Perpignan-Rungis : Le “train des primeurs” enfin remis sur les rails

Ph. DR.

“C’était une insulte au bon sens et à l’avenir !”, a dit le Premier ministre, vendredi à Perpignan, en inaugurant la ligne relancée, grâce à une subvention de 14 M€ de l’Etat. Le problème de fond, la vétusté des wagons réfrigérés, n’est pas réglé à cause duquel le train des primeurs sera deux fois moins long qu’auparavant.

Enfin ! Avec l’autoroute ferroviaire (1) partant du Boulou pour Genneviliers (Hauts-de-Seine) et le train des primeurs Perpignan-Rungis, qui part du marché Saint-Charles, ce sont quelque 26 000 camions en moins sur les autoroutes et 25 000 tonnes de CO2 qui ne seront pas relarguées…

“Je suis particulièrement fier.” (…) La vie politique est faite de symboles. Celui-ci, incontestablement, c’en est un…” Premier ministre et ex-maire de Prades à quelques kilomètres de Perpignan (P.-O.), Jean Castex a inauguré ce vendredi à Perpignan la reprise du fameux “train des primeurs” qui participe de la “réindustrialisation du pays”, de recouvrer une “forme de souveraineté ; c’est ce que nous aussi appris cette terrible crise…”, a-t-il dit.

Vétusté du matériel, manque de clients

Suspendu à l’été 2019, le “train des primeurs” Perpignan-Rungis transporte en wagons réfrigérés des fruits et légumes méditerranéens de Perpignan au marché de Rungis (Val-de-marne). Il  a été donc relancé, vendredi, par le Premier ministre, Jean Castex.  Le premier train est parti du marché Saint-Charles de Perpignan à 16 h 28, pour arriver à Rungis samedi à 3 h 8, à temps pour nourrir le ventre de Paris.

Twiter Jean Castex.

Les raisons invoquées lors de l’arrêt de cette ligne à l’été 2019 ? La vétusté du matériel et le manque de clients. La dure loi du marché, aussi, qui fait que les coûts par la route sont imbattables et que le train ne recevait aucune aide ; cette fois, le “Train des primeurs” devrait être subventionné par l’Etat à hauteur de 14 M€ jusqu’à fin 2024 et relancé par une filiale de la SNCF, Rail Logistics Europe qui a remporté l’appel d’offres.

Ces wagons transporteront autant de fruits et légumes que 18 camions, cinq fois par semaine de novembre à juillet (pendant la saison des primeurs, surtout venus d’Espagne et du Maroc). Ils ont tous été loués par le chargeur Primever, jusqu’à la fin de 2024.

“C’est une affaire qui m’a personnellement frappé…”

Il reprend cinq fois par semaine pendant la saison des primeurs, de novembre à juillet. Jean Castex a ajouté : “C’est une affaire qui m’a personnellement frappé, sidéré par cette information. Qui peut comprendre quand on voit tous ces camions sur l’A9 et que l’on nous explique le danger pour la planète des émissions de gaz à effet de serre et que l’on renverrait encore et encore de marchandises sur la route au détriment du train. Des explications techniques (de cet arrêt il y a deux ans, Ndlr, comme Dis-Leur vous l’a expliqué) il y en a toujours : ce n’était plus rentable. Forcément, on n’avait plus investi pendant des décennies…”

La part du fret est de 9 % en France, 18 % en Europe…

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Comment en était-on arrivé là ? Auteur d’un livre sur le Train jaune, Jean Castex a remis les choses dans leur contexte, avant d’aller assister la soirée-hommage sur Brassens dont il est fan, à Sète, dont il loue également la progression du transport combiné. “Certes, a-t-il continué, on peut faire mieux qu’aujourd’hui (les trains seront deux fois moins longs désormais, car la moitié du train n’était plus en état de marche, Ndlr) mais le sous-investissement majeur est clair de la nation : sur le fret ferroviaire depuis 2 000, les volumes transportés par le train ont diminué de 43 % ! Aujourd’hui, sa part modale est de 9 % alors que la moyenne européenne est de 18 %.”

Son avenir lié à une autoroute ferroviaire Barcelone-Anvers ?

“Pire : la moyenne augmente et nous on décroît… Il n’y a pas de fatalité. Vous trouverez des rapports dans les années 1950 où la voiture se développait ; les autoroutes se construisaient et on expliquait que l’avenir de la SNCF était dans le fret… Il peut nous arriver de nous tromper…”

Ensuite ? Le train des primeurs, qui fournira près de 10 % des volumes de fruits et légumes à Rungis, se trouvera devant une impasse à résoudre : les wagons qui ont été retapés seront trop vieux et devront être changés. Qui paiera ? Peut-être que son sauvetage définitif sera lié à un autre projet, celui d’une autoroute ferroviaire Barcelone-Anvers, à laquelle tout le monde espère l’intégrer ?

Olivier SCHLAMA

(1) Cette autoroute ferroviaire permettra d’embarquer des semi-remorques et des conteneurs sur des trains du Boulou (Pyrénées-Orientales) au port de Gennevilliers (Hauts-de-Seine). Et doit être lancée d’ici à la fin de l’année.

A Sète, aussi, le combiné, c’est l’avenir !

“Calais-Sète”, Train des primeurs, Cherbourg-Bayonne, le transport combiné, c’est l’avenir !” s’est exclamé Jean Castex.Au même moment qu’il relançait la ligne des primeurs, en effet, à Sète, VIIA, l’opérateur d’autoroutes ferroviaires du groupe SNCF, a lancé deux nouveaux services au départ de Sète, géré par le Port de Sète sur la ligne Sète-Calais (en 18 heures et la ligne Sète-Bettembourg (12 heures). “Il s’agit en priorité d’accompagner le développement du groupe Ekol, qui souhaite déplacer une partie de ses volumes de Trieste vers le port de Sète-Frontignan.

Fruit d’un partenariat fort

“Ce développement s’inscrit dans la continuité des flux de semi-remorques et de conteneurs reliant la Turquie et la France, par une combinaison de services ferroviaires et maritimes en mode non-accompagné”, souligne le Port de Sète. C’est le fruit d’un partenariat fort entre le Port de Sète-Frontignan, l’opérateur VIIA, les transporteurs routiers et l’armateur DFDS. Ce lancement a été favorisé par le développement de la ligne maritime par DFDS implantée à Sète depuis juillet 2019, afin de répondre à une demande croissante des clients transporteurs. Le port a accueilli la livraison récente d’une plate-forme ferroviaire de six hectares dédiée à accompagner le développement des autoroutes ferroviaires et la mise en place d’une technologie de manutention horizontale et verticale.

Coût de la plate-forme : 9,4 M€

Le montant de cette plateforme s’élève à 9,4 M€ répartis entre la Région (5,7 M€ pour les aménagements ferroviaires) et Port Sud de France (3,7 M€ pour l’aménagement de la plateforme). Le projet a été financé à hauteur de 725 000€ par la Dotation de Soutien à l’Investissement Local (DSIL) et de 5,14 M€ de crédit européen du Fonds Européen de Développement Régional (Feder).

De nombreux transporteurs autres qu’Ekol sont intéressés par le report multimodal dont les transports Mars, Ares, Vip et Sunlog. Ces services permettront d’offrir une alternative aux flux tout route. Les trains transporteront au démarrage 42 unités dans les deux sens, constitués essentiellement de pièces détachées pour l’industrie automobile à destination du Royaume Uni et de l’Allemagne.