Pyrénées-Orientales : Le Train Jaune au coeur de l’intrigue d’un polar

Le train jaune sur le pont suspendu. Photo : Frédérique Berlic.

Le Toulousain Gérard Muller a écrit un joli ouvrage avec pour décor le fameux Canari. Une belle balade dans les hauts plateaux cerdans avec une intrigue qui s’attache à la psychologie des personnages.

Le Canari ne s’oublie pas. Le Train jaune a accepté ce surnom depuis plus d’un siècle qui colle à ses wagons de couleur sang et or, celle de sa catalanité. Le tortillard a l’incroyable agilité d’escalader la montagne et à éviter les embûches sur son chemin, notamment sur sa privatisation jadis évoquée tout comme sa disparition annoncée. Un tortillard qui transmet sa bonne humeur de génération en génération. Gérard Muller ne l’a pas oublié, ce Canari où il place la belle intrigue de son polar sorti il y a quelques semaines (1).

La Têt, les ponts suspendus, Cambre d’Aze…

“Pour écrire ce polar, je n’ai pas eu besoin de remonter dans le Train jaune ; j’y étais monté plusieurs fois ; j’ai évoqué ce train bien connu des Catalans de mémoire” ! évoque cet ingénieur toulousain de l’industrie spatiale à la retraite qui vient de publier un joli livre : Les Cadavres étaient en Jaune (1). Passionné de littérature, Gérard Muller a écrit le livre qu’il faut pour s’émerveiller de la géographie de ces Pyrénées Catalanes.

Il y a la Têt, bien sûr. Ses ponts, ses dix-neuf tunnels, le pont suspendu Séjourné à 65 mètres au dessus du sol ou le pont Gisclard à 80 mètres au-dessus de vide… Les gorges de la Carança. De Villefranche de Conflent à Latour de Carol, ce sont 63 km de beauté montagnarde. Dans le polar, l’auteur en profite pour tirer des bords vers la cité de Mont-Louis, le pont suspendu, Cambre d’Aze, Osséja… C’est le premier train à bénéficier d’un système de frein aérostatique. Et qui reçoit depuis 1910 son alimentation électrique via le barrage des Bouillouses spécialement créé pour le lancer sur les rails, ce dont Dis-Leur ! vous a déjà parlé.

Tout à coup, un passager s’évapore lors de la traversée du pont suspendu de Cassagne…

Latour de Carol train jaune en gare. Photo : Frédérique Berlic.

Le Train Jaune relie les hauts plateaux catalans. Il est un formidable écrin pour un auteur. D’où l’idée de l’éditeur de demander à Gérard Muller d’y situer son polar qui fonctionne bien. Le pitch de ce bouquin au format de poche ? Le train jaune s’élance. Tout à coup, un passager s’évapore lors de la traversée du pont suspendu de Cassagne, sans que personne ne le remarque. L’enquête est le départ d’une intrigue bien troussée. Ce polar est un bon moment de lecture. On peut le commencer et le terminer en une heure, le temps d’un trajet dans le Train Jaune. Pour un bel avant-goût de découverte de ces Pyrénées, avant une randonnée, pourquoi pas ?

“Ce ne sont que collines boisées et petits villages qui s’éparpillent au gré des courbes de niveau…”

De belles descriptions aussi : “Chacun a regagné sa place dans la voiture ouverte, Caroline, assise sur le bancs des morts, ne peut pas s’empêcher d’admirer le paysage, à commencer par le Cambre d’Aze qui domine la vallée de sa majesté pyramidale. Ses reflets d’argent renvoient leurs rayons comme un symbole de sa toute-puissance. Plus bas et alentour, ce ne sont que collines boisées et petits villages qui s’éparpillent au gré des courbes de niveau…”

“À l’origine, j’avais l’idée de situer ce polar à Prades.” Finalement l’auteur, qui a l’habitude des randonnées, a été aimanté par le chant de ce Canari. “C’est l’un des symboles de l’identité catalane”, rappelle Gérard Muller. L’écriture de ce polar de 140 petites pages est fluide et s’attache plus particulièrement à la psychologie des personnages dans une narration maîtrisée.

Avant qu’il ne soit Premier ministre, Jean Castex avait lui aussi écrit un livre sur ce tortillard, notamment sur un segment de 41 km, visant à montrer la politique volontariste du Second Empire et de la IIIe République dans ce qu’elle avait de novateur réussissant à façonner le destin de ces si attachantes Pyrénées.

Olivier SCHLAMA

  • (1) Aux presses littéraires, 10 € Gérard Muller est un passionné de littérature. Il consacre son temps libre à l’écriture de romans de fiction, du polar au roman psychologique. Il a même écrit un roman qui se situe à Sète, 36, rue des Ivrognes… Il anime un atelier littéraire consacré à l’écriture romanesque (atelier Philémon à Toulouse). Gérard Muller a remporté le prix roussillonais 2015 des écrivains et le grand prix spécial 2016 de la société des poètes et artistes de France, entre autres. Ainsi que de nombreux prix de poésies et de nouvelles.