Après plusieurs mois de collecte et d’analyse de données, la 5e édition des Chiffres clés du livre en Occitanie vient de paraître. Ce document produit par Occitanie Livre & Lecture tous les deux ans révèle les mutations du secteur, les défis qu’elles engendrent et les forces que la filière en région peut mobiliser pour y répondre. Etat des lieux (première partie, les librairies) :
“Cette nouvelle édition des chiffres-clés nous invite à nous projeter vers l’avenir, à célébrer ce qui fait la singularité de notre territoire et à imaginer la place du livre dans une société toujours plus connectée. Si les évolutions technologiques et les nouvelles pratiques de consommation du livre bousculent parfois les habitudes, elles ouvrent également des perspectives inédites pour la profession” commente Serge Regourd (conseiller régional et président d’Occitanie Livre & Lecture).
La filière littéraire, en Occitanie, se caractérise par une diversité et une richesse qui témoignent de la vitalité de ses acteurs mais fait également face à des défis nombreux. Voici donc l’occasion de mettre l’accent sur les mutations du secteur et les défis qu’elles engendrent, tout en mettant en lumière les forces qui permettent d’y répondre. Et les enjeux sont nombreux !
Une fois n’est pas coutume… Commençons par le dernier maillon de la chaîne, la librairie : d’une manière générale, les libraires font face à “des baisses de fréquentation et de chiffre d’affaires qui pèsent particulièrement sur les plus petites entreprises et entraînent une précarisation de leurs gérants et gérantes.” Ces données appellent à porter une attention particulière sur le secteur au regard de l’engouement pour cette activité, de son poids économique (création de richesse, emploi) et de “son rôle d’acteur à part entière du développement culturel du territoire.”
C’est le tissu rural qui s’est le plus renforcé
Malgré ce climat économique plutôt maussade, les librairies affirment leur dynamisme. Les deux dernières années ont été marquées par de nombreuses ouvertures, notamment dans l’Hérault (6 ouvertures), les Pyrénées-Orientales (4 ouvertures) et le Tarn-et-Garonne (3 ouvertures). Et on constate que c’est le tissu rural qui s’est le plus renforcé avec 8 créations sur la période.
Les librairies spécialisées demeurent à 90 % urbaines, les librairies généralistes pèsent pour 70 % des implantations en zones péri-urbaines, quand 80 % des maisons de la presse référencées auprès d’Occitanie Livre & Lecture se concentrent dans les territoires ruraux. Et les chiffres témoignent du recul des librairies-papeteries-presse et des librairies-papeteries par rapport à l’édition 2023 (respectivement -5 et -8 %) en milieu péri-urbain, au profit des librairies généralistes (+42 %).

Littérature, BD et “jeunesse”, le tiercé gagnant
Questionnées sur leurs trois principaux rayons en termes de vente, une cinquantaine de libraires ont répondu. On retrouve un triptyque classique avec en tête la littérature qui représente environ 31 % du chiffre d’affaires des librairies du panel, puis la BD avec presque 26 % du CA et la “jeunesse” avec environ 25 % du CA.
Ces trois segments cumulés représentent en moyenne 82 % du CA des librairies répondantes. Les jeunes lisent donc encore..; Une vraie lueur d’espoir !
Les librairies répondantes sont 65 % à proposer des offres complémentaires à celles liées au livre. 38 % ont une offre de papeterie, 25 % de jeux/jeux de société, 11 % un espace café et 8 % vendent des loisirs créatifs. Et 95 % des libraires du panel
déclarent organiser des animations (débats, lectures et rencontres…), démontrant le caractère indissociable de celles-ci avec l’activité des librairies. Par ailleurs, “près de deux librairies sur trois possèdent un site Internet et pour la moitié d’entre elles, il est marchand.”
Le “nerf de la guerre”… en baisse dans tous les secteurs
Le chiffre d’affaires global des librairies accuse une forte baisse (de 81 648 480 € en 2016 à 60 947 172 € en 2025). “Une partie de la différence entre 2023 (70 150 661 €) et 2025, précise Occitanie Livre & Lecture, s’explique par l’importante baisse post-rebond de la crise sanitaire, avec une chute de 11 points du CA pour les plus petites librairies sur la période (-5,4 % et -2,6 % pour les autres catégories d’établissement). D’autre part, le fort taux de renouvellement des répondants entre les deux études explique en partie ces fluctuations du niveau de CA cumulés.”
Les libraires questionnés sur l’inflation mettent en avant “l’augmentation des prix du transport, l’augmentation des charges externes” et ils s’inquiètent de l’augmentation du prix des livres. Ils se disent aussi “encouragés par l’impression d’un maintien de leur niveau de CA et ce malgré la baisse du panier moyen.” Ils attribuent cette stabilité
à la permanence des achats de grands formats, de bandes dessinées et de mangas.
Si l’état d’esprit est plutôt au pessimisme, les librairies demeurent cependant un lieu d’espoirs et de volontarisme. Ainsi, face aux transformations provoquées par l’intelligence artificielle (recommandations en ligne, productions éditoriales) notamment et face aux enjeux écologiques et sociétaux, les libraires interrogés souhaitent “un avenir où les livres auraient une commercialisation plus lente, où la pluralité éditoriale trouverait une place plus grande et où la production de nouveautés serait conséquemment ralentie.”
Lers librairies, un lieu de vie, d’échange, de découvertes, bien mieux que des clics sur un écran. Non ?
Philippe MOURET
Pass Culture : 96 % des répondants sont affiliés au pass Culture et ce, sans distinction de catégories de CA. 81 % des libraires y voient un impact positif sur leur activité. On peut cependant noter que si les librairies A et B (librairies à CA supérieur à 2M€ et entre 1 et 2 M€) sont unanimes sur l’impact positif de ce dispositif, une librairie sur cinq appartenant aux autres catégories semble n’y voir aucun impact.
(Prochaine partie : Les auteurs et l’édition)
