La pénurie de ces spécialistes, à l’heure où l’excès de soleil fait des ravages, touche singulièrement l’Occitanie qui présente une situation parfois catastrophique dans des départements comme l’Aude, où l’attente est la seconde plus longue en France. Même dans l’Hérault ou la Haute-Garonne, des dermatos continuent de travailler après leur retraite ! Manque de spécialistes formés, place plus importante de l’esthétique, nomadisme médical… Le syndicat professionnel tire la sonnette d’alarme.
Brûlures d’un soleil toujours plus ardent ; psoriasis ; acné ; cancer… La peau, c’est la barrière entre soi et le monde. Selon le numéro spécial de 60 Millions de consommateurs sur la peau, pas moins de 15 millions de Français souffrent d’une maladie cutanée dont la moitié renonceraient aux soins… faute de dermatologues. À l’heure où “les cancers de la peau pourraient constituer le cancer le plus fréquent en France (…) Ils sont attribuables dans plus de 85 % des cas à une exposition excessive aux ultraviolets naturels ou artificiels (…) Chaque année, entre 141 200 et 243 500 cas sont disgnostiqués. Le constat de Santé publique France est sans appel.
En fonction des départements, l’attente est rédhibitoire (à peine 1 % des ados consulteraient un dermato) : dans notre région, il faut compter 40 jours en moyenne dans l’Hérault et la Haute-Garonne ; 58 jours dans le Gard ; 58 jours dans le Tarn et même 70 jours dans les P.-O. et 77 jours dans l’Aude également presque le triste record de France des 80 jours d’attente de Saône-et-Loire ! Le temps d’attente moyen dans l’Hexagone ? 49 jours ! Ce qui va à l’encontre de toute politique de prévention. Et rend les messages de la profession inaudibles.
Dermatologie, secteur médical en souffrance

De tous les secteurs de santé, la dermatologie est celui où les effectifs ont le plus diminué, passant de 5 dermatologues à 3,5 pour 100 000 habitants rien qu’entre 2000 et 2022 et même 3,4 pour 100 000 habitants en Occitanie. Et ce n’est pas près de s’améliorer : les praticiens en exercice vieillissent et ceux qui approchent de la retraite même s’ils consultent encore sont loin de combler un déficit creusé. Tout le monde le déplore, le numerus clausus à cause duquel il n’y a pas assez de nouveaux diplômés n’existe plus mais il a fait de gros dégâts. “Le ministère de la Santé prévoit ainsi que 2 770 dermatologues seront en exercice en 2030, contre plus de 4 000 en 2006”, explique le magazine. Une analyse que l’on peut retrouver ICI dans le panorama établi en 2024 par Emmanuel Vigneron, géographe de la santé.
Ces données ont été collectées par 60 Millions – qui a travaillé avec Doctolib, sur les années 2021 à 2023, en retirant les départements avec moins de 5 dermatologues. Ils ne prennent pas en compte tous les patients qui abandonnent leurs recherches. Autre précision, l’Aude est bien le second département le plus en souffrance de l’Hexagone mais il y a un biais : les patients d’autres départements voisins qui sont dépourvus de dermatos peuvent allonger la liste d’attente.
Toulouse, Montpellier voisine des déserts médicaux
La situation est inégale parmi les treize départements d’Occitanie. À la retraite également mais en prolongation d’activité un jour par semaine depuis dix ans dans un cabinet de groupe à Toulouse Roland Viraben, 75 ans, est vice-président du Syndicat des dermatologues (SNDV). Il dit, depuis son lieu de villégiature à Narbonne-plage : “Dans l’ex-Midi-Pyrénées, il y a environ 120 dermatos en exercice. La région de Montpellier a le même problème que Toulouse avec une concentration de spécialistes voisinant des déserts médicaux, comme la Lozère. Il y a aussi des départements qui ont eu des augmentations de population rapides, comme les P.-O., et qui ne peuvent pas faire face.”
“Il y a aussi, en France, la pression des patients qui veulent se faire payer par la Sécu des consultations esthétiques…”

Autre exemple, en Ariège, il y a zéro dermato, reprend Roland Viraben. C’est catastrophique. Pour tout le Tarn-et-Garonne, il y a deux mi-temps de dermato à l’hôpital et un seul à Montauban en libéral. Le Gers ? Il n’y en aura bientôt plus du tout ; j’ai connu une époque où il y en avait une dizaine… Et nous avons, à Toulouse, beaucoup de patients qui viennent d’Agen et du Lot-et-Garonne.” Le spécialiste insiste : “Il faut observer ce qui se passe dans d’autres pays. Il y a encore moins de dermatos en Angleterre et en Allemagne et pourtant leurs systèmes de santé n’est pas en péril. Ou alors il faut un système payant comme en Suisse… Car il y a aussi, en France, la pression des patients qui veulent se faire payer par la Sécu des consultations esthétiques…”
Roland Viraben pointe l’un des chevaux de bataille, défendu par un autre Toulousain et médecin comme lui, Philippe Douste-Blazy, qui fut ministre de la Santé. “Le dossier médical a été une très bonne chose mais cela n’a pas ensuite été suivi. On attache à la carte de Sécu le dossier médical pour avoir une visibilité de tout le passé médical du patient et on repère facilement les gens qui consultent trop souvent. Ce fameux nomadisme médical et le consumérisme sont catastophiques pour la profession.”
Imbécile et dévastatrice tendance du burn line
À l’heure du burn line, tendance Tik Tok imbécile et dévastatrice – où des jeunes s’exposent volontairement aux brûlures du soleil pour obtenir des marques de bronzage – où la menace du mélanome plane au-dessus des acharnés du bronzage, les messages de prévention ne touchent personne. Qui a entendu parler de la seconde Journée de dépistage gratuit des tumeurs cutanées, le 3 juin dernier…?
Sans oublier que les jeunes et les biens portants a priori ne consultent pas ; que les crèmes solaires, pour celles qui sont efficaces, sont trop peu utilisées (il faut se badigeonner toutes les deux heures et utiliser au moins 10 % de son tube par journée d’exposition ou lieu d’un tube par été). Et pour cause : parfois c’est le prix d’un bon morceau de viande… Alors que le mélanome, lui, progresse, touchant de plus en plus de jeunes…
Dans ce contexte, la seule solution, c’est, pour ceux qui ont besoin de soigner leur peau d’un eczéma ou autres champignon et affections cutanées, qu’ils ont ramenés des vacances, d’agiter leur réseau de relations. C’est le cas dans cette ville héraultaise où un dermato, pourtant à la retraite, continue à travailler presque tous les jours. “J’ai même gardé mon assurance professionnelle”, confie un dermato qui réclame l’anonymat. Prenommons-le Jean-Paul.
Il faut que les généralistes soient davantage sensibilisés lors de leurs études et, qu’après, ils accèdent à des formations des diplômes certifiants, ne serait-ce que savoir utiliser la dermascopie, l’imagerie cutanée”
Jean-Paul, dermatologue à la retraite… Et toujours actif…
Il y a encore une paire d’années, ce même dermato, déjà retraité, effectuait des remplacements dans un cabinet de dermatologie mais presqu’exclusivement tourné vers l’esthétisme, celui des lèvres à repulper ou de la graisse fessière à ôter, qui rapportent bien plus d’argent à ces spécialistes que le traitement d’une mycose… Las, Jean-Paul consulte dorénavant – et gratuitement – à la terrasse d’un bar…! Ou chez lui. Montrant les quatre à cinq demandes par SMS chaque jour de ses nouveaux “amis” soudain auxquels il a bien du mal à répondre… Qui de lui envoyer une photo de sa peau attaquée ; qui de lui demander un conseil…
La raison ? Jean-Paul, ce dermato qui souhaite rester anonyme se justifie : “Je ne supporte plus que les patients subissent autant d’attente !”, dit-il, serment d’Hippocrate chevillé au corps. Ce qu’il voit le plus ? “Des mélanomes (et de plus en plus chez les jeunes) et cancers de la peau, notamment. La trop longue exposition au soleil en est souvent la cause et comme la population vieillit, eh bien, les gens ont beaucoup pris le soleil. Chez les jeunes, on voit beaucoup des problèmes d’acné. Ma génération ne prenait aucune précaution, c’est vrai”, mais, aujourd’hui, il milite pour de “massives campagnes de sensibilisation sur les méfaits de l’excès de soleil”. Lui, s’il a un doute, il envoie le patient chez un confrère en activité.
Parmi les solutions qu’il défend, il y en a au moins une, simplissime : que “les médecins généralistes soient davantage sensibilisés lors de leurs études et, qu’après leurs études, il le soit encore et accèdent à des formations donnant lieu à des diplômes certifiants, ne serait-ce que savoir utiliser la dermascopie”. L’imagerie cutanée.
“Pour 2025-2026, seulement 102 postes de dermatologues validés dont à peine 5 pour Montpellier et Nîmes…”

Comme Jean-Paul, septuagénaire, d’autres toubibs pratiquent cette même “résistance” au service des patients. Tout en scannant fiévreusement les Pages jaunes des professionnels de santé, les Français espèrent ainsi débusquer un bon tuyau de l’une de leurs connaissances pour un petit passe-droit… Juste pour se soigner ! Jean-Paul a mené sa petite enquête citant le Journal officiel du 30 juillet dernier : “La société française de dermatologie tire la sonnette d’alarme : pour 2025-2026, seulement 102 postes de dermatologues ont été validés dont à peine 5 pour Montpellier et Nîmes”, soit 300 000 habitants et 150 000 habitants… Et c’était encore moins, à peine 94, il y a deux ans. Jean-Paul, notre dermatologue, pointe donc “évidemment le trop faible nombre de postes octroyés aux dermatologues” mais aussi le fait qu’il y a des “spécificités à cette profession : beaucoup sont des femmes et elles ont plusieurs vies à mener de front ; pas mal de ces spécialistes se sont tournés vers l’esthétisme”.
“Enormément de patients consultent pour rien”
À la retraite également mais en prolongation d’activité, un jour par semaine, depuis dix ans, dans un cabinet de groupe à Toulouse, Roland Viraben, 75 ans, est vice président du SNDV. Il dit, depuis son lieu de villégiature à Narbonne-plage : “Je me refuse d’avoir des délais d’attente trop importants. En revanche, je ne prends que des patients envoyés par des généralistes. Normalement, c’est obligatoire. Il ne faut pas être manichéen : il y a pas ceux qui ont raison et ceux qui ont tort. Un peu trop facilement, on dit : “c’est la faute aux pouvoirs publics qui n’ont pas assez donné de postes de dermatos. C’est vrai et ce n’est pas vrai. Il faut répartir la charge entre Etat, les hospitaliers, les dermatos et les patients. Mais les patients, il ne faut pas en parler, ce n’est pas politiquement correct.”

Les patients viennent-ils souvent pour rien…? “Enormément“, répond Roland Viraben. Pourquoi ? “J’ai le recul de 50 ans d’exercice. A cette époque-là, il y avait beaucoup de dermatologues. Il y avait deux voies de formation. L’internat classique, la voie royale, qui offrait très peu de postes qui étaient prestigieux : 20 internes par an à mon époque pour toutes les spécialités médicales et chirurgicales. Et, souvent, on passait par le Certificat d’études spéciales que l’on faisait après le doctorat de médecine sur trois ou quatre ans. Qui déversait sur le marché énormément de dermatos.”
Le spécialiste rappelle “qu’en ce temps-là, la dermatologie était très prisée : les deux premiers de l’internat pouvaient faire cette spécialité et qui avait une aura sur les autres collègues médecins. Dans le Tarn-et-Garonne, par exemple, où il n’y a aujourd’hui qu’un seul dermato, il y en avait sept, en comptant Montauban et les villes avoisinantes. Il y avait une incroyable concurrence et chaque dermato essayait de s’attirer une clientèle à tel point que les patients, encore aujourd’hui, nous disent : “j’étais le patient de tel ou tel dermato qui est à la retraite.”
Il faudrait que tout le monde retourne à sa place, c’est-à-dire que la médecine esthétique ne soit pratiquée que par des praticiens qui ne font que ça. En revanche, tout ce qui est à la limite soit pris en charge par les généralistes”
Roland Viraben, vice-président du syndicat des dermatologues SNDV
Alors, oui, Roland Viraben consent à dire que les soins esthétiques se sont développés mais “ils correspondent à une demande. La problématique de la médecine esthétique dépasse les dermatos. Elle peut être pratiquée, largement, par des chirurgiens plasticiens et également les ORL, les gynécologues et les généralistes. De plus en plus de généralistes se spécialisent. Il faudrait que tout le monde retourne à sa place, c’est-à-dire que la médecine esthétique ne soit pratiquée que par des praticiens qui ne font que ça. En revanche, tout ce qui est à la limite soit pris en charge par les généralistes. Un généraliste peut très bien s’occuper des verrues par exemple. On donne de mauvaises solutions de faire des DU, diplômes d’université de dermato, pour un généraliste qui est formé en deux mois et qui se place la filière de soins comme un vrai dermato, avec les mêmes tarifs”.
“Au moins dix ans à quinze ans pour combler la pénurie”
La disparition du numérus clausus “aidera mais c’est trop récent, pose Sophie Coisne Reda, rédactrice en chef de 60 Millions de consommateurs : il faudra au moins dix ans à quinze ans pour combler la pénurie : il y a 20 % de dermatos en moins en 10 ans au niveau national. Il faudrait beaucoup d’étudiants qui s’orientent vers la dermato. Il y a aussi, en même temps, beaucoup de disciplines qui sont en souffrance par ailleurs : la pédiatrie, les ophtalmos, dentistes…”
“Un quart de consultations en moins parce qu’ils préfèrent donner des avis aux médecins généralistes”
Sophie Coisne Reda ajoute : “Il y a aussi un facteur important : le vieillissement de la population de dermatos : 60 % d’entre eux ont plus de 55 ans et beaucoup se remettent au travail à la retraite. Les dermatos ont aussi de nouvelles habitudes : il font moins de consultations en direct ; on observe qu’il y a un quart de consultations en moins parce qu’ils préfèrent donner des avis aux médecins généralistes. Ils reportent l’expertise sur les médecins traitants. C’est la politique globale actuelle de faire ce “tri”. En même temps, les dermatos se plaignent que beaucoup de patients viennent pour des raisons inutiles ; on parle beaucoup du mélanome mais si l’on n’est pas dans une famille à risques, ce n’est pas forcément la peine de consulter. Ces créneaux-là manquent aux patients qui, eux, en auraient besoin”, conclut-elle. La maxime qui veut que l’on consulte un dermato au moins une fois par an a donc bien vécu…
Olivier SCHLAMA
“Former des médecins généralistes ne peut remplacer la formation du cursus universitaire des futurs dermatologues”
Pour le principal syndicat des dermatologues, “la dermatologie est en danger. Et “les patients et leur santé ne peuvent se satisfaire d’une prise en charge en mode dégradé”.
Pour le Syndicat des dermatologues et vénérologues (SNDV), la pénurie vient “principalement au vieillissement de la profession. Plus de la moitié des praticiens en exercice ont plus de 55 ans. En 2024, la France comptait 2 928 dermatologues1 soit 3,4 pour 100 000 habitants. Cette situation est en grande partie due à la limitation du nombre de places en formation médicale imposée par le numerus clausus à la demande des pouvoirs publics pendant plusieurs décennies. Bien que ce quota ait progressivement été relevé pour atteindre une centaine d’étudiants par an, cette augmentation reste insuffisante au regard des besoins de la population. Par ailleurs, la formation d’un dermatologue requiert dix ans ce qui signifie que les effets de ces ajustements ne seront visibles qu’à long terme.”
Le principal syndicat de la profession s’alarme de façon très claire : “Cette pénurie alarmante, qui s’aggrave d’année en année, met en péril la santé de millions de
Français. Les maladies de peau ne peuvent plus attendre et seul un expert en dermatologie est à même de les prendre en charge efficacement. Une formation à la dermatologie de quelques heures, à destination des médecins généralistes, ne peut remplacer la formation du cursus universitaire des futurs dermatologues. Les patients et leur santé ne peuvent se satisfaire d’une prise en charge en mode dégradé.”
Luc Sulimovic, président du SNDV, souligne que “cette formation express” ne permet pas d’aborder cette spécialité dans toute sa complexité et d’acquérir les mêmes connaissances et compétences que les dermatologues. Le SNDV reste critique sur “cette alternative provisoire qui pourrait dégrader le parcours de soin du patient et qui ne contribuerait pas à assurer une dermatologie de qualité”.
“La dermatologie est en danger”
▪ Près de 3 000 dermatologues en 2023 (2 981) 1 soit -10% en 10 ans
▪ Près de 30% de dermatologues de + de 60 ans (29,25% vs 11% en 2007) 1 et 44% de 55
ans et plus
▪ Seulement 113 nouveaux dermatologues sont formés chaque année
“Déserts médicaux, une fracture territoriale”
▪ 22 millions de Français vivent dans des déserts médicaux
▪ 3,4 de dermatologues pour 100 000 habitants en France
ͦ Saint Pierre et Miquelon, Mayotte et Wallis Fortuna : 0 en 2010 vs 0 en 2023
ͦ Creuse : 1,6 en 2010 vs 0 en 2023 (-100%)
ͦ Indre : 2,1 en 2010 vs 0,5 en 2023 (-76,2%)
ͦ Lot : 2,3 en 2010 vs 0,6 en 2023 (-73,9%)
ͦ Ain : 2,8 en 2010 vs 0,8 en 2023 (-67,9%)
ͦ Nièvre : 1,8 en 2010 vs 0,5 en 2023 (-72,2%)
ͦ Alpes Haute Provence : 3,8 en 2010 vs 1,2 en 2023 (-68,4%)
ͦ Paris : 19,7 en 2010 vs 15,8 en 2023 (-19,8%)
Délai d’attente record
▪ 73 % des Français jugent difficile l’accès aux soins assurés par les dermatologues (+27 points depuis 2011)
▪ Plus de 3 mois en moyenne pour obtenir un rendez-vous chez un dermatologue (104 jours en 2023 contre 41 jours en 2012. Soit 3 fois plus de jours)
▪ 46 % des patients ont déjà renoncé une fois dans leur vie à faire traiter leurs problèmes de peau chez un dermatologue5 pour des raisons de : o délais (42 %), o disponibilités du professionnel (22 %), o son éloignement géographique (21 %)
Les Français et leur peau
▪ 16 millions de Français sont touchés par des maladies de peau soit 1/3 de la population
▪ Près de 100 000 cancers de la peau détectés annuellement en France (trois fois plus en 30 ans)
▪ 45 % des Français admettent être complexé par leur peau
▪ 45 % des femmes ont refusé de poster des photos sur les réseaux sociaux en raison du regard négatif sur leur peau