Tourisme : Pourquoi les parcs naturels se démarquent en Occitanie

"La tendance, c'est que beaucoup de communes émettent l'envie d'entrer dans le périmètre d'un parc naturel régional", exprime Stéphane Adam de la Fédération des parcs régionaux. Photos : Paul DELGADO/Teddy MAIGNAN. "Valeurs Parc naturel régional des Pyrénées catalanes".

[Mis à jour le 7 septembre 2021]. Avec les Corbières-Fenouillèdes (1), l’Occitanie s’enrichit d’un 8e parc naturel régional en Occitanie. En 2018, le parc naturel de l’Aubrac officiellement l’avait précédé. Envie de vacances au grand air, entouré d’une faune et d’une flore protégées, en dégustant des produits du terroir ? Vous avez le choix ! La Narbonnaise, Haut-Languedoc, Pyrénées Catalanes, Pyrénées Ariégeoises, Grands Causses, Causses du Quercy, et donc Aubrac et donc Corbières-Fenouillèdes : ils sont de plus en plus prisés par les touristes qui se rapprochent d’un tourisme respectueux de la nature. Il existe même des séjours labellisés Valeurs Parc, marque commune aux 53 parcs naturels régionaux de l’Hexagone, vecteur de développement. Deux autres parcs, dans le Comminges, patrie de Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, et du Gardon, près d’Alès, seraient en projet. Cet éco-tourisme-là ne fait que débuter dans la seule région qui le coordonne de cette manière, à grande échelle.

Sans aller jusqu’à aller faire des câlins aux arbres, comme le préconise la drôlatique sylvothérapie, il est totalement admis que l’on cherche de plus en plus à améliorer son bien être en se ressourçant au coeur de la nature : un sondage l’exprime parfaitement, affirmant que 66 % des Parisiens et 44 % des habitants des grandes villes disent que la nature n’est pas assez présente dans leur quotidien. Alors, de plus en plus de touristes expérimentent des vacances “nature” tout en gardant un certain confort et un panel d’activités.

C’est dans ce contexte que de plus en plus de touristes redécouvrent leurs parcs régionaux. Il en existe déjà 53 dans l’Hexagone – le décret concernant l’Aubrac vient d’être promulgué (1) – et plusieurs autres sont en attente de décrets : ceux de la Baie de Somme, Sainte-Baume, Médoc. Voire en Bretagne. Le parc naturel régional revient à la mode. Un tourisme autrement.

“Nous avons remis au goût du jour notre marque commune à tous les parcs naturels régionaux, Valeurs Parc, il y a deux ans, avec une vraie volonté d’une démarche marketing mutuelle, mais un marketing attaché à nos valeurs. Elle remplace les marques individuelles de chaque parc”, explique Stéphane Adam, qui en est le responsable à la fédération des parcs régionaux. “La tendance, c’est que beaucoup de communes émettent l’envie d’entrer dans le périmètre d’un parc naturel régional, confie-t-il. Selon lui, “45 des 53 parcs ont attribué ce label Valeurs Parc à plus de deux mille entreprises en France, à vocation commerciale et ancrée localement.” Les valeurs de cette marque collective ? L’entreprise doit être respectueuse de son territoire et de son environnement. La dimension humaine y prend toute sa part.

C’est de fait un label de qualité en ce sens que les entreprises retenues travaillent en circuits courts et les produits doivent être fabriqués dans le périmètre du parc, qu’elles sont dans la valorisation d’un vrai savoir-faire”

Un chargé de mission

“Ce n’est pas un gage de qualité au sens purement juridique mais c’est de fait un label de qualité en ce sens que les entreprises retenues travaillent en circuits courts et les produits doivent être fabriqués dans le périmètre du parc, qu’elles sont dans la valorisation d’un vrai savoir-faire, etc.”, explicite un chargé de mission d’un parc languedocien. On y trouve de plus en plus des propositions touristiques. De l’hébergement. Restauration. Activités sportives ou de loisirs… “Pour l’heure, on a mis en place une belle vitrine commune. Reste à mettre en musique cette valeur ajoutée grâce à une stratégie plus affirmée sur l’aspect commercial, précise un acteur de cet éco-tourisme. Ce n’est que le début de l’aventure d’un éco-tourisme intégré et coordonné à grande échelle, l’Occitanie étant la deuxième région la plus vaste de l’Hexagone. Au total, avec deux parcs nationaux, celui des Cévennes et des Pyrénées, la région quadrille son territoire avec dix parcs.

“Il n’y a pas de promesse de qualité, mais une démarche de qualité. In fine, ce sont des produits de qualité car ils respectent un cahier des charges qui s’appuie sur des valeurs”, renchérit Teddy Maignan. Le chargé de mission au parc Pyrénées Catalanes va plus loin : “C’est une approche à laquelle on croit fortement. Déjà 150 professionnels, notamment en circuits courts, sont labellisés rien que pour notre parc. Cette marque est une vraie porte d’entrée pour les touristes.

Parmi ces professionnels du cru, il y a, à titre d’exemple, le camping du Plat-de-Barès, en allant vers le lac des Bouillouses, près de Font-Romeu : il propose peu d’aménagements, un aspect très nature, avec des rochers, pas d’emplacement marqué, une petite forêt… Bref, tout ce que désire le randonneur qui aura préparé son hébergement en amont du séjour, prévu des sorties en montagne…” Il ajoute : “Nous avons aussi un annuaire de la gastronomie. Nous y faisons la promotion des circuits courts, sans OGM, ni agriculture intensive.”

Côté loisirs, on organise de tout et davantage dans cette magnifique région de montagne, y compris des vols en ballons au-dessus du parc ! Et ce, toute l’année, même quand cimes et abîmes sont enneigés ! Cela en coûte un peu cher (180 euros) mais on peut, sinon, se rabattre sur une randonnée d’une journée, comme le tour du Capcir, avec un guide pour 20 euros à 30 euros. Dépaysant à souhait. Le parc relaie aussi des activités peu communes dans des canyons secrets d’eaux chaudes entre autres et même des randonnées pour handicapés physiques sur “Joelette”, ce fauteuil tout-terrain doté d’une seule roue, centrale, pour mieux parcourir les chemins. Cette marque Valeurs Parc offre une visibilité incomparable à des sociétés de services ou des producteurs locaux. Quand le parc ne se transforme pas en agence de voyage, via le Comité régional du tourisme ! “Depuis trois ans, ajoute Teddy Maignan, nous proposons des séjours “packagés” à l’échelle de nos huit parcs d’Occitanie et même des parcs naturels nationaux. Ce sont des séjours sport-nature-gastronomie demandant toute une logistique d’une agence de voyage. On est tous super-motivés !”

Cette année, il n’y aura pas, aux côtés de mille et une productions locales, uniquement le sirop de sapin du parc des Pyrénées Catalanes. Mais aussi le miel de l’Aubrac… “La décision a été prise. On devrait avoir l’arrêté de création d’ici une semaine”, explique justement David Arnaud, directeur du très prochain parc naturel de l’Aubrac. C’est fait depuis cette fin mai !
Pas encore officiellement créé, ce dernier-né, que David Arnaud est déjà “sollicité par des producteurs, apiculteurs, viticulteurs, accompagnateurs de montagne, des hébergeurs, etc., pour avoir le label Valeurs Parc. Ils s’inscrivent dans une démarche de développement durable et qui veulent se différencier. Ils participent à un projet de territoire”, explique-t-il. “Cette marque va officiellement intégrer ces acteurs dans une même démarche. L’agriculture et le tourisme sont deux valeurs sûres pour développer un parc et surtout les entreprises. Dès la création du parc Aubrac, dans quelques jours, nous irons rencontrer le président du parc ariégeois pour savoir comment ils s’y prennent…”

La commission d’attribution de ce label se réunit tous les deux mois car nous avons de plus en plus de demandes des prestataires : confitures, charcuterie, viandes, objets en bois, guides, restaurants, etc. Tous sont certifiés produits localement. Et ça plait. Et nous, nous voulons valoriser les productions locales, agricoles et commerciales liées aux parcs”

André Rouch, président de l’association des parcs régionaux d’Occitanie

Justement, le truculent André Rouch, président de l’association des parcs régionaux “pour deux ans”, de la marque Valeurs Parc, et président du parc des Pyrénées Ariégeoises, dit : “La commission d’attribution de ce label se réunit tous les deux mois car nous avons de plus en plus de demandes des prestataires : confitures, charcuterie, viandes, objets en bois, guides, restaurants, etc. Tous sont certifiés produits localement. Et ça plait. Et nous, nous voulons valoriser les productions locales, agricoles et commerciales liées aux parcs. Sans parler des emplois en jeu. Parfois, il y a des choses qui échappent au territoire : un blé qui sert à une pâtisserie estampillée Valeurs Parc et qui n’est pas moulu dans son périmètre. Eh bien là on offre des dérogations ; on tolère qu’il soit fait dans un département voisin. Mais ce sont des exceptions. On commence à être bien armés pour accueillir les touristes.”

Restaurants 100 % parc et pique-nique géant

Il poursuit : “On développe, par exemple, de plus en plus des restaurants 100 % parc : c’est-à-dire que tout ce que l’on y mange y est produit. Dans le nôtre, on en a trois de ces restaurants. Pour l’hébergement, on privilégie les innovations éco-touristiques comme des logements avec récupérateurs d’eau, composteurs, des lampes économes, etc. J’ai deux ingénieurs agronomes à l’année qui bûchent sur ça. Attention, on n’est pas des intégristes mais l’espace vert, ici, ce n’est pas de la moquette verte…” André Rouch révèle qu’un 54e parc, dans les Corbières, est en réflexion. Et que deux autres parcs, dans le Comminges, la patrie de Carole Delga, la présidente de la Région Occitanie, et du Gardon, près d’Alès, sont en projet !

En terme de communication, des actions parfois spectaculaires sont organisées. Ce sera le cas d’un pique-nique géant : en fait, “une trentaine de parcs organiseront simultanément tout au long du mois de septembre des dégustations de producteurs locaux pour les faire connaître. Cela se fera à l’occasion d’une fête locale, par exemple. De quoi (re)découvrir aussi des pratiques plus respectueuses des milieux.” Toute cette dynamique n’est pas du “ripolinage” mais bel et bien une “volonté d’ajouter une “plus-value qui ait du sens”, renchérit Stéphane Adam.

Les parcs régionaux ont été créés sous de Gaulle, en 1967, il y a un demi-siècle. C’était une notion floue, un ovni à l’époque ;  on était dans un contexte de préparation de la décentralisation et dans une logique de mobilisation des élus locaux et des habitants. A l’époque, la tendance, c’était : soit on privilégie le développement économique soit on protège l’environnement. Les parcs ont permis de concilier les deux. Mais, longtemps, leur fréquentation, qui avait certes ses habitués, ronronnait. Contrairement aux parcs naturels nationaux, la création des parcs régionaux émane de la volonté des communes. Tout est rediscuté tous les 15 ans. Une période suffisamment longue pour entretenir le consensus nécessaire mais qui, malgré tout, permet des évolutions. Même si les missions essentielles perdurent à travers une charte : conservation des espèces, contribuer harmonieusement à l’aménagement du territoire, à la qualité de vie, etc. Le parc régional n’a pas de pouvoir de police. On peut donc y créer plus facilement de l’activité. Et même s’il y a des garde-fous : c’est notamment la charte du parc naturel régional Pyrénées Catalanes qui empêche, pour l’instant, la création d’une méga station de ski entre Font-Romeu et les Angles par exemple.

Olivier SCHLAMA

  • (1) Avec les Corbières-Fenouillèdes, l’Occitanie s’enrichit d’un 8e parc naturel régional. C’est le Premier ministre, Jean Castex qui a signé l’arrêté le 4 septembre, salué par Carole Delga, présidente de la Région Occitanie. Le Parc naturel régional Corbières-Fenouillèdes devient le 8e parc naturel régional d’Occitanie, alors que se déroule le congrès mondial de la nature de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), portant à 30% la superficie de la région couverte par un parc naturel.
    Portée par la Région Occitanie depuis décembre 2014, la création du Parc naturel régional (PNR) Corbières Fenouillèdes est “l’aboutissement d’un important travail de concertation qui a notamment permis la création de la charte de Parc qui accompagne cette labellisation et définit de manière partagée les orientations et les stratégies de développement du PNR pour les 15 prochaines années. Elle permettra de valoriser le patrimoine naturel, paysager et culturel du territoire, bénéficiant aussi à son économie locale”, indique la Région Occitanie.
  • (1) Dix ans d’attente jusqu’au jeudi 24 mai où l’Aubrac est officiellement devenu le 53e parc naturel régional (PNR) de France. Région du Massif central largement connue pour sa race de vache du même nom, l’Aubrac s’étend sur l’Aveyron, le Cantal et la Lozère. Son coeur est marqué par l’activité volcanique à l’origine de ses vastes plateaux, cette région, façonnée par ses sources, défrichée par ses moines et oxygénée par un pastoralisme séculaire, l’Aubrac vit de l’agriculture, de l’élevage et du lait. C’est là que l’on trouve les fameux couteaux Laguiole, entre autre artisanat. C’est aussi une réserve de biodiversité unique. Tourbières et flore vernaculaire sont parcourus des fameux chemins de Compostelle qui fêtent cet été leurs 20 à l’Unesco. Le PNR vise à développer cette région rurale et attirer de nouveau habitants.
  • Dans son ensemble, le réseau des parcs naturels régionaux rassemble plus de 4 400 communes, 4 millions d’habitants et 9,9 millions d’hectares, soit un peu plus de 15 % du territoire national. Le parc de l’Aubrac, qui compte 64 communes, est entouré par deux autres PNR : celui des Grands Causses, au Sud et celui des volcans d’Auvergne, au Nord-Ouest. Avant l’Aubrac, le dernier parc à avoir été créé remontait à décembre 2017 sur le massif de la Sainte-Baume, à cheval sur les Bouches-du-Rhône et le Var.
(1) Les 53 parcs actuels couvrent 4 300 communes dans quinze régions. Soit 8,7 millions d’hectares (14 %  du territoire). Plus de quatre millions d’habitants sont concernés.

Les parcs naturels régionaux d’Occitanie : http://www.tourisme-occitanie.com/accueil/decouvrir/loccitanie-en-resume/les-parcs-naturels-regionaux-et-nationaux

http://fr.calameo.com/books/0012438599b3721ab5e34

http://fr.calameo.com/books/0012438596dcafc242e4a

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Les parcs naturels et le slow tourisme

Selon la fédération des parcs naturels régionaux, ce sont des territoires préservés, structurés et reconnus pour leur gouvernance originale, leurs capacités d’ingénierie et d’expérimentation”

La France est la première destination au monde avec 83 millions de visiteurs internationaux et la 3e destination mondiale en termes de recettes. Les parcs naturels sont des acteurs touristiques majeurs et en particulier du slow tourisme et de l’éco-tourisme en France qui est aujourd’hui peu visible et peu lisible. Ils ont plusieurs atouts : par rapport aux territoires ruraux, avec deux millions de lits, les parcs ont un taux de fonction touristique (logements touristiques par rapport aux logements résidents) et une part d’emploi touristique supérieurs et disposent de davantage d’équipements de randonnée. “Ce sont des territoires préservés, structurés et reconnus pour leur gouvernance originale, leurs capacités d’ingénierie et d’expérimentation”, rappelle-t-on à la fédération des parcs naturels régionaux.

Par ailleurs, la dénomination Parc naturel régional est porteuse d’une image faisant sens par rapport à ce type de destination touristique. “Des outils ont déjà été développés qui ont déjà permis de structurer et de valoriser des offres éco-touristiques grâce notamment à la Charte européenne du tourisme durable (26 parcs en sont signataires ; la CETD étant identifiée comme un outil de régulation touristique, permettant de contribuer à la transition écologique) et à la marque Parc naturel régional.

Les promoteurs de ce slow tourisme ajoutent qu’a été donné un cadre commun en matière de tourisme aux 53 parcs avec une stratégie commune autour de quatre axes : “Destination d’excellence mais ouverte à tous, émergence d’offres touristiques spécifiques, promotion responsable et mise en marché par des acteurs professionnels, coopération (ville-campagne, acteurs privés et publics).”

Enfin, les parcs régionaux peuvent aussi s’appuyer sur de nombreux partenariats avec des fédérations françaises compétentes sur des activités contribuant à l’itinérance (Fédération de cyclisme, Fédération de randonnée pédestre…), des structures intervenant en tourisme (FNOTSI…) et d’autres réseaux d’espaces naturels.

O.SC.