Point de vue : Partager le regard de Raymond Depardon sur le Pont du Gard

Le Pont du Gard vu par Raymond depardon. Photo ©Raymond DEPARDON
ll n’y a pas de limite à l’errance ! Surtout quand celle-ci est faite pour se rencontrer comme cela fut le cas, il y a quelques mois, entre Raymond Depardon et le Pont du Gard. Une rencontre qui a incité l’un des plus grands noms de la photographie mondiale à poser durant plusieurs jours son trépied en bois Ries et sa chambre à soufflet Folding sur les terres parfois escarpées du site gardois pour extraire, de ce lieu qu’il considère “esthétiquement magnifique”, un point de vue affirmé.

Raymond Depardon est l’une des figures majeures de la photographie et du cinéma documentaire français. Photographe, cinéaste et journaliste, il a développé dès les années 1960 une œuvre humaniste et engagée, marquée par une attention profonde aux réalités sociales, politiques et intimes.

A l’évidence, Raymond Depardon est un regardeur. Il explore sans relâche le monde qui l’entoure sans jamais fermer les yeux sur la réalité. Depuis plus de soixante ans, il sillonne la planète de long en large, cherchant à approcher au plus près le cœur de l’humanité. Au cours de ses errances, il a traversé des paysages et croisé des ombres.

Raymond Depardon devant le Pont du Gard – ©Raymond DEPARDON

Au pied du pont millénaire, il est allé à la rencontre du présent, de l’espace vécu. Calme et serein, accompagné de sa chambre 20X25, il a pris le temps de photographier la lumière, les pierres et le silence qui entourent le monumental monument romain, ne réalisant volontairement que deux ou trois clichés d’un même point de vue.

Je me suis régalé,

je pourrai rester six mois

à photographier les lieux”

Comme un peintre avec son chevalet il s’est déplacé au gré de la lumière, des cadrages mais surtout de ses envies afin d’imprégner sur la pellicule l’image révélatrice, celle qui mélange réel et pensée. Adepte de l’outre temps, fuyant les prises de vue évidentes, préférant les ailleurs, il a su trouver ici la bonne distance, celle qui réussit à capturer l’image qui parle par elle-même.

A la fin de la séance, il s’est approché, le regard bleu et le sourire aux lèvres, en déclarant : “Je me suis régalé. Je pourrais rester six mois à photographier les lieux.” Mais pour l’heure, l’œil de Raymond Depardon poursuit sa quête, bien décidé à aller voir ailleurs…

Ph.-M.

Regards sur le Pont

Cette “carte blanche à Raymond Depardon” s’intègre dans le cadre oplus large de l’exposition estivale (et jusqu’au 2 novembre) “Mosaïque” sur le Pont du Gard

Photo Site du Pont du Gard -Aurélio Rodriguez

Cette exposition propose une exploration sensible et artistique du Pont du Gard à travers le regard d’artistes, de professionnels, de scientifiques et les réflexions personnelles d’habitués du site. Elle met en dialogue des œuvres variées (peintures, photographies, installations, vidéos) avec les impressions, souvenirs et visions de témoins privilégiés, offrant ainsi une expérience immersive et participative :

Des peintures classiques françaises du XIXe siècle à la création lumière de l’artiste américain James Turrell, de la peinture expressionniste de Bernard Buffet à une des plus anciennes gravures du monument réalisée par Jean Poldo d’Albénas datant du milieu du XVIe siècle, de la peinture narrative du gardois Gérard Lattier aux objets souvenirs témoins de l’avènement du tourisme…

L’exposition met également en valeur le travail des architectes, botanistes, paysagistes, archéologues qui ont transformé le Site du Pont du Gard au début des années 2000 et les usages des habitants, visiteurs réguliers attachés à ce lieu emblématique fortement inscrit dans leur quotidien.

Il s’agit là d’une “invitation et d’une réflexion sur la manière dont un monument historique peut être perçu différemment selon les époques, les sensibilités artistiques et les expériences personnelles, tout en créant une mémoire collective vivante autour d’un monument emblématique” inscrit sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Unesco en 1985. Un symbole de l’enracinement du lieu dans une histoire commune.

Le Point du Gard vu par Dubout.