Pézenas : Le “projet d’ampleur nationale” d’une Maison de la Chanson Francophone

Ce futur haut-lieu piscénois est tout trouvé. Ou presque : il s'agit de l'hôtel particulier de Peyrat, à l'entrée de Pézenas, où se trouve actuellement l'office de tourisme, et qui est voué à déménager, à côté du principal parking de la commune. Photos : Olivier SCHLAMA

Un lieu de création, de diffusion et d’accompagnement pour artistes et compagnies : unique dans la région. De nombreux acteurs y sont associés. Le maire, Armand Rivière, Dany, la petite-fille de Boby Lapointe et Pascal Pintre, directeur de l’agence de développement économique Blue, nous expliquent ce concept qui marie culture, économie et emploi.

Cinquante-et-un ans après sa mort, le facétieux enfant de Pézenas ( Hérault), Boby Lapointe, laisse un répertoire unique d’une cinquantaine de chansons, des bijoux de jeux de mots virevoltants et de mélodies tourbillonnantes. Enterré dans la cité de Molière, ce jovial costaud a peut-être enfanté des héritiers qui s’ignorent. Au Hall de la Chanson, dans le Parc de La Villette, à Paris, il fut donné l’an passé, pour le centenaire de sa naissance, le spectacle Des Racines à Lapointe. C’est peut-être là qu’est née cette magnifique idée de Maison de la Chanson Francophone. C’est un projet à portée nationale.

Nous voulons promouvoir la chanson francophone depuis Pézenas. Et nous sommes en train de créer un écosystème pour y arriver”

Armand Rivière, le maire de Pézenas. Ph. O.SC.

Le maire, Armand Rivière, en explique principe et articulation d’un projet unique dans la région qui n’en est qu’à ses balbutiements : “Ce sera un lieu avec des cours de chanson, un lieu de résidence d’artistes ; un lieu d’exposition… Et qui proposera aussi un incubateur dédié à la chanson que pourrait piloter l’agence de développement économique Blue qui agit sur les agglomérations de Sète et d’Agde-Pézenas (Hérault Méditerranée) ; à la production francophone. Nous voulons promouvoir la chanson francophone depuis Pézenas. Et nous sommes en train de créer un écosystème pour y arriver. Il n’y a pas vraiment d’autres exemples ; il y a bien l’école de Francis Cabrel – que nous connaissons bien et qui a remis des prix aux Voix du Sud  – mais ce sont surtout des masterclasses, des stages et de la formation qu’il effectue chez lui à Astafforf (Lot-et-Garonne)… Nous avons peut-être comme exemple le Hall de la Chanson à Paris…”

Dans l’hôtel particulier de Peyrat, à l’entrée de Pézenas

Ce futur haut-lieu piscénois est tout trouvé. Ou presque : il s’agit de l’hôtel particulier de Peyrat, à l’entrée de Pézenas, où se trouve actuellement l’office de tourisme, et qui est voué à déménager, à côté du principal parking de la commune. Et pour cause : “C’est trop grand pour nous, environ 1 500 m2, et nous payons un loyer exorbitant de 200 000 € par an, confie encore Armand Rivière. Alors, c’est vrai que la commune en récupère la moitié puisqu’elle possède la moitié de cet ensemble avec 49,5 % des parts mais cela reste trop onéreux.” Il va donc falloir soit que la commune vende ses parts soit qu’elle rachète l’autre moitié qu’elle ne possède pas à une dizaine de propriétaires privés de cet ensemble, par ailleurs classé.

La petite-fille de Boby Lapointe a imaginé le concept

L’une des pièces de l’hôtel de Peyrat, à l’entrée de Pézenas. Photo : O.SC.

C’est la petite-fille de Boby Lapointe, Dany, qui en tant que directrice-programmatrice du Printival, un festival de chansons qui se tient à Pézenas – cette année ce sera du 25 au 29 avril -, qui a élaboré la première étude pour que ce projet soit viable dans une ville de 8 000 habitants, à la, certes, riche histoire. Mais qui est loin d’avoir d’insondables finances. Pour ce projet, toutes les bonnes volontés sont attendues au rendez-vous : commune, agglomération et partenaires privés.

Dédié à la diffusion, à la création et accueillant un incubateur culturel, “un endroit ressource”

C’est le Printival qui porterait ce concept. Dany Lapointe, qui l’a écrit, développe : “L’idée est de créer un lieu qui soit autant dédié à la diffusion, avec une salle de spectacle ; de résidence, donc de création ; d’enregistrement et de répétition et disposant également de bureaux de travail pour accueillir un incubateur culturel.” Une structure qui serait en lien avec le monde de la musique et de la chanson francophone. Ce lieu pourrait aussi être au coeur d’échanges internationaux. Un “endroit ressource” en région. “Nous pensons aussi, évidemment, à faire une place aux scolaires, au travers d’actions culturelles.”

“Accompagner les artistes dans leurs créations et les compagnies, s’ils souhaitent en créer une…”

La vue depuis l’hôtel de Peyrat. Ph. O.SC.

Elle poursuit : “Dans ce lieu, nous pourrions accompagner les artistes dans leurs créations et les compagnies, s’ils souhaitent en créer une, par exemple. Il y aurait de la formation pour les artistes et les professionnels qui travaillent dans ce secteur. On va être en collaboration avec Francis Cabrel sur la formation des artistes mais on pourra en plus, chez nous, accompagner et former les professionnels, précise Dany Lapointe.

Cette dernière ajoute : “Il y a, par exemple, pas mal de musiciens et de chanteurs qui ont du talent mais qui n’arrivent pas, parfois, à sortir de la région, à se faire reconnaître. Notre Maison de la Chanson Francophone pourra leur offrir de la visibilité et où on les fera monter en compétences. Il n’y a pas non plus beaucoup de producteurs non plus ; certains sont semi-professionnels… On pourra aussi mutualiser des choses. C’est unique dans la région.” Comment est né ce déclic ? Dany Lapointe livre : C’est venu quand on avait travaillé avec Montpellier sur Pézenas 2022 et le centenaire. Les gens nous ont dit : “De quoi rêveriez-vous pour Pézenas ?” Et ça fait aussi longtemps que je vois les manques sur ce territoire.”

“Ce projet a un potentiel d’envergure de niveau national”

“On est là pour accompagner des projets en capacité d’amener de l’emploi”, réagit Pascal Pintre, le directeur de l’agence d’attractivité Blue qui apporte son concours au titre de “l’attractivité du territoire. Il va se créer à l’hôtel de Peyrat une nouvelle scène de la chanson française. Pézenas c’est la deuxième ville de l’agglomération Hérault Méditerranée ; c’est un pôle d’équilibre où nous avons à coeur d’accompagner des projets comme celui-là. C’est évidemment en lien avec l’ADN de la commune. Ce projet a un potentiel d’envergure de niveau national. Ce genre de projet dynamique ferait beaucoup de bien !”

Ce serait une première. Ce projet entre en cohérence avec cette candidature Montpellier-Sète 2028 ; on a répondu à un appel à manifestation d’intérêt national pour des financements”

Pascal Pintre, directeur de l’agence Blue
Le centre-ville, tout proche de Pézenas. Ph. O.SC.

Quant au rôle de l’agglo Hérault Méditerranée, elle compte déjà un réseau de plusieurs pépinières et incubateurs dits traditionnels (Flex, Gigamed, La Palanquée, Célimer, à Sète avec Ifremer, le Blue Thau Lab…), une solution pour apporter de l’emploi, comme Dis-Leur ! vous l’a expliqué ICI.Avec Pézenas, on viendrait créer un nouvel incubateur dédié à la filière industrie culturelle et créative et, plus particulièrement, musicale. Ce serait une première : ça n’existe pas. Ce projet entre en cohérence avec cette candidature Montpellier-Sète 2028. Enfin, on a répondu à un appel à manifestation d’intérêt (AMI) national pour aller chercher des financements.”

Pézenas, bientôt territoire zéro chômeur

Derrière la démarche artistique, il y a aussi la volonté de créer de l’emploi dans “un bassin parmi les plus touchés de France par le chômage”, souffle le maire qui s’est engagé, parallèlement, dans la démarche vertueuse d’un Territoire Zéro chômeurs, avec création prochaine d’une entreprise dite à but d’emploi. L’objectif ? Boucler le dossier avant l’été. Cette entreprise devra s’investir dans des activités “non concurrentielles”, en lien de près ou de loin avec le monde du spectacle, théâtre ou de la… chanson, telles que le stockage, le gardiennage, les costumes, la location…

Redonner du travail à une quarantaine de chômeurs

De quoi espérer redonner du travail “à une quarantaine de personnes dès le début de l’aventure et sans doute bien davantage, sans doute 80 à terme ; cela fait partie de mes engagements de campagne en 2020 et cela a fait partie de mes premières discussions, après mon élection, avec Gilles d’Ettore, le président de Hérault Méditerranée”, souligne Armand Rivière. Par ailleurs, l’agence de développement économique Blue Invest a, avec des partenaires, un projet de parc d’activités économiques près de l’ancienne base logistique Intermarché de quatre à cinq hectares.

Pour qu’il y ait d’autres Boby Lapointe et d’autres Ta Katie t’a quitté : “Tout à côté/Des catins décaties/Taquinaient un cocker coquin/Et d’étiques coquettes/Tout en tricotant/Caquetaient et discutaient et critiquaient”.

Olivier SCHLAMA

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