L’Union des associations du tourisme social – plus de 700 000 vacanciers en 2024 en Occitanie – qui représente 212 colonies, centres de vacances, etc., réunit ses adhérents jusqu’à jeudi à Sète dans un contexte où le secteur “tire la langue” à cause de la hausse générale des coûts. Au coeur de ce séminaire, des points forts : la place de l’IA, les séjours éco-responsables, la gestion de l’eau et la rénovation des centres.
Benoît Hamon s’en alarmait en juin dernier dans nos colonnes : “La santé de l’économie sociale et solidaire ESS est extrêmement précaire.” La branche tourisme de l’ESS, le tourisme social et solidaire, n’y échappe pas. Payer à son enfant un séjour en colonie de vacances pour 10 jours, cela frôle les 1 000 € (hors transport), contre 750 € il y a quelques années. La raison ? Les centres sont pris en tenailles par des coûts qui ont explosé à cause de la mise aux normes des établissements et les salaires.
212 refuges, colonies, campings, centres de vacances ou sportifs, résidences de tourisme…
Ainsi, une famille au Smic avec de trois enfants, sans aide – qui n’a pas augmenté – de la Caisse d’allocations familiales (CAF), “ne peut pas leur offrir de vacances actuellement”, plaide Laurent Orlay, directeur général de l’Unat en Occitanie, la branche tourisme de l’ESS qui représente un cinquième de cette économie dans notre région. Au travers de 212 structures : refuges, colonies, campings, centres de vacances ou sportifs, résidences de tourisme, etc., ce sont aussi quelque 170 000 enfants de familles modestes qui ont pu partir cette année dans l’une de ces structures. Dont, grâce à ses soutiens que sont Région Occitanie, SNCF ou encore la CAF, 2 200 enfants dans le cadre du dispositif “Premier départ”.

Ce secteur du tourisme social en Occitanie représentait en 2024, selon les tout derniers chiffres de l’Unat (Union nationale des associations de tourisme), 1 700 équivalents temps plein et quelque 10 000 contrats ; plus de 700 000 vacanciers ; 3,2 millions de nuitées. Sans oublier plus de 300 M€ de retombées économiques sur le territoire dont 50 M€ de dépenses des vacanciers. Parmi les grands noms du tourisme social : VVF, Cap France, Mileade, Les villages Clubs du Soleil, l’UCPA, La Ligue de l’Enseignement.
L’IA pour libérer les salariés des tâches répétitives
C’est dans ce contexte d’importance économique et sociale et de fragilité du secteur que l’Unat organise jusqu’à jeudi au Lazaret, à Sète, son séminaire annuel réunissant associations – gestionnaires ou pas – d’établissements. Avec l’idée-force sous-jacente de gagner des parts de marché ou du moins de ne pas en perdre. Parmi les points importants qui seront abordés, l’incontournable IA (Intelligence artificielle). Qui, dans ce secteur, va sans doute s’imposer chez les professionnels afin qu’ils soient plus réactifs et plus efficaces. Et que l’IA libère les salariés de tâches répétitives.
Cela passe par l’automatisation des relations avec les clients au travers du traitement automatisé de certaines tâches : les réponses à apporter aux avis des vacanciers, par exemple ; l’envoi d’emails, etc. “Nous sommes sur la recherche de gains générés attendus”, précise Laurent Orlay, directeur général de l’Unat Occitanie. “C’est aussi pouvoir générer des contenus marketing ; autrement dit comment mieux vendre les séjours ; être plus facilement accessible. Et aussi ce que l’on oublie souvent : comment répondre aux nouvelles attentes des clients.”
Mieux répondre aux nouvelles attentes des clientèles

Ceux-ci ont de plus en plus tendance à interroger l’IA pour les conseiller dans un choix de séjour. Exemple d’un client qui se dit : “Je veux venir en Occitanie où je cherche une destination un peu fraîche au mois d’août parce qu’il y a souvent la canicule ; que ce ne soit pas loin de la mer ou d’un point d’eau. Je souhaite que mon séjour soit éco-responsable, défendant des valeurs. Eh bien, comment nos professionnels cherchent, en s’appuyant sur l’IA, créer des contenus qui mettent en valeur tout ce que l’on fait.” Et aujourd’hui, ce sont des robots qui parlent à des robots, des chatbots, que les vacanciers vont interroger. “L’idée est de sensibiliser nos adhérents à se familiariser avec l’IA pour qu’elle devienne un outil pour décharger les équipes des tâches répétitives et laisser du temps pour les contacts humains.” Et créer des séjours davantage personnalisés. Aller sur l’IA, c’est aussi une façon d’être référencé et d’être proposé in fine aux clients.
Pour ce faire, l’Unat a demandé à un spécialiste, Vivian Vidal, d’intervenir lors d’un atelier ce mercredi. Là aussi, il s’agit de lever des freins de ceux qui n’ont pas encore utilisé l’IA, soit pas inappétence soit par manque de temps. Et d’absence de mode d’emploi. “Il y aura aussi la présentation des différents outils existants pour libérer les salariés des taches répétitives.” L’enjeu, c’est aussi et surtout mieux identifier et répondre aux nouvelles attentes des clientèles.
Vers davantage de séjours éco-responsables

Autre point important qui sera abordé : la transition écologique. “Cela fait de nombreuses années que nous développons cet engagement ; nous avons même une charte au niveau national. Là aussi, les choses s’accélèrent. Comme pour l’IA. Et particulièrement dans notre région très fortement touchée par les pics de chaleur ou des canicules et de longues périodes de sécheresse. On s’aperçoit que certains vacanciers ne franchissent pas encore le pas d’un séjour vraiment éco-responsable, ce qui signifie de se passer de voiture, par exemple. L’idée est de créer et de proposer des séjours éco-responsables associant une mobilité décarbonée et douce- l’enjeu c’est de proposer des packages associant transports, activités et hébergements.” Il s’agit aussi de sensibiliser les acteurs à faire des travaux en vue d’économiser l’énergie.
“Impulser quelque chose pour qu’un maximum de nos séjours aient cette empreinte, cette marque”
Laurent Orlay illustre son propos avec l’exemple d’un “Parisien qui n’a pas de véhicule. Comment le séduire pour venir depuis la gare Montparnasse à Paris jusqu’à Sète ? Et lui proposer à son arrivée un transport en navette, avec un système de conciergerie possible, à telle heure pour arriver à son village de vacances. Et, ensuite, du village, seront mis à sa disposition tous les horaires des transports en commun ou de mobilités douces – vélos, véhicules électriques… pour visiter les alentours et limiter l’empreinte carbone sur notre territoire. Nous aimerions y amener un maximum d’opérateurs. Qu’il y ait de la demande ou pas, l’idée, c’est d’impulser quelque chose pour qu’un maximum de nos séjours aient cette empreinte, cette marque. On a aussi demandé au CRTL d’intervenir pour présenter notamment l’Occitanie Rail Tour.”
“Accompagner les centres dans leur réflexion de rénovation”

Troisième temps fort, “dans le cadre d’un partenariat avec les agences de l’Eau Adour-Garonne et Rhône Méditerranée-Corse à amener nos adhérents à une meilleure gestion de l’eau sur l’ensemble des treize département de la région”, ajoute Georges Glandières, vice-président de l’Unat. “Au-delà des actions de sensibilisation, précise Laurent Orlay, c’est de les accompagner dans leur réflexion de rénovation, de modernisation voire de travaux dans leur établissement, refaire les canalisations, par exemple, dans cette même dynamique de proposer des séjours éco-responsables.”
Le tourisme social et solidaire “tire la langue” économiquement, confie encore Laurent Orlay. “Et la situation politique actuelle n’arrange pas les choses. On a certes ressenti un regain post-covid mais depuis 2023 nous sommes à nouveau dans une baisse. Ce que confirment les premiers chiffres de 2025. On est sur une forte baisse cette année.” Les raisons ? Un puissant effet de ciseau.
Quand les coûts explosent…
Laurent Orlay explique que “la baisse du pouvoir d’achat des Français et la hausse de la masse salariale” jouent dans cette baisse. Ce secteur est aussi fragilisé dans le même temps par “la hausse des coûts, le recul des aides publiques et les difficultés d’autofinancement pour rénover le patrimoine. Les villages de vacances et tous les établissements sont impactés par leur mise aux normes et, en plus, ils sont obligés de maintenir un niveau d’accueil et d’hébergement constant. Et ces coûts-là ont explosé et les aides à la pierre ont disparu. Or, dans le même temps, il y a une quasi-disparition des aides publiques. Et les emprunts augmentent. Au final, le gestionnaire est obligé d’augmenter le reste à charge pour le vacancier. Et comme les aides baissent aussi pour les bénéficiaires, ils sont moins nombreux à partir. Et le nombre de français – 40 % selon l’Observatoire des inégalités – qui ne peuvent pas partir en vacances va forcément augmenter.
Sans oublier le défi du réchauffement “avec plus de 35 nuits par an au dessus de 30 degrés en Occitanie, d’ici 2050 avec 72 % de nos hébergements collectifs touchés. Il faut donc des travaux d’isolation ; se doter de pompes à chaleur, etc. Il nous faut, à l’Unat, dans ce cadre répondre à des appels à manifestations de l’Ademe, de l’agence de l’Eau pour identifier des dispositif pour que chaque gestionnaire puisse en bénéficier et diminuer la part des familles”.
Olivier SCHLAMA
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