Narbonne : Leur métier, c’est tout un art !

Toute la poésie des fleurs séchées de Fleurêka au musée Narbo Via... Photo Ph.-M.

Qu’est-ce qui peut réunir, en un même lieu, les fines compositions de fleurs séchées d’Audrey et les imposantes créations metalliques de Jonathan ? Ce qui les rapproche tient en quelques mots : passion, talent, créativité… Et il en va ainsi, de stand en stand, de tous les artisans d’art qui présentent leurs créations au musée Narbo Via (*) dans le cadre des Journées européennes des métiers d’art (JEMA)…

“A l’œuvre on connaît l’artisan”, c’est en citant La Fontaine (Livre premier, XXI, Les Frelons et les Mouches à miel) que le sous-préfet de l’Aude Rémy Récio a inauguré le salon des métiers d’art dans l’enceinte du musée Narbo Via. Rendant ainsi hommage à la quarantaine de représentants des métiers d’art qui exposent leurs travaux ce week-end.

En Occitanie, on compte 281 métiers d’art, ce qui représente environ 4 000 emplois. A mi-chemin entre tradition et modernité, ces professionnels s’inscrivent dans la droite ligne du Fabriqué en Occitanie valorisé par la Région, notamment à travers le Pass métiers d’Art.

Souffleur de verre depuis quatre générations !

Yoann Agostinho… en verre et contre tous ! Photo Ph.-M.

Leurs créations, souvent fondées sur le circuit-court, mettent en avant les valeurs de transmission, d’innovation et de respect de l’environnement.

Des parcours de vie, des passions, l’amour des matières et du travail bien fait, ce sont les ingrédients qui s’expriment au contact de quelques exemples qui constituent les “coups de coeur” de Dis-Leur ! 

Pour Yoann Agostinho, la passion est aussi un héritage qui a traversé les générations. “Cela remonte à mon arrière grand-père, au Portugal. Et depuis, on est souffleur de verre de père en fils” explique-t-il. Installé à Bruniquel en Tarn-et-Garonne, il développe, en parallèle d’une gamme plus classique (art de la table, déco, luminaires…), des pièces à l’inspiration bien plus contemporaine.

Telles ces lampes qui imitent les bombes de peiture des graffeurs, réalisées en collaboration avec son frère, Sotiz, lui même street artiste… ou la tête de cerf , alternative joyeuse et créative aux trophées de chasse, présentée dans la galerie lapidaire du musée, comme quelques autres pièces d’exception…

“Les techniques ont peu évolué depuis les Vénitiens, c’est l’inspiration de l’époque qui fait le changement”, poursuit Yoann. Présent sur “quatre ou cinq salons par an” le jeune souffleur de verre souhaite maintenant trouver une galerie où il pourrait exposer ses réalisations les plus personnelles…

Le site de Yoann Agostinho : https://www.yoannagostinho.fr/fr/

Pas facile d’avoir “pignon sur rue”, mais, heureusement, la nouvelle génération d’artisans d’Art peut s’appuyer sur internet. Telle Audrey (Fleurêka, à Narbonne) qui présentait pour la première fois ses créations à base de fleurs séchées.

Une passion née à 7 ans et une fleur qui éclos en Occitanie

Passionnée par les fleurs depuis ses 7 ans, elle n’a pas hésité à passer son CAP en candidate libre, en même temps qu’un BAC Pro en horticulture, puis son BP (brevet professionnel) Fleuriste. Après une expérience de trois ans chez un fleuriste, Audrey s’est décidée à tenter l’aventure : “J’avais confectionné pour différents événements ; mariages, baptêmes, anniversaires etc… en fleurs fraîches ainsi qu’en fleurs séchées… Et petit à petit l’idée des fleurs séchées s’est imposée.”

Depuis le 10 juin 2022, c’est donc une nouvelle fleur qui a éclos dans l’Aude, pleine de fraîcheur et de poésie : Fleurêka. Au musée Narbo Via, la jeune femme expose ses réalisations comme un bouquet d’inspirations diverses, à découvrir. Le tout, avec “des fleurs toutes d’origine française,” précise-t-elle…

Le site de Fleurêka : https://www.fleurekasechee.com/

De la Californie à l’Aude, un parcours “à la carte”

D’autres coups de coeur à découvrir pendant encore une journée, à Narbonne. Mais aussi tout au long de l’année, sur internet ou dans divers salons consacrés aux Métiers d’Art.

Avec notamment les cartes topographiques en bois et en relief réalisées par un couple, Lauren et Yohan, au parcours pour le moins atypique. Il est français et elle brésilienne. Tous deux ont effectué une partie importante de leur carrière dans de grands groupes aéronautiques français. “Nous y avons acquis des compétences précieuses dans tous les domaines industriels et dans l’organisation de l’entreprise”, raconte Yohan.

Des cartes topographiques en bois, d’une finesse et d’une précision exceptionnelles. Photo Ph.-M.

Il explique : “Comme pour beaucoup d’autres, la pandémie nous a amenés à repenser nos vies (…) Nous avons donc décidé de quitter la Californie et de rentrer en France, pour y créer une entreprise humaine et écoresponsable.” Ainsi naquit Boilisé.

L’utilisation du bois comme matière première s’est imposée comme une évidence. Et puis : “Nous avons réalisé que la menuiserie, comme beaucoup d’autres métiers artisanaux, avait beaucoup à gagner des techniques et outils qui se sont développés dans l’industrie. Un métier artisanal n’est pas incompatible avec une découpe au laser ou l’utilisation de données satellites, bien au contraire ils se complètent parfaitement.”

Et pour finir, un bois de Bouleau (importé de Finlande) parfaitement adapté aux besoins de ce travail d’une précision exceptionnelle, pour un résultat absolument superbe ! A Narbonne on peut notamment apprécier la finesse et la précision du travail effectué sur une carte de la frontière franco-espagnole dans les Pyrénées-Orientales (notre photo ci-dessus).

Ce travail n’a pas manqué d’être remarqué lors du Salon du Made in France, à Paris et a même fait l’objet d’une commande de la mairie de La Turbie (Alpes-Maritime) pour une carte “boilisée” offerte au Prince Albert de Monaco.

Le site de Boilisé : https://www.boilise.com/

Même les insectes peuvent avoir du charme !

Les insectes sublimés de Brigitte Pautard valent le détour ! Photo Ph.-M.

On continue ? Allez ! Un petit arrêt sur le stand de Brigitte Pautard qui présente ses broderies précieuses en formes d’insectes aux couleurs chatoyantes. Autodidacte, Brigitte a hérité cette passion pur le travail manuel de sa grand-mère qui cousait et brodait…

Brigitte a pris le temps de l’apprentissage avant de se lancer. Forte de l’expérience acquise, elle se tourne vers les perles, les tubes, les cristaux, les fils d’or, les cannetilles et jaseron. Elle dessine ses premiers insectes, scarabée, coléoptère, coccinelle, abeille, araignée, libellule… imagine leur forme en volume recouverte de tissu, rempli de mousse et les brode, en utilisant tout ce qu’elle trouve pour les magnifier.

Pour un résultat d’une rare beauté, qui sait vous donner envie d’accrocher un de ces insectes sur une robe de soirée ou le revers d’une veste… Rien de clinquant, mais tellement élégant !

Le site de Brigitte Pautardhttps://brigittepautard-broderies.com/

Un musicien, sinon métalleux, en tout cas métallique

Last but not least… Dernier coup de coeur de cette visite qui n’en aura pas manqué avec la découverte des imposantes pièces de métal de Jonathan Martin. Ce musicien, qui a tout de même fait un peu de soudure, a d’abord eu l’idée de fabriquer des instruments de musique en utilisant le métal de bouteilles de gaz.

JM Instrument, attention, c’est du lourd !

“Il me restait beaucoup de matière, alors je me suis demandé ce que je pouvais en faire. Ainsi sont venus les luminaires et puis d’autres pièces, plus décoratives…”  explique Jonathan, qui souligne lui aussi une démarche éco-responsable : “On jette beaucoup trop. Et je trouve intéressant de récupérer un objet pour lui donner une seconde vie, avec une toute autre vocation. Après je trouve assez marrant de revendre leurs déchets aux gens…”

Précisons que Jonathan Martin travaille essentiellement à partir de bouteilles de gaz et d’extincteurs qu’il revisite pour en faire de véritables pièces d’exception. Ainsi, par la magie de son talent, l’artisan d’art recrée à partir de la matière abandonnée

Car si la matière est lourde, l’esprit, lui, est léger et ne manque pas d’humour… Il explique, par ailleurs, que c’est assez souvent que l’on dépose devant son atelier de Marseillette (Aude) des pièces destinées à nourrir son appétit créatif.

La page FaceBook de JM Instrments est ICI !

Dis-Leur ! en a choisi cinq. Mais ils sont une quarantaine d’exposants jusqu’à ce dimanche soir au musée Narbo Via et ce serait vraiment dommage de manquer ce rendez-vous organisé dans le cadre des Journées européennes de Métiers d’Art. Alors en route ! Narbonne, ce n’est pas si loin…

Philippe MOURET

(*) Le musée Narbo Via ouvre exceptionnellement ses portes au public à 10h au lieu de 11h, samedi 1er avril et dimanche 2 avril, en raison du salon régional organisé à l’occasion des Journées européennes des métiers d’art.

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