Banque “verte” : “À la banque Pop’, pas question de greenwashing…”

Les (néo)banques sont spécialistes du “ripolinage” verdissant leurs produits pour coller aux besoins de leurs clients. À la Banque Populaire du Sud, coopérative engagée dans l’ESS depuis un siècle, on explique que la démarche est sincère et “légitime d’accompagner ses clients vers la transition énergétique”, en phase avec l’ADN de la banque qui a déjà créé trois e-agences à Nîmes, Montpellier et Perpignan. Et qui va aussi lancer en 2022 une enveloppe spécifique de 30 M€.

De plus en plus de Français veulent une finance éthique. Comment épargner autrement ? L’offre existe mais elle est peu lisible. Une étude Ifop pour le Fir (forum pour l’investissement responsable) montre que 46 % des Français sont prêts à demander un produit d’investissement socialement responsable mais seulement 5 % s’en sont vu proposer.

“Stop au greenwashing des livrets d’épargne !”

Suivant la même logique, mais au niveau financier, les citoyens refusent là aussi le coup de peinture écolo“Stop au greenwashing de nos livrets d’épargne !” : c’est l’intitulé de la pétition lancée par Eva Sadoun, co-présidente du mouvement Impact France (des structures engagées dans la transition sociale et écologique de l’économie) à l’adresse du ministre de l’Economie et déjà signée par près de 15 000 personnes.

“Urgence climatique et sociale”

La chef d’entreprise (!) dit d’emblée dans son texte : “Je milite depuis plusieurs années pour que l’épargne soit utilisée en faveur d’une économie qui protège, qui prend soin de notre environnement, et qui lutte contre la précarité. Et comme plus de 24 millions de français, j’ai voulu ouvrir un Livret développement durable et solidaire dans ma banque. J’ai découvert qu’au moins 70% des sommes versées sur ces livrets ne financent pas le développement durable et solidaire.” Évoquant “l’urgence climatique et sociale (…) En fait, il y a beaucoup de greenwashing.”

Loi Pacte, épargne salariale, PEE…

La loi Pacte va, par ailleurs, dans le bon sens avec le succès des fonds solidaires dans le cadre de l’épargne salariale que l’employeur doit proposer à ses salariés via le PEE (Plan d’épargne d’entreprise) depuis 11 ans. Une disposition a été adoptée pour imposer pour qu’il y ait obligatoirement un fonds socialement responsable dans tout contrat d’assurance vie ouvert dès 2020.

Jean-Philippe Dubar, Banque populaire du Sud. DR.

Justement, Jean-Philippe Dubar se défend de tout greenwashing. Le directeur du marché AESSI (marché des associations, de l’économie social et solidaire et des institutionnels) qui chapeaute les trois premières agences dématérialisées de la BPS (à Montpellier, Nîmes et Perpignan) de la Banque Populaire du Sud (BPS) plaide pour la sincérité de la démarche d’une banque régionale responsable dotée d’un ADN “coopératif et mutualiste”.

Parrainage et agro-forestation

Pouvons-nous lui accorder ce crédit ? “La BPS qui compte 500 000 clients ne veut pas rester les bras croisés face au défi qui nous concerne tous, dit celui qui gère la démarche sociétale de la banque, celui de la transition énergétique et que nous souhaitons accompagner les projets éco-responsables de nos clients sur notre territoire comme nous le faisons depuis plus de 100 ans, tout en nous adaptant à leur nouveaux besoins et leurs nouvelles préoccupations avec ce nouveau modèle d’agence spécialisée.”

Jean-Philippe Dubar : “La garantie de notre démarche est apportée par le fait que nos clients parrainent de nouveaux clients. On a mis en place un système de parrainage, même si on peut venir spontanément dans l’une de nos e-agences. Là, le parrain n’a pas une ristourne sur sa carte bleue ou une autre offre de bienvenue. On a lancé un partenariat avec une société, Agroof, qui s’occupe d’agroforestation.”

“À chaque fois que quelqu’un nous parraine un client nous finançons la plantation d’un, deux ou trois arbres pour toute ouverture de compte. Nous avons beaucoup de comptes d’associations à la BPS, plus de 12 500, dont certaines sont très engagées dans la préservation des océans, de la nature… On en a ciblé deux par département de sorte qu’un client qui ouvre un compte chez nous, plutôt que de lui vendre une CB à demi-tarif, on lui propose de verser cet argent-là, 50 €, à l’une de ces deux associations.”

Une enveloppe de 30 M€ vers la transition énérgétique

Il ajoute : “Notre volonté, c’est vraiment “d’apprendre en marchant” vers cette démarche ; on va même créer un club avec des sociétaires green. Avec ces derniers, on va co-construire : on va leur demander qu’attendez-vous de nous pour que l’on soit la banque éco-responsable avec laquelle vous avez envie de travailler ? On veut créer un modèle différent. On ne pourra jamais empêcher les ONG de nous tirer dessus à boulets rouges. Ceci dit, si les banques ne jouent pas leur rôle ; si on n’arrive pas à rapprocher l’économie de l’écologie, on n’avancera pas. Notre ambition, c’est que les clients qui viennent dans ces nouvelles agences nous aident à faire évoluer notre modèle.”

La BPS dit avoir une piste d’amélioration dans son plan stratégique 2022-2024 : “L’engagement c’est d’engager a minima, en 2022, une enveloppe de 30 M€ aussi bien envers les particuliers que les professionnels vers la transition énergétique. Et de faire à l’avenir beaucoup plus : d’accompagner un client sur trois dans cette transition.”

Nous avons un conseiller par agence spécialisé dans cet accompagnement versé dans la transition énergétique de nos clients. On mise aussi sur une écoute différente des clients”

Jean-Philippe Dubar

Ces trois agences baptisées Pop Green ont vu le jour très récemment : Nîmes, en septembre 2019 (davantage tournée vers les particuliers), Montpellier (plutôt orientée vers les professionnels, artisans, commerçant, PME, start-ups) et Perpignan fin mai 2021. Elles s’adressent aux particuliers, professionnels, start-ups, associations qui ont un projet et une approche développement durable et éco-responsable. “Pour l’instant, nous fonctionnons au bouche-à-oreille pour développer ce marché. Nous avons actuellement 250 clients qui sont de nouveaux clients. Nous avons un conseiller par agence spécialisé dans cet accompagnement versé dans la transition énergétique de nos clients. On mise aussi sur une écoute différente des clients.”

“Faire en sorte qu’il y ait un maximum de transparence sur “le fléchage” de ces fonds vers des projets vertueux…”

Que propose la BPS de plus ou de différent par rapport que les autres banques davantage portées sur un ripolinage ? “Déjà, les Banques populaires ont créé il y a de cela quelques années, un livret le Codévert, dont les fonds servent à refinancer des projets dans le développement durable. Ce livret est plus vertueux qu’un livret de développement durable classique ; cela dit, nous allons faire en sorte qu’il y ait un maximum de transparence sur “le fléchage” de ces fonds vers des projets vertueux. Pour autant, en tant que banque régionale, 90 % de notre épargne est réinvestie dans la région. Nous ne finançons pas des projets hors territoire. Mais je ne peux pas vous dire que 90 % de nos fonds vont à ce jour des projets écoresponsables.” 

Prêt mobilité et prêt rénovation énergétique

Dans le même temps, sont apparues de plus en plus nombreuses néo et e-banques (Crédit coopératif, Mona banque, Nickel, Axa, Ing, Boursorama…) La Banque Populaire a lancé, de son côté, créé ces e-agences Pop Green. Mais qu’offre concrètement de plus la BPS face à une abondante concurrence ? “Nous offrons de la compétence et de l’expertise. La transition énergétique, on le voit auprès des particuliers, c’est un vrai casse-tête. Quand on a de la rénovation de bâtiment à faire ; que l’on veut acheter un véhicule plus propre, on ne sait pas comment bénéficier des primes ; ni vraiment comment ça se passe au niveau des travaux, de l’achat, etc. Nous avons des collaborateurs formés. Nous proposons aussi une gamme de prêts. On a créé un prêt mobilité qui sert à financer l’achat de tous les véhicules électriques, de la trottinette jusqu’à la Tesla (de 1 000 € à 75 000 €) ; un prêt rénovation énergétique. Et avec des conditions tarifaires privilégiées. Et un taux intéressant : jusqu’à cinq ans, on est en moyenne à 1 %”

Des prêts bientôt pour les professionnels

La plupart de ces 250 clients sont venus vers ces agences Pop Green avec un projet de financement “pour acheter un véhicule propre ou qui avaient un projet de rénovation énergétique chez eux”. “Pour les professionnels, nous sortons dans quelques semaines une gamme de quatre prêts. Pour changer, par exemple, sa flotte de véhicule, un chef d’entreprise aura droit à un prêt mobilité spécifique avec des tarifs plus intéressants que dans une agence classique ; pour des travaux, idem, il y aura un prêt dédié. On ne s’est pas donné d’objectif de clients. Ce que l’on veut, justement, ce n’est pas d’être dans un schéma traditionnel. On est dans une démarche affinitaire.”

Olivier SCHLAMA

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