Budgets participatifs : “La Région cherche des aides de l’Europe pour pérenniser des projets”

La Région Occitanie sera bien représentée à Marseille dès mercredi aux 10E Rencontres nationales des Budgets participatifs. Ph. Dr

Seule région en France avec des budgets participatifs dignes de ce nom, l’Occitanie reste pionnière ! Comme l’explique l’élu qui en a la charge, Olivier Roméro, la collectivité espère bénéficier du programme Life pour pérenniser les projets des lauréats. Elle lance aussi le premier comité de dialogue citoyen. Ces innovations ne passeront pas inaperçues lors des 10e Rencontre nationale des budgets participatifs à Marseille, mercredi, où le fil rouge est aussi de retisser le lien avec les politiques.

Organisées par le Réseau national des budgets participatifs (RNBP) et la ville de Marseille, les 10e Rencontres nationales des budgets participatifs se tiennent à Marseille, du 12 au 14 novembre. Chargé de ce dossier, Olivier Roméro explique que “l’Occitanie est la seule région en France à en proposer”. Et, à ce titre,  “nous sommes très regardés” par les autres collectivités.

Porto Alegre, Montréal, Youndé…

Comme la Région Occitanie est allée regarder de près du côté de la Mecque des budgets participatifs, à Porto Alegre, dans le Sud du Brésil, où cette ville a carrément donné les clefs d’une partie de son budget municipal aux habitants depuis 1989 ! Le but étant là bas tellement citoyen : davantage de transparence ; rendre la dépense publique plus équitable notamment pour les nombreux quartiers défavorisés, etc. Comme la Région Occitanie zieute avec beaucoup d’à-propos vers d’autres coins de la mappemonde : Montréal avec qui “nous échangeons sur les bonnes pratiques, notamment le recours aux influenceurs pour s’adresser aux jeunes et où ils bénéficient de gros budgets” ; et aussi Yaoundé, au Cameroun, où là c’est davantage la débrouille qui est à l’oeuvre. En tout cas, le fil rouge entre toutes ces initiatives, c’est “que les gens au pouvoir osent !”

Décrocher un financement européen Life

La précédente édition, à Nancy des Rencontres des budgets participatifs. DR

Et la région Occitanie a osé dès 2019. En investissant entre 1 M€ et 2 M€ par an pour financer des projets citoyens sans quoi ils n’émergeraient pas. “Depuis six ans, la collectivité a consacré 13,6 M€ à ces budgets participatifs”, confie encore Olivier Roméro. “Nous fonctionnons par appels à projets : climat, social, environnement. Dans des municipalités, cela s’appréhende parfois par quartier, par exemple. Nous c’est à l’échelle de la région tout entière et nous sommes les seuls à le faire. Ce qui est très important, c’est le suivi. Il ne faut pas laisser les lauréats en plan après les avoir aidés financièrement. Nous allons justement travailler dans le but de décrocher un financement européen Life, dédié aux projets innovants, surtout au climat et à l’environnement. On devrait pouvoir récolter 1 M€ de l’Europe. Cela nous permettra sur les lauréats qui ont déjà lancé leur projet à fort potentiel de pouvoir les aider davantage dans la pérennisation voire le développement de leur idée.” Car ce n’est pas facile, surtout en ces moments de disette budgétaire, d’avoir un budget intéressant dédié aux budgets participatifs. Toute aide est donc la bienvenue.

“Renforcer ces lauréats à fort potentiel avec une aide supplémentaire”

Olivier Romero-Gayo est conseiller régional d’Occitanie en charge des budgets participatifs. DR

Comment seront-ils choisis ? “Déjà, nous allons regarder quels sont les projets qui existent encore ; ensuite, ceux qui ont un potentiel de développement important. Nous allons lancer un appel à projets pour qu’ils postulent. Et on va renforcer ces lauréats à fort potentiel avec une aide supplémentaire. Et, parallèlement, nous voulons relancer un nouveau budget participatif ciblé sur la thématique du climat et de l’environnement. Ce programme Life va nous aider à ne pas imaginer une année blanche. Et on va devoir, si c’est possible, relancer cette demande auprès de l’Europe chaque année. On regarde aussi comment mobiliser de l’argent ailleurs. Il s’agit de ne pas décevoir les réseaux associatifs, notamment.”

“Premier comité de dialogue citoyen en région”

Ce n’est pas tout. “Nous nous lançons au premier semestre de l’année prochaine, le premier comité de dialogue citoyen en région. Ce seront 46 personnes dont 36 citoyens -choisis après des appels à intérêts et peut-être même avec une part de tirage au sort – et 12 élus – y compris de l’opposition – qui vont participer durant quatre week ends sur une thématique. Celle de cette année, qui est issue de la tournée de mi-mandat où 30 000 habitants se sont exprimés, fait ressortir les mobilités où il y a le plus d’attente. Autour des Etats généraux du rail et des intermodalités dont nous fêtons les dix ans. Nous n’avons pas encore la question précise. On se fait accompagner ; c’est comme une convention citoyenne à grande échelle. Mais j’aime bien ce qui se fait entre élus et citoyens. Pour cela, nous sommes allés voir ce qui se passe à Bruxelles (Belgique) qui le font déjà.”

78 % de citoyens n’ont plus confiance dans la politique ou s’en détournent. Si on trouve pas des moyens pour les réconcilier avec la politique, on a perdu”

Les lauréats 2025 de budgets participatifs de la Région Occitanie. Ph. Leo Arcangeli, Region Occitanie

On y parlera “d’ingénierie démocratique : comment on se parle ; comment on s’écoute ; comment on co-construit ensemble. Les trois autres sessions comprendront des visites de terrain, d’utiliser des modes de transports, etc. Pour l’instant, nous n’avons pas d’argent de l’Europe mais pourquoi pas ? A la fin, ils feront des propositions qui seront présentées en assemblée plénière de novembre 2026. Ce sera une première pour des citoyens. Les sondages le disent et le dernier rapport du Cese : 78 % de citoyens n’ont plus confiance dans la politique ou s’en détournent. Si on trouve pas des moyens pour les réconcilier avec la politique, on a perdu. Avant même 2027, l’extrême-droite sera là… Comme c’est très compliqué de faire changer de posture aux élus parfois ; ce n’est pas forcément de la mauvaise volonté mais parce qu’ils ne sont pas formés à çaNe serait-ce qu’écouter le citoyen et ne pas parler à sa place. Ce format est pour redonner de la confiance. La démocratie est notre bien le plus précieux.

“Leviers d’action en faveur de l’innovation”

En plus de 10 ans d’existence, ceux que l’on surnomme les BP ou BUPA, sont devenus de “véritables leviers d’action en faveur de l’innovation et de la co-élaboration des projets pour façonner l’avenir des territoires. Au programme de ces journées du réseau des villes, départements et régions dotées de budgets participatifs, des visites de terrain, des rencontres, des débats, des ateliers entre toutes les parties prenantes de l’implication citoyenne, toutes et tous en provenance des 400 collectivités ayant mis en place un processus de budget participatif permettant l’implication de millions de citoyens”.

Olivier SCHLAMA

  • Le Réseau national des budgets participatifs est né le 8 novembre 2022, à Amiens de l’initiative de quinze collectivités, représentées par leurs élus et habitants. Les Villes de Grenoble, Rennes, Montreuil (93) et Paris puis Clermont-Ferrand et Angers ont initié cette structuration en association et adopté une charte reposant sur des principes fondamentaux des budgets participatifs en France. Le réseau national vise plusieurs objectifs  : valoriser le Budget participatif comme une avancée démocratique et favoriser son émergence. Œuvrer pour la reconnaissance institutionnelle de l’outil Budget participatif. Permettre l’échange de bonnes pratiques entre les acteurs au niveau national comme local, à travers la mutualisation de ressources, le partage des outils, le croisement d’expériences, l’organisation de rencontres, groupes de travail et ateliers, etc.). Constituer une base documentaire commune.