaires de l’académie de valoriser leur projet et pour celles qui n’ont pas encore confiance en elles de parler de ce sujet.” Rania Kacimi dit noter “un engouement pour justement oser mettre en place ce genre de projet”. 

Plus largement, il y a pas mal d’initiatives dans le domaine de l’égalité professionnelle mais est-ce que la cause avance au rythme du nombre de ces projets ? Rania Kacimi dit : “Non, je ne crois pas. La société est en train de se remettre en question. On apporte notre pierre à l’édifice, à la justice professionnelle.”

Olivier SCHLAMA

  • (1) L’égalité professionnelle femmes-hommes a été consacrée Grande cause nationale par le président de la République. L’académie de Montpellier s’est mobilisée et a établi une feuille de route RH proposant des leviers vers une égalité professionnelle plus solide. Le concours À voix égales s’inscrit dans le cadre de cette politique d’égalité. Il est ouvert à tous les personnels féminins de la fonction publique, exerçant en France ou au sein d’établissements francophones AEFE et labellisés, quelles que soient les filières d’emploi, toutes catégories confondues.
  • Chaque candidate a la possibilité d’envoyer une vidéo d’éloquence via le site A Voix égales mettant en avant son projet professionnel ou ses souhaits d’évolution. Les 5 lauréates gagneront des séances de coaching personnalisées pour mener à bien leur projet.
  • Les candidates ont jusqu’au 22 décembre pour déposer une candidature vidéo exprimant leur projet professionnel en 180 secondes. Les 5 lauréates bénéficieront d’un accompagnement sur mesure sous forme de 10 séances de coachings chacune pour tenter de mener ce projet.
Infographie