Ours des Pyrénées : L’État recule, les opposants soulagés

Une ourse et son ourson. À Bordes-Uchentein. Photo : OFB. Équipe Ours, Réseau Ours Brun.

À sept mois de la présidentielle, L’État a donc cédé, privilégiant désormais la position des opposants à l’ours brun dans les Pyrénées à la commission européenne qui exige un repeuplement de cette espèce. Les pro-ours, eux, sont dépités.

Début août, la situation était explosive. Comme Dis-Leur vous l’a expliqué, un berger venait d’être attaqué et 56 brebis étaient mortes pour échapper à un ours. C’est dans ce contexte qu’un vaste projet de conservation de l’ours est mis en route. Réensauvagement du territoire, subtilisation de la montagne par le prédateur…

L’ours est au coeur de la polémique dans les Pyrénées. photo d’illustration.

C’était la lecture très critique du projet Life Ours Pyr des élus départementaux de l’Ariège et de la chambre d’agriculture, furieux d’en avoir appris la conception par hasard et qui en demandent à Macron le retrait. “Plus il y aura des ours moins il y aura des troupeaux et des hommes”, alertait il y a six semaines Christine Téqui, présidente du conseil départemental de l’Ariège.

Le préfet de Région, en accord avec le ministère de l’Agriculture vient de demander aux services de la Dreal Occitanie de retirer le dossier Life Ours Pyr.”

Dans un communiqué commun avec Philippe Lacube, président de la chambre d’agriculture de l’Ariège et Alain Servat, président de la fédération pastorale de ce département, Christine Téqui explique que le “dans le dossier Life Ours-Pyr, l’Etat renonce face aux acteurs locaux”. Les trois opposants majeurs de la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées ajoutent : “Le préfet de Région, en accord avec le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, vient de demander aux services de la Dreal Occitanie de retirer le dossier Life Ours Pyr.” 

Enveloppe de 8 M€ de l’Europe

Lors du salon des Pyrénéennes, le préfet de Région a dit : “Concernant le programme européen Life Ours relatif à la préservation de la nature et de la biodiversité, à la suite de la candidature pour le massif des Pyrénées déposée en 2020, j’ai entendu les messages de demande d’explications et parfois les messages d’incompréhension. Ces remontées ont notamment été exprimées à l’occasion du dernier groupe Ours et pastoralisme que j’ai réuni au mois de mai. La concertation et l’adhésion sont pourtant les facteurs clé de réussite de ce programme dont l’objectif est d’obtenir des crédits européens en faveur du massif”.

“Reprendre le projet sur des bases nouvelles…”

Et Etienne Guyot de préciser sur ce qui apparaît comme une volte-face : “J’ai écouté, j’ai fait remonter les positions des acteurs de terrain et je peux vous annoncer, aujourd’hui, que la France souhaite reprendre le projet sur des bases nouvelles en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés du territoire. C’est ce qui vient d’être indiqué à la Commission européenne. J’aurai l’occasion de vous dire prochainement les modalités de concertation qui seront mises en œuvre pour que ce programme constitue une opportunité pour les acteurs du massif.”

Le projet Life Ours Pyr devait bénéficier d’une enveloppe de 8 M€ principalement issus de la Commission européenne, destinée “à doubler le nombre d’ours présent sur le Massif, favoriser la cohabitation entre l’ours et les activités humaines, et faire accepter quoi qu’il en coute la politique de réintroduction des prédateurs aux populations locales”, précisent Christine Téqui et ses cosignataires.

“Un succès biologique”

L’ours avait été abattu par balle, en Ariège. Photo : capture Twitter d’Elisabeth Borne.

Ce projet qui voulait mettre la France en conformité avec la doxa européenne sur le sujet, intervient dans un contexte où le nombre de plantigrades n’a jamais été aussi important, comme nous vous l’expliquions il y a quelques semaines. “C’est un succès biologique”, avait résumé Alain Reynes, directeur de l’association. De zéro ours dans les Pyrénées centrales en 1996, le réseau ours de l’Agence de la biodiversité en a comptabilisé au moins 64 en 2020.

Les signataires sont soulagés : “C’est un large mouvement d’opposition à ce dossier qui a traversé ce printemps les collectivités locales, les organisations agricoles et les organisations pastorales, demandant le retrait immédiat et inconditionnel du projet Life Ours-Pyr.”

Et de conclure : “Le coup d’arrêt donné par le préfet de Région à ce dossier est une véritable satisfaction pour tous les acteurs de terrain, déterminés à faire entendre la voix des femmes et des hommes qui vivent et construisent au quotidien l’économie de nos montagnes, la beauté de nos paysages, et la richesse de notre environnement.”

“Renoncement maquillé en période pré-électorale…”

Pour l’un des acteurs associé à ce plan Life Ours Pyr, Alain Reynes, directeur de l’association Ours Pays d’Adet, c’est “l’incompréhension” qui domine. Dire “vouloir retravailler sur le dossier Life Ours Pyr” est un “renoncement maquillé en période pré-électorale. C‘est brutal et méprisant. L’ensemble des partenaires travaillent sur ce projet depuis un an et demi et nous ne sommes même pas informés de ce retrait et à cette heure nous ne le sommes toujours pas ! C’est incroyable. Sur le fond, c’est tout aussi incompréhensible : ce plan devait justement mettre les moyens – la moitié des 8 M€ ! – pour améliorer la cohabitation avec la communauté pastorale. Autant dire que désormais le fameux plan ours 2018-2028 est vidé de sa substance…”

Olivier SCHLAMA

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